Un ex-diplomate nous écrit...

Vigilance, Ressentiment, Liberté

« J’ai envie que mon cri du cœur soit entendu par les patriotes du Québec. »

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Tribune libre

La vigilance? Je me demande si les Québécois comprennent le vrai sens de ce mot. Eh bien, pour moi, étant né dans le berceau du Canada anglais, je suis en mesure d'évaluer toute la malfaisance et la méfiance de vos concitoyens anglophones du Québec et du reste du Canada envers la culture, la langue et même l’existence du français sur le continent nord-américain. Sous-estimer ce péril reviendrait à porter un coup fatal au projet d’un Québec libre et indépendant.


Je vais vous parler du racisme systémique contre le fait français aujourd'hui. Je vous vous parler d'une tentative de d’étranglement politique et culturel sous le prétexte de promouvoir la liberté individuelle et religieuse. Telle est l’hypocrisie de la ley commun du monde anglo-saxon. On vient tout juste d’avoir un autre exemple de cette hypocrisie dans un récent jugement sur la loi 21 par un juge de la Cour supérieure du Québec. Le jugement, qui soustrait les écoles anglophones aux conditions reliées au port de symboles religieux lors de la livraison de services publiques, est une atteinte à l’intégrité territoriale et culturelle du Québec français.


En raison de la tradition parlementaire britannique à laquelle nous sommes malheureusement assujettie, nos juges ne sont pas élus mais plutôt nommés par les partis politiques. L’hégémonie du Parti Libéral est à ce prix. Le lien entre le juge Blanchard, l’opposition à la loi 21 et le Parti Libéral du Québec est direct. Ce jugement absurde cherche à damer le pion du débat sur la religion en nous renvoyant au vieux schisme des deux solitudes linguistiques. Il s’agit d’une recette pour exacerber les tensions entre deux groupes linguistiques au Québec.


Face à l'international, le Québec et le français deviennent autant d'illusions propagées par l'État canadien pour hausser le profil d'un État, qui, somme toute, pourrait très bien faire partie de son voisin du sud. La différence du Canada sur la scène internationale, c'est le Québec français. Voilà tout ce qui sépare cet État du rôle peu enviable d’un État fantoche en appui aux visées d’outre-mer de l’Oncle Sam.


Le Canada anglais cherche désespérément à circonscrire et à diminuer le pouvoir du français à l’intérieur du pays tout en sachant que de telles mesures ne font qu’affaiblir son profil international. Il s’agit d’un vrai baiser de la mort car le fonds du mal tient au fait que le Canada anglais n’a pas de projet national identifiable.


À la différence du peuple palestinien, le peuple canadien erre à travers l’histoire sans jamais pouvoir se définir comme un peuple mais ayant un territoire national déjà. Par contre, le peuple palestinien, qui sait se définir face à ses ennemis, ne possède plus le territoire où leur projet national aurait pu se bâtir.


C’est de ce ressentiment politique et culturel dont il s’agit, celui dont parlaient Max Scheler et Frédéric Nietzsche, lequel se caractérise par la douille vide culturelle de nos concitoyens canadiens. Leur douleur se fait sentir surtout quand il s’agit de relations avec le Québec. Pourquoi cette méfiance? Pourtant, c’est simple. Le Québec possède un projet culturel dont l’expression s’articule, selon la conjoncture politique, autour de la tenue d’un référendum et d’un nouveau pays francophone en Amérique du nord.


Permettez-moi de vous donner quelques exemples.


Au lendemain du deuxième référendum sur l’indépendance du Québec fin 1995, j’étais appelé à représenter les universités du Québec lors d’une visite d’universitaires en Jordanie. Au cours d’une conversation avec l’Ambassadeur canadien et ses invités jordaniens, le résultat très serré du référendum a été soulevé par des officiels jordaniens. L’ambassadeur est intervenu avec sa fougue habituelle en disant que dorénavant l’unité canadienne passait par la noyade du fait français par de plus en plus d’immigrants non francophones au Québec. En un mot, la Jordanie n’avait plus rien à craindre du mouvement des indépendantistes.


Il y a six mois, dans un geste de collégialité, j’ai décidé de me joindre au chapitre montréalais du Conseil international du Canada (CIC). Dirigé par un ancien diplomate et collègue depuis Ottawa, j’ai voulu revigorer les activités de ce chapitre moribond. Après six mois, je dois constater la futilité de ce geste. L’histoire se répète: manigances à huis clos et mainmise d’une minorité anglophone rattachée à une seule université montréalaise, aucune communication avec les membres, manque de transparence, aucune activité internationale. Bref, il s’agit d’un autre club anglophone de Montréalais et je suis le dindon de la farce. Leur site web n’est même pas en français et la partie anglaise répète des erreurs telles – Montréal serait une ville bilingue, un mélange divin de cultures (idéologie multiculturelle extrémiste à la Trudeau), ainsi que d’autres mythes urbains de Montréal. Tout en anglais, bien sûr.


J’ai envie que mon cri du cœur soit entendu par les patriotes du Québec.


Je ne veux plus vivre ni dans une province canadienne, ni dans un État qui se déchire sans cesse en l’absence d’un projet national rassembleur. Ne soyez pas si étonnés que le Canada ait perdu sa campagne pour obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations unies en 2020. Je ne veux plus vivre dans un État qui laisse le sort de ses citoyens en Chine entre les mains des pays étrangers faute d’assumer ses responsabilités internationales.


Par ailleurs, j’ai bien peur que les patriotes du Québec se fassent une notion du Canada anglais laquelle ne tient pas compte du ressentiment profond et destructeur de cette nation envers le projet français du Québec.


Je respecte la liberté religieuse mais je veux vivre dans un État séculaire à 100%. Ça serait pour quand ce respect réciproque?


L'auteur est Bruce Mabley, Phd., directeur et chercheur principal au Groupe Mackenzie-Papineau.


https://www.ledroit.com/opinions/votre-opinion/le-concours-du-service-exterieur-canadien-2019-4d9cc9a13ffec2cba3adb5ff7e9768d2



Autre source : https://lautjournal.info/20170918/anecdotes-dun-diplomate-de-carriere-du-service-exterieur-canadien



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