Le dénigrement électoral est à la mode. « Campagne strictement négative », « vide », « sans enjeu », « lançage de boue », etc. À partir de ces critiques et déceptions en partie fondées, plusieurs électeurs en viennent à rejeter la politique en général et la participation électorale en particulier. C’est là une erreur.
La campagne qui se termine aujourd’hui aura parfois eu des allures de combat extrême. Un aspirant premier ministre a dit d’emblée qu’il « détestait » son adversaire, ajoutant qu’il était « toxique ». L’autre a parlé du « bilan de merde » du parti dont il veut éviter le retour au pouvoir. « Qui se ressemble s’assemble», a lancé une chef en parlant de son adversaire ayant eu de mauvaises fréquentations. Même une élue réputée pour sa douceur a traité un nouveau venu dans un parti adverse comme un pestiféré, soutenant que jamais elle ne « s’assoirait à ses côtés ».
Ces excès furent trop fréquents en cette campagne 2014. Il ne faut cependant pas oublier que l’élection est une lutte pour le pouvoir. En toute circonstance, celle-ci donne lieu des affrontements. Facile, dans l’abstrait, de valoriser la « délibération » ou de faire de belles théories sur l’« agir communicationnel » ; il reste que, dans la réalité, lorsque des êtres humains réels débattent, cela ne se fait jamais de manière parfaitement rationnelle ni aseptisée. Surtout dans une nation comme le Québec, qui traverse une période où des vérités trop longtemps cachées éclatent au grand jour, ou s’apprêtent à être dévoilées…
Conclure que de vifs échanges ne sont que « lamentables enfantillages » justifiant une abstention massive est non seulement excessif, mais erroné. D’abord, ce serait injuste pour une bonne part de la classe politique. Il faut ne jamais avoir connu d’élus pour les mettre tous dans le grand sac commode des pourris-à-temps-plein. Il suffit de les fréquenter un peu pour voir que s’ils sont humains (donc avec des défauts), il y a dans leurs rangs nombre d’hommes et de femmes foncièrement dévoués, cultivant un « goût de l’avenir » essentiel à la démocratie.
Ensuite, s’abstenir serait injuste aussi pour le réel travail effectué par les partis qui tentent de circonscrire les problèmes de notre nation et de définir des solutions. Plusieurs parmi les citoyens désabusés répètent que les partis sont « tous pareils » et « tous nuls ». Mais ces décrocheurs ont-ils jamais fait l’effort de s’informer convenablement, comme le voudrait leur devoir élémentaire ?
Notre démocratie est en crise… mais c’est dans son ADN. Elle « est » remise en question, affrontements, disputes, divisions, etc. Elle est aussi un idéal inatteignable vers lequel il faut pourtant tendre : plus de représentativité ; moins de partisanerie ; contrepoids plus efficaces (un exemple ? Le directeur général de la Sûreté du Québec devrait être nommé par l’Assemblée nationale). Faut-il changer le mode de scrutin ? Adopter de nouvelles manières de délibérer ? Introduire le tirage au sort ? Il n’y aura jamais de réponse durable à aucune de ces questions si les citoyens décrochent en masse.
Enfin, lorsqu’on se compare, on se console (voir Francis Langlois dans notre page Idées). Alors qu’aux États-Unis, la démocratie est livrée comme jamais (par la Cour suprême !) aux forces de l’argent (et qu’à Ottawa, certains rêvent de suivre ce mauvais exemple), ici, au Québec, les dernières lois ont fait reculer ces mêmes forces. Le financement des partis est pratiquement public. C’est là, d’ailleurs, une autre bonne raison de se rendre au bureau de vote aujourd’hui. Puisque la cagnotte d’un parti sera déterminée à partir du pourcentage de vote exprimé obtenu par lui au scrutin, accorder son vote à un parti revient à le financer. Alors, à votre devoir !
JOUR D’ÉLECTIONS
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