Tristan Péloquin - Depuis que les chefs ont entamé leurs tournées, les médias anglophones du Québec ont accordé entre 15 et 18 % moins d'attention à la campagne électorale que les médias francophones, indiquent des données compilées par la firme Influence communication pour le compte de La Presse.
Aux yeux de John Parisella, commentateur politique au réseau CTV et professeur associé au département de communications de l'Université Concordia, cette différence n'a rien d'étonnant. «Elle est probablement liée à l'image mentale que les anglophones se font du PQ et du PLQ; ils les définissent par leurs idéologies, qui demeurent stables dans le temps. En revanche, la presse francophone s'intéresse beaucoup aux stratégies et à la tactique, qui changent de jour en jour», note-t-il.
Selon André A. Lafrance, professeur au département de communications de l'Université de Montréal, les médias anglophones ont aussi tendance à accorder plus d'importance aux nouvelles du reste du Canada, ce qui a un impact sur l'attention portée à la campagne québécoise.
Dans sa couverture électorale, la presse anglophone s'intéresse par ailleurs davantage aux enjeux qu'aux candidats, indiquent les données d'Influence communication. Selon le président de la firme, Jean-François Dumas, cette différence s'explique en partie par le manque de porte-parole anglophones dans les partis politiques. Mais le style de couverture «traditionnel» des médias francophones explique aussi cette divergence, croit M. Lafrance. «Au Québec, il suffit d'observer la popularité des journaux à potins pour constater à quel point on aime mettre l'accent sur la personnalité des gens. En politique comme dans d'autres sphères, on se retrouve souvent dans une logique de star system; les enjeux sont souvent évacués au profit des personnalités. C'est quelque chose qu'on voit beaucoup moins dans les médias anglophones.»
Étonnamment, alors que la question de la partition du Québec soulevée par le lapsus de Jean Charest représente depuis mardi 20 % des enjeux couverts par les médias québécois, l'affaire n'a occupé que 10 % de la couverture dans les médias anglophones. «C'est simplement parce que cette question est perçue comme une tempête dans un verre d'eau chez les anglophones, croit M. Parisella. Les partisans de la partition ont toujours représenté une infime marge de la population anglo-québécoise, qu'on appelait les " angryphones ". La plus grande partie de la communauté ne s'est jamais intéressée à cette idée.»
Les médias anglophones accordent par ailleurs une attention particulière au Parti libéral, qui accapare à lui seul la moitié de l'espace médiatique accordé aux partis, contre 30 % dans l'ensemble médias. Cette proportion chute à 25 % pour le Parti québécois (qui mobilise normalement 30 % de l'attention) et à 21 % pour l'ADQ (dont la moyenne oscille autour de 20 %). L'intérêt des médias anglophones pour l'ADQ a cependant quadruplé depuis le début de la campagne, note Influence communication.
«Le parti de Mario Dumont a toujours été perçu comme un parti régional par les anglophones, note M. Parisella. Mais comme les médias francophones en parlent beaucoup, la presse anglophone, qui est à sa remorque, n'a pas eu le choix de s'y intéresser aussi.»
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé