Le 24 décembre au soir, un Québécois catholique sur trois mettra les pieds dans une église. Et ce, malgré l'effondrement de la pratique hebdomadaire chez les catholiques.
« Année après année, les spécialistes de la religion au Canada anglais se demandent ce qui se passe au Québec », explique Reginald Bibby, sociologue de l'Université de Lethbridge en Alberta qui a colligé ces données à l'occasion de Noël et a publié plusieurs études et livres sur la foi au pays.
« Les Québécois de langue maternelle française ne vont plus à l'église depuis belle lurette, ils ont accepté sans broncher qu'on retire l'enseignement religieux des écoles en 2002, mais pourtant, ils continuent dans une forte proportion, 83 %, à se dire catholiques. Partout ailleurs au Canada et aux États-Unis, quand un catholique cesse de pratiquer, il cesse généralement de se dire catholique. On voit ce que ça donne à Noël : l'écart avec les catholiques du reste du Canada, généralement plus pratiquants, est relativement moins grand. »
Selon les chiffres de M. Bibby, tirés de plusieurs bases de données de Statistique Canada, 8 % des catholiques québécois vont à la messe au moins une fois par semaine, 16 % au moins une fois par mois et 33 % vont à la messe de Noël. Dans le reste du Canada, 22 % vont à la messe toutes les semaines et 64 % le 24 décembre. Les catholiques hors Québec sont donc presque trois fois plus pratiquants sur le plan hebdomadaire, mais seulement deux fois plus pour la messe de minuit.
Ce phénomène est dû à la « mobilité sociale » du temps des Fêtes, selon Gilles Routhier, doyen de la faculté de théologie de l'Université Laval. « Montréal se vide beaucoup, les gens des régions retournent dans leur petit pays, là où il y a encore la tradition d'aller à l'église à Noël et de faire baptiser ses enfants. »
« Ça fait partie de la tradition et de l'identité. Ce n'est pas une appartenance à l'Église catholique dans son ensemble, mais à l'église du village où les gens se retrouvent encore pour certaines occasions. »
La pratique est aussi plus grande dans les petites villes et en région rurale ailleurs au Canada, selon Reginald Bibby.
Non commerciale
Philippe Vaillancourt, rédacteur en chef de Présence, un média spécialisé en information religieuse pour le Québec, souligne que la messe de minuit - qu'elle ait lieu exactement à ce moment ou plus tôt durant la soirée - est l'une des seules traditions non commerciales de Noël. « On court pour acheter les cadeaux, on court pour cuisiner un bon repas, pour toutes les réunions de famille que beaucoup voient comme un fardeau, alors la messe, c'est un rare moment de repos », dit M. Vaillancourt.
« L'Église l'a bien compris. Il y a une quinzaine d'années, on essayait de mettre le paquet pour la messe de minuit, avec des vêtements liturgiques somptueux et une belle chorale, en se disant que ça attirerait du monde aux messes du reste de l'année, poursuit M. Vaillancourt. Maintenant, on mise sur l'authenticité, avec des chorales de retraités qui tiennent avec des bouts de fil et les mêmes bénévoles comme servants de messe, pour distribuer la communion et nettoyer les bancs. »
M. Vaillancourt se demande tout de même si l'habitude perdurera avec le vieillissement de la population. « Beaucoup y vont par nostalgie ou alors pour faire plaisir à grand-maman. Il faudra voir si la fréquentation de la messe le 24 décembre va se maintenir quand les aînés d'aujourd'hui ne seront plus là. »
À cause de l'immigration?
À Montréal, les églises catholiques qui font des messes en d'autres langues que le français ou l'anglais sont souvent pleines le dimanche. Le taux relativement élevé de fréquentation de la messe de minuit est-il dû à l'immigration ? Reginald Bibby, sociologue de l'Université de Lethbridge, ne le pense pas. « Seulement 14 % de la population québécoise est née à l'extérieur du Canada.
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