Jacques Parizeau ne pouvait pas ne pas réagir à cette lettre des douze «jeunes» députés péquistes qui, dans Le Devoir de samedi, l'invitaient à se tenir à l'écart du débat politique. Sa réponse est aussi acérée que leur intervention était malhabile. Pour autant, ils n'ont pas tort sur tout.
On ne demande pas à Jacques Parizeau de se taire. Aux États-Unis, les anciens présidents se tiennent à l'écart des débats politiques. Ils sont des sages de la politique, des elder statesmen. Jacques Parizeau est plus que cela. Il est le patriarche d'un mouvement dont il n'a jamais cessé d'être le porte-parole. Il n'entend surtout pas abdiquer son droit de parole.
Cette intervention des «douze» s'appuie sur la nécessité de passer le témoin de la génération des Jacques Parizeau à la leur. Que cela doive entraîner la mise au silence de la génération précédente est toutefois d'un rationnel incompréhensible, sinon qu'il y a là quelque chose de symptomatique du malaise qui, depuis déjà plusieurs années, habite ce parti dont la force initiale était sa capacité à débattre, tout en arrivant au moment crucial à se solidariser autour de son objectif premier, celui de la souveraineté.
L'ancien premier ministre voit dans cette intervention des «douze» plus qu'un symptôme. Nous sommes au coeur de la crise qui secoue le PQ depuis deux semaines, soit la liberté de parole qui a été réduite dans le débat sur le projet de loi 204 sur l'amphithéâtre de Québec et dans le récent débat sur la «gouvernance souverainiste» qu'il trouve incertaine. Un «gâchis», selon son mot qui est un net désaveu de la chef péquiste, Pauline Marois.
Il faut être juste. L'actuelle chef du PQ n'est pas la première à réduire l'espace réservé au débat. Depuis dix ou quinze ans, exprimer des points de vue opposés à la pensée officielle du jour est difficile, voire impossible. L'ont appris à leurs dépens les Joseph Facal, François Legault et plus récemment le quatuor des Curzi, Beaudoin, Lapointe et Aussant. Tous sont partis pour retrouver leur liberté de parole.
Il est vrai qu'un parti politique a besoin de solidarité pour réaliser ce qu'il prône. Cela, c'est pour l'action. Lorsqu'il s'agit de définir des orientations, toutes les opinions doivent pouvoir s'exprimer. En invitant Jacques Parizeau à se retirer du débat, les «douze» se font exécutants de la rectitude péquiste du moment.
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Là où ce collectif de députés n'a pas tort, c'est à propos de la place de leur génération, celle des X, au sein du parti. Les baby-boomers sont des résistants. Convaincre un député de laisser son siège à un plus jeune aura toujours été un exercice difficile. Pendant plusieurs années, on ne voyait dans les congrès que des têtes grises. L'équilibre générationnel est aujourd'hui meilleur. Mais c'est mal comprendre l'évolution des générations que de rappeler aux jeunes quarantenaires que sont ces douze députés qu'à «40 ans, René Lévesque nationalisait les compagnies d'électricité». Le propos est réducteur.
Jacques Parizeau a toujours été un partisan actif du dialogue intergénérationnel. Il a multiplié les tournées de cégeps. On ne peut toutefois dire que lui et ceux de sa génération ont réussi à établir un pont solide avec les plus jeunes générations. On l'a vu avec la défaite du Bloc québécois. Par contre, ce n'est certainement pas en disant que le droit de parole est le privilège de certains que l'on intéressera à la politique la génération des 20-35 ans, celle dite des Y. Bien mauvais message que celui-là.
Parti québécois
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