« Vous l’avez, vous, la solution? Alors, sortez-la vite, ça presse. Sinon, c’est pas la peine. Faudrait fermer sa gueule et ramer. En ramant, on finira bien par s’organiser. « Oui mais j’aime pas le capitaine. Il est trop gros. Il est trop souriant. Pas assez près du peuple. Trop intellectuel. Trop à gauche. Trop à droite. Trop ceci. Pas assez cela. » Décidément notre recherche d’un messie ne nous quittera donc jamais. On cherche encore un chef. On a besoin d’un chef pour nous dire quoi faire. Mais on s’en crisse du chef. L’important c’est ce qu’il y a dans la tête et le cœur des matelots. S’il n’y a rien, tant pis. Mais s’il y a une volonté à toute épreuve, une détermination sans faille, une vision claire, le chef va suivre. L’important c’est l’équipage, le peuple, pas le chef. »
Pierre Falardeau, La liberté n'est pas une marque de yogourt
* * *
Oui, c’est pas notre faute... c’est la faute au « PQ à marde », le PQ à Marois. C’est la faute à Marois : il faut tout simplement remplacer Marois. La remplacer, oui, mais par qui ? Avant ça c’était le PQ à Boisclair, à Landry, à Bouchard puis à Parizeau. Puis avant c’étaient les années glorieuses de Johnson, de Lévesque. Tous des chefs lessivés, lavés, épuisés. Et voilà maintenant Duceppe qui passe dans le tordeur. Et puis après ? Après ben, on votera pour ON, QS, PI. C’est mieux que rien.
Les Québécois « abandonnés par leurs élites » ? Non mais ! Les Québécois voudraient bien voter pour le PQ, mais ils sont insatisfaits de son programme ? Pas assez souverainiste ? C’est probablement pour ça qu’ils veulent la CAQ, tellement mieux outillée sur ce plan.
Peut-être bien qu’il est trop souverainiste alors ? Ben non, voyons donc. Les Québécois la veulent la souveraineté, ils sont plus souverainistes que le PQ, comme ils ont déjà été plus catholiques que le Pape. Non, vraiment, c’est juste qu’ils la veulent bien faite. Oui, ils la veulent, mais plus tard. On verra, on a d’autres chats à fouetter qu’ils disent. C’est pourquoi ils ont évacué le BQ et qu’ils évacueront le PQ. Après, tout le monde sera content : on pourra continuer de chialer qu’on est souverainiste sans avoir à la faire. Du souverainisme virtuel qu’on appelle ça. C’est plus commode et en plus ça fait branché : dire qu’on l’est, bien sûr, mais que c’est dépassé et que de toutes façons ça ne se fera jamais. Et puis l’on veillera bien à ce que ça ne se fasse jamais.
Voilà maintenant que je suis cynique.
Je n'y comprends rien.
Non en effet vous ne comprenez rien ! Ne voyez-vous pas que c’est seulement en désespoir de cause que les Québécois ne voteront pas pour le PQ ? Non, non, non : c’est simplement la faute au PQ. Rien de plus simple : pas assez ci, pas assez ça; pas assez de ceci, pas assez de cela. Si la PQ était plus ci, si le PQ était plus ça, on n’en serait pas là. La population est à l’avant-garde et le PQ est à la traîne, bien évidemment, comme toujours. Si le PQ était clairement souverainiste, il n’y aurait pas de problème, on ne se poserait plus de questions et, sans hésitation aucune, tous nous voterions pour le PQ, le vrai PQ, le bon PQ. N’entendez-vous donc pas la population demander avec ardeur que le Québec devienne un pays ?
D’accord, j’ouvre les oreilles.
J’écoute.
J’attends.