Si le droit de la France de refonder son dispositif audiovisuel extérieur est incontestable et qu'il y a même lieu de saluer la volonté de porter une présence plus massive de la France dans le monde, la volonté de son gouvernement d'inclure TV5 Monde au sein du dispositif réformé est inacceptable. Le Parti québécois, dont le gouvernement fut à l'origine du partenariat unique et innovateur que fut TV5 au moment de sa création en 1984, s'oppose à toute tentative de placer TV5 Monde sous la gouverne d'un futur holding France-Monde et de modifier la vocation multilatérale d'un opérateur de la Francophonie qui contribue au rayonnement de la langue française et des expressions culturelles des États et nations de la Francophonie. Le Parti québécois dit non à la mainmise de la France sur TV5 Monde.
Nous tenons ainsi à ajouter notre voix à la voix énergique de la ministre de la Culture de la Communauté française de Belgique, qui a affirmé que sa communauté "ne paierait pas pour un outil de rayonnement franco-français", et le directeur de la Télévision suisse romande, qui a déclaré que, "si la dimension multilatérale de TV5 n'est pas garantie, nous n'avons pas vocation à y rester". Nous nous élevons aussi, comme le secrétaire général de la Francophonie, Abou Diouf, contre un projet qui aurait comme résultat concret de faire de TV5 Monde une "filiale" de la future France-Monde.
À la préservation de ce caractère multilatéral et francophone doit également s'ajouter une détermination d'assurer l'indépendance éditoriale de TV5-Monde. Le projet de la France de mutualiser les moyens de production des rédactions des chaînes françaises, autour d'une news room unique permettant une production centralisée et coordonnée de l'information, et de créer un pôle unique de production pour alimenter l'ensemble des antennes, en faisant notamment appel à des journalistes de TV5, n'est guère rassurant à cet égard.
Nous exigeons dès lors du gouvernement du Québec une position plus ferme dans ce dossier. Il ne suffit pas d'être "préoccupé", comme a dit l'être le premier ministre du Québec au premier ministre français, ou d'affirmer mollement, comme l'a fait la ministre de la Culture et des Communications du Québec, qu'on est prêts pour moderniser (TV5) "et qu'on pense que ça ne peut être la voix française; c'est une voix francophone". Il y a lieu d'envoyer à la France un message clair : le Québec récuse toute prise de contrôle de la France sur TV5 Monde et fait front commun avec ses partenaires pour préserver le caractère multilatéral de la chaîne télévisuelle internationale de la Francophonie.
Il est par ailleurs étonnant d'observer le mutisme du gouvernement du Canada dans ce dossier et l'absence de toute résistance à une prise de contrôle de TV5 Monde par la France. Cette prise de contrôle est ainsi susceptible de menacer la présence de Radio-Canada dans l'univers télévisuel international et de marginaliser les contenus radio-canadiens sur TV5 Monde. Le silence du gouvernement canadien laisse songeur.
Turp et Pierre Curzi, députés du PQ*
*Les auteurs agissent à titre de porte-parole du PQ.
TV5 Monde : non à la France!
TV5 Monde
Pierre Curzi16 articles
Porte-parole du Parti québécois en matière de langue, de culture et de communication
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