Jocelyne Richer - Le gouvernement Charest veut voir la spécificité du Québec enfin reconnue par Ottawa dans une «Charte du fédéralisme d'ouverture», un document qu'il souhaite voir enchâssé dans la Constitution canadienne.
Excédé par la valse-hésitation du gouvernement de Stephen Harper pour ce qui est de reconnaître officiellement et de respecter, comme il s'était engagé à le faire, le partage des compétences entre Ottawa et les provinces, le gouvernement du Québec choisit de hausser le ton et d'accentuer la pression sur Ottawa, selon ce qu'a appris la Presse Canadienne, lundi.
Le gouvernement Charest veut donc réactiver les dossiers de nature constitutionnelle, en forçant la main du gouvernement Harper pour qu'il ouvre clairement son jeu sur sa vision du fédéralisme et respecte son engagement de limiter le pouvoir fédéral de dépenser.
Notamment pour éviter que les Québécois renouent en masse avec l'idée de souveraineté, défendue par la nouvelle chef péquiste Pauline Marois, ou flirtent davantage avec l'autonomie adéquiste de Mario Dumont, le gouvernement minoritaire de Jean Charest veut mettre toutes les chances de son côté sur le plan constitutionnel et compte sur le gouvernement Harper pour offrir une image plus appétissante du système fédéral.
«Nous allons nous montrer très, très insistants», a confirmé lundi en entrevue le ministre des Affaires intergouvernementales, Benoît Pelletier, qui prendra son bâton de pèlerin pour faire progresser le concept de «fédéralisme d'ouverture».
Pendant ce temps, à Ottawa, on reste cependant de glace. En fait, le gouvernement Harper renvoie la balle à Québec, en affirmant que le premier ministre Charest devra d'abord obtenir l'appui des partis d'opposition à l'Assemblée nationale avant d'espérer que le dossier mobilise la capitale fédérale, a indiqué lundi une source gouvernementale fédérale bien au fait de ces questions.
Quoi qu'il en soit, aux yeux du ministre Pelletier, la future charte devra énoncer clairement les principes gouvernant le Canada et reconnaître la spécificité du Québec fondée sur ses caractéristiques nationales, de même qu'encadrer le pouvoir fédéral de dépenser.
Loin d'être une vague déclaration contenant des voeux pieux, le document devrait, dans l'esprit de Québec, contraindre par la suite les provinces et Ottawa à respecter les compétences de chacun, d'où l'idée, dans un deuxième temps, de l'enchâsser dans la Constitution.
M. Pelletier considère que la future «Charte du fédéralisme d'ouverture» pourrait donc «être enchâssée, ce qui serait une très belle contribution au Canada moderne», qui chasserait la vision un peu passéiste de 1867.
Selon lui, cette initiative devrait favoriser l'avènement d'un «fédéralisme beaucoup plus sain» que ce qu'on connaît actuellement, voire faire du Canada «un exemple dans le monde entier».
Juste avant de devenir premier ministre, Stephen Harper avait lancé l'idée d'une telle charte, le 19 décembre 2005, à Québec, lors d'une allocution marquante, au cours de laquelle il avait plaidé pour une reconnaissance accrue du Québec par Ottawa.
Mais depuis, plus rien, d'où l'impatience ressentie à Québec.
«Cette idée-là, nous n'en avons jamais entendu parler par la suite. Et pourtant, elle est très, très porteuse», déplore M. Pelletier, qui se montre bien décidé à forcer le gouvernement fédéral à respecter son engagement.
Et «si Ottawa n'est pas prêt à définir le contenu d'une telle charte, moi je le suis», assure le ministre québécois, un expert des questions constitutionnelles.
Un cadre au pouvoir fédéral de dépenser
La rédaction d'une telle charte fournirait l'occasion de régler enfin une éternelle pomme de discorde entre Québec et Ottawa: la limite au pouvoir fédéral de dépenser.
Là encore, M. Harper s'est engagé dès 2005 à satisfaire les provinces, au premier chef le Québec, toujours à l'affût de toute tentative d'intrusion fédérale dans un de ses champs de compétences.
Mais malgré plusieurs professions de foi de la part de M. Harper, «le dossier avance à pas de tortue», dénonce M. Pelletier.
Il n'y a pas de négociations en cours et le gouvernement fédéral n'a pas défini s'il privilégiait une loi ou une entente administrative pour encadrer ce pouvoir.
À Québec, on se dit prêt à envisager «toute forme de limitation qui nous donne une forme de protection», explique M. Pelletier.
Surtout, Québec reproche à Ottawa de vouloir encadrer uniquement les programmes à frais partagés entre le fédéral et les provinces.
Or, Québec veut une protection accrue, totalement étanche, avec droit de retrait et compensation financière, contre toute intrusion fédérale dans ses champs de compétences, comme la santé et l'éducation.
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Le mardi 07 août 2007
Dumont s'interroge sur les intentions du gouvernement Charest
Presse Canadienne
Québec
Le chef de l'opposition officielle à Québec se montre sceptique face aux intentions du gouvernement Charest en matière constitutionnelle.
En conférence de presse, mardi à Québec, M. Dumont a qualifié de ballon d'essai les propos du ministre des Affaires intergouvernementales, Benoît Pelletier, qui dit vouloir faire la promotion d'une Charte du fédéralisme d'ouverture enchâssée dans la constitution canadienne.
L'objectif de Québec serait de faire reconnaître la spécificité québécoise dans la constitution et d'encadrer le pouvoir fédéral de dépenser.
Bien qu'il appuie ces objectifs, M. Dumont se demande pourquoi le gouvernement Charest brandit tout à coup cette demande à la veille de la réunion du Conseil de la fédération mais a omis de la faire inscrire à l'ordre du jour.
Par ailleurs, M. Dumont se dit très inquiet des intentions des autres provinces de vouloir discuter de l'établissement d'un corridor de transport énergétique sur le territoire québécois sans que le Québec n'en soit un partenaire.
Selon M. Dumont, un tel projet est inacceptable; il estime que tout transport d'énergie sur le territoire québécois doit passer par les lignes de transport électrique du Québec, sous son contrôle.
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Le mardi 07 août 2007
Trop tôt pour ouvrir la constitution, croit Charest
Presse Canadienne
Québec
Le premier ministre Jean Charest estime que le fruit n'est pas mûr, selon son expression, pour l'ouverture de discussions constitutionnelles, mais il veut s'attaquer au pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral.
Le premier ministre a confirmé, mardi, à Québec, qu'il entend promouvoir une charte du fédéralisme d'ouverture qui comprendrait des limites au pouvoir de dépenser d'Ottawa.
M. Charest a soutenu que les avancées des dernières années, notamment au chapitre du déséquilibre fiscal, de la place du Québec sur la scène internationale, de la reconnaissance de la nation québécoise et autres étaient autant d'éléments devant mener à une réouverture de la constitution, mais que le dossier n'en était pas encore rendu à cette étape.
Il s'est aussi montré cinglant à l'endroit de Mario Dumont, qui lui reprochait plus tôt dans la journée d'avoir lancé un ballon d'essai à ce sujet sans mettre la question à l'ordre du jour de la réunion du Conseil de la fédération.
M. Charest a répliqué que le chef adéquiste n'a aucune crédibilité en matière constitutionnelle, puisqu'il n'a pas encore réussi à définir son autonomisme et semble vouloir parler constitution tout en étant favorable au démantèlement du forum de discussion, soit le Conseil de la fédération.
Il a aussi rejeté du revers de la main les inquiétudes de Mario Dumont face à un éventuel corridor énergétique qui traverserait le Québec.
M. Charest a précisé que son gouvernement était justement à construire de tels corridors, notamment avec l'Ontario, afin que le Québec profite de son énergie. Il a cependant clairement rejeté l'idée d'un corridor énergétique imposé au Québec sans sa participation.
M. Charest était en compagnie de la présidente de la Commission jeunesse du Parti libéral du Québec (PLQ), Stéphanie Doyon, à l'approche du congrès des jeunes, la fin de semaine prochaine, à La Pocatière.
Parmi les résolutions qui seront étudiées, on note la possibilité d'étaler sur deux ans les primes pour congé parental, l'instauration d'un cours d'«initiation à la réalité québécoise» aux niveaux primaire et secondaire et la création d'un groupe de travail pour se pencher sur les questions d'équité fiscale.
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Charte du fédéralisme d'ouverture
Le premier ministre rejette toute négociation constitutionnelle
Charest contredit son ministre
La Presse, mercredi, 8 août 2007
Beauchemin, Malorie
PC - Pas question d'entamer pour l'instant des négociations constitutionnelles, a déclaré le premier ministre Jean Charest, hier, moins de 24 heures après que son ministre des Affaires intergouvernementales eut proposé une Charte du fédéralisme d'ouverture, qui reconnaîtrait la spécificité du Québec Et qui serait enchâssée dans la Constitution.
La prochaine priorité du gouvernement Charest dans ses relations avec Ottawa est l'encadrement du pouvoir fédéral de dépenser, a clamé le premier ministre en point de presse à Québec, estimant que "le fruit n'est pas encore mûr" pour la réouverture de le Constitution.
"Ça peut être une loi, ça peut être une entente administrative, la forme est à déterminer, a dit M. Charest. Ce que nous voulons, c'est commencer des discussions sur une base bilatérale avec le gouvernement fédéral sur ces questions-là. Le gouvernement a lui-même affirmé lors de son premier budget sa volonté de discuter avec les provinces sur cette question du pouvoir fédéral de dépenser."
La veille, le ministre Benoît Pelletier avait affirmé vouloir accentuer la pression sur le gouvernement de Stephen Harper pour qu'il reconnaisse la spécificité du Québec et le contraindre à respecter les compétences des provinces dans un document qui serait enchâssé dans la Constitution canadienne.
Critiques de l'opposition
À Québec, les deux partis de l'opposition ont critiqué cette position constitutionnelle "confuse" du gouvernement Charest. "Il y a quelques mois seulement, le premier ministre nous paraissait allergique à toute forme de discussion constitutionnelle. Là, maintenant, le ministre lance un ballon d'essai", a critiqué le chef de l'Action démocratique du Québec, Mario Dumont.
Le Parti québécois craint pour sa part que l'annonce de M. Pelletier soit un premier pas vers une reconnaissance et une signature de la Constitution canadienne, "ce que tous les gouvernements du Québec, même les plus fédéralistes, ont jusqu'à ce jour refusé de faire", a souligné le député de Marie-Victorin, Bernard Drainville.
"Si c'est l'intention du gouvernement, M. Charest va devoir s'expliquer aux Québécois, a ajouté le péquiste. C'est de l'improvisation totale et ce n'est pas digne d'un gouvernement du Québec."
L'ADQ serait pour sa part favorable à la réouverture de la Constitution, afin d'encadrer le pouvoir fédéral de dépenser. Mais Mario Dumont dit douter des motivations réelles des libéraux, puisque ni le programme électoral de la dernière campagne, ni l'ordre du jour du Conseil de la fédération, qui s'ouvre aujourd'hui à Moncton, ne traite de ces questions-là.
"Les empiétements du gouvernement fédéral ont probablement été historiquement une des choses qui ont le plus affecté ou réduit l'autonomie du Québec. Ça devrait être un enjeu que le Québec pousse à chaque occasion. En ce sens-là, je suis un peu surpris que ça n'apparaisse pas du tout au Conseil de la fédération", a conclu le chef adéquiste.
Québec veut une Charte du fédéralisme
Dumont s'interroge sur les intentions du gouvernement CharestTrop tôt pour ouvrir la constitution, croit CharestCharest contredit son ministre
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