Le Conseil du statut de la femme du Québec veut que soit établie une règle qui permettrait aux droits des femmes à l'égalité de primer sur la liberté de religion. M Charest, lui, nous propose des modifications à la Charte québécoise qui auraient pour effet de concrétiser cette proposition.
Il ne faut pas oublier que la Déclaration de Vienne, adoptée par 171 nations y compris le Canada il y a 14 ans, a réaffirmé des principes fondamentaux des droits de la personne. L'article 5, cité ci-dessus, constituait une victoire importante pour la Conférence mondiale, en partie parce que les droits des femmes se trouvaient inscrits sur le même pied d'égalité que les autres droits et libertés. Cet article affirme:
«Tous les droits de l'homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés. La communauté internationale doit traiter des droits de l'homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur accordant la même importance.» - Déclaration et Programme d'action de Vienne, adoptés le 25 juin 1993 par la Conférence mondiale sur les droits de l'homme.
Il est ironique qu'au nom de l'égalité des femmes et des «valeurs québécoises» uniques, nous soyons témoins d'une attaque directe contre ce principe de base en droit international des droits de la personne. Voici une idée rejetée il y a belle lurette en droit international.
L'important est de reconnaître qu'aucun droit n'est absolu: l'égalité des femmes ne prime pas sur les autres droits tout comme les autres droits ne priment pas sur l'égalité des femmes.
D'ailleurs, ce jeu d'équilibre est déjà enchâssé dans notre Charte canadienne. De plus, le droit à l'égalité des femmes et des hommes se trouve déjà inscrite et dans la Charte canadienne et dans la législation des droits de la personne au Québec. Il serait souhaitable que la Charte québécoise reflète les même valeurs que la Constitution canadienne en ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes, mais la réclamation d'une hiérarchie des droits est inacceptable.
Symboles religieux
Le Conseil veut aussi rendre illégal tout symbole religieux dans des institutions publiques. Cette proposition est basée sur le modèle français de laïcité qui est contraire à notre démocratie constitutionnelle. Or le préambule de la constitution canadienne commence avec la phrase suivante: «Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit.»
Ceci ne signifie pas que nous devrions devenir une théocratie ni que nous devrions accepter certaines règles religieuses qui vont à l'encontre de nos institutions démocratiques. Elle indique, toutefois, que la liberté de religion doit être prise au sérieux. Il va sans dire qu'il est totalement inacceptable de concevoir un Québec où la liberté de religion serait plus restreinte que dans le reste du Canada.
Et, côté pratique, comment cette interdiction de symbole religieux fonctionnerait-elle? Pourquoi s'agit-il de chapeaux? Que dire des châles de prière? Ou des casquettes Rasta? Ou d'une personne qui veut porter un chapeau dans une institution publique pour des raisons autres que religieuses? Que tout ce débat ait lieu pendant que la croix se trouve en place d'honneur à l'Assemblée nationale suggère pour le moins un double standard et un manque de recul.
Le Conseil du statut de la femme du Québec, en tant qu'organisme public, devrait concentrer ses efforts sur la discrimination à laquelle font face les femmes: par exemple, s'assurer que les femmes immigrantes ont accès à des emplois, promouvoir l'embauche de plus de femmes et de minorités dans la fonction publique, et encourager l'élection de plus de femmes à tous les niveaux gouvernementaux. Voici quelques-uns de vrais enjeux pour l'égalité des femmes.
Tous les droits sont égaux
Accommodements et Charte des droits
Pearl Eliadis2 articles
Pearl Eliadis is a human rights lawyer trained in both civil and common law. A graduate of McGill and Oxford universities, her practice focuses on good governance and public policy, especially as they relate to human rights commissions, Ombuds institutions...
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Pearl Eliadis is a human rights lawyer trained in both civil and common law. A graduate of McGill and Oxford universities, her practice focuses on good governance and public policy, especially as they relate to human rights commissions, Ombuds institutions and reconciliation commissions, both domestically and internationally.
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