Il n’y a pas que Thierry Vandal qui est passé par Brébeuf et qui a accordé une demande d’aide à l’institution. Le président du conseil d’administration d’Hydro, Michael L. Turcotte, a aussi donné son aval à son alma mater, a appris Argent. Trop, c’est trop : le gouvernement du Québec doit demander à ce qu’un comité d’éthique fasse enquête, porte jugement, et émette si nécessaire des recommandations.
Reprenons la séquence des événements.
Acte 1 : le Collège Notre-Dame
La semaine dernière, La Presse révèle qu’Hydro-Québec a octroyé une aide financière de 250 000$ au Collège Notre-Dame pour des équipements sportifs. Thierry Vandal est président du conseil d’administration de l’établissement, gouverneur de sa fondation, et ancien étudiant.
Hydro-Québec explique que c’est le comité des commandites d’Hydro qui a pris la décision d’accorder cette subvention. Ce comité est composé du président du CA, Michael L. Turcotte, de monsieur Vandal, de Marie-Josée Nadeau, vice-présidente aux affaires corporatives et générales, et du directeur principal des communications.
Au moment de la décision, monsieur Vandal signifie au comité qu’il est en conflit d’intérêt et se retire.
Notre conclusion à ce moment: la décision du comité, particulièrement parce que le président du conseil y siège, vient dédouaner monsieur Vandal face au code de déontologie.
Acte 2 : Jean-de-Brébeuf
Le Collège Jean-de-Brébeuf sort de l’ombre et indique qu’il est la deuxième école à laquelle a été accordée une aide pour des équipements sportifs. Celle-ci s’élève à 200 000$. La décision est survenue un an après celle de Notre-Dame.
Thierry Vandal est un ancien élève de l’institution. Mais il ne se sent pas en conflit d’intérêt. Il participe à la décision.
Il n’est pas le seul à ne pas se sentir en conflit d’intérêt. Le président du conseil d’administration de la société d’État, Michael L. Turcotte, un autre ancien de Brébeuf, participe également à la décision.
Les questions
Outre le soutien universitaire, seulement deux écoles ont reçu ces dernières années une aide significative d’Hydro : Notre-Dame et Brébeuf.
Certains avanceront qu’un diplômé d’une institution n’est pas nécessairement en conflit d’intérêt lorsqu’il tranche sur une demande de celle-ci. Vrai. Mais tout dépend des circonstances et des faits. Or, c’est justement ce qui manque ici, les faits.
N’est-ce vraiment que coïncidence que les deux écoles qui ont reçu une aide soient des institutions qui sont en lien avec des dirigeants?
Quelle est la force de ces liens? Quelle a été la teneur des échanges entre les acteurs?
Pris isolément, l’affaire Notre-Dame soulevait déjà un certain nombre d’interrogations éthiques. L’affaire Brébeuf, où monsieur Turcotte se retrouve cette fois engagé, en ajoute.
Combinés, ces deux événements sont susceptibles d’amener le grand public à penser que des fonds publics ont pu être utilisés pour satisfaire une cause personnelle et/ou amicale.
Ils sont d’une nature suffisamment préoccupante pour qu’un actionnaire réclame des explications supplémentaires. Il en va de la confiance du public dans la gestion éthique de ses biens.
Le code de déontologie d’Hydro-Québec stipule :
- Article 4. L’administrateur, le dirigeant ou le contrôleur ne peut confondre les biens de la Société avec les siens; il ne peut utiliser à son profit ou au profit d’un tiers, les biens de la société…
- Article 5. L’administrateur, le dirigeant ou le contrôleur ne doit rechercher, dans l’exercice de ses fonctions, que l’intérêt de la Société à l’exclusion de son propre intérêt et de celui de tiers.
- Article 9. L’administrateur, le dirigeant ou le contrôleur doit éviter de se placer dans une situation de conflit entre son intérêt personnel et les obligations de ses fonctions ou dans une situation jetant un doute raisonnable sur sa capacité d’exercer ses fonctions avec une loyauté sans partage ».
Quelqu’un a-t-il enfreint ces dispositions? Quelle est leur portée? Ou doit-on plutôt exonérer de tout reproche messieurs Vandal et Turcotte (et faire cesser toute cette tempête)?
Le gouvernement doit agir
Le même code prévoit que le Conseil exécutif, par l’entremise du secrétaire général associé des emplois supérieurs, peut mandater un comité éthique pour faire enquête sur une situation touchant les dirigeants de la société d’État.
Le gouvernement doit se prévaloir de cette disposition.
Outre une réponse aux questions soulevées plus haut, ce comité pourrait de même recommander toute modification jugée nécessaire aux règles de gouvernance de la société d’État.
Un exemple : ne devrait-on pas prévoir que si un chef de direction ou un administrateur se déclare en conflit d’intérêt, et que la majorité des membres restants d’un comité sont des subordonnés, une éventuelle décision doit automatiquement être envoyée au conseil d’administration pour confirmation?
Il ne s’agit pas ici de mener une chasse aux sorcières, mais d’agir avec transparence pour maintenir la confiance du public en la probité de ses administrations.
Au gouvernement d’agir.
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