Je vous fais part d’un texte que j’essaie de diffuser en France dans le but de pousser les média et les politiques à s’intéresser à la visite prochaine du président à Québec en octobre prochain . Ce qui, pour l’instant en tout cas, reste encore sans succès ...
Voici ce texte :
Petite lettre ouverte d’un rabat-joie Québécois .
Si j’ai par naissance la nationalité canadienne, j’ai aussi par adoption la nationalité française et à ce titre, je me permets de revendiquer cette lettre ouverte . Pour la construire, je me suis servi d’un texte écrit début septembre et qui risque de demeurer non-édité tellement son actualité est pressante . Quitte à passer pour un rabat-joie, mon idée est d’attirer l’attention du grand public français et de ses élites sur un geste politique qui risque de passer pour négligeable en France . Les gouvernements actuels du Québec, du Canada et de la France ont beau endormir depuis plusieurs mois le public avec des images d’Epinal, les conséquences humaines qui en découleront n’iront pas sans nuire à celles et ceux qui sont sans doute les plus grands amis de la France à l’étranger .
A défaut de prétendre rétablir tous les faits en dix paragraphes, je vous résume de mon mieux la situation . Sauf erreur de ma part, le président Nicolas Sarkozy s’apprête à couper les ponts pour une deuxième fois avec les francophones de l’ex Nouvelle-France : les Québécois . Exactement comme cela s’est produit en 1763, il m’apparaît que le peuple de France se trouvera mis en touche une fois de plus pour cette décision . L’absolutisme aurait-il donc maintenant des relents républicains pour ce faire, j’en pose la question ?
A Québec les 17, 18 et 19 octobre prochains, lors de sa présence au Sommet de la francophonie, Monsieur Sarkozy annoncera un virage à 180 degrés de la politique étrangère de la France envers le Québec . Il tournera ainsi le dos à un droit international qu’elle a néanmoins reconnu depuis plus de quarante ans, celui de l’autodétermination de son peuple . Malheureusement, selon moi et beaucoup d’autres, dans l’état actuel des choses, sauf coup de théâtre, trop peu d’espoir reste pour envisager autre chose . La table est mise pour le coup de massue aux Québécois .
Au cours des derniers mois, passant des informations québécoises sur internet aux informations françaises traditionnelles, j’ai pu observer l’habile mise en place d’un plan de communication bi-national visant à faire avaler une grosse pilule amère aux électeurs français sans qu’ils n’en grimacent trop . La stratégie politique fut amorcée par Monsieur Jean-Pierre Raffarin alors qu’au détour d’une entrevue avec un journaliste du Québec, en mars 2008, il déclarait :
Le président français Nicolas Sarkozy pourrait profiter de sa visite au Québec l’automne prochain pour tourner la page sur la doctrine française de " non- ingérence, non-indifférence ... Nicolas Sarkozy est contre le ni-ni et s’exprimera clairement sur le sujet .
L’apogée de la stratégie se trouvant dans la visite en France de la Gouverneure Générale du Canada, Madame Michaëlle Jean, en mai dernier, la méfiance des Québécois envers ce qui les attend maintenant de la part de la France n’a fait que s’accentuer .
La sortie médiatique de l’ex-Premier Ministre est d’autant plus signifiante qu’une succession d’événements prépara diversement les opinions publiques française, canadienne et québécoise au coup à venir . En effet, sous couvert de légèreté, de banalité et même, de festivité, puisque les plus marquants de ceux-ci furent livrés à l’occasion du 400è anniversaire de Québec, leur progression montre que le mieux se prépare pour un Canada en mal d’uniformité pour ses normes nationales . A la mi-octobre, sur un plateau d’argent, Monsieur Sarkozy offrira enfin aux politiciens de ce pays la revanche attendue depuis quarante ans sur un président français qui sut reconnaître la légitimité internationale de notre existence, tant au Canada que hors du Canada . Sous les allures de grands principes d’amour et de fraternité, l’actuel président fera le choix de mettre un point définitif à la préoccupation de la France envers des Québécois qui cheminent démocratiquement en politique .
Qu’en est-il de cette règle française de politique étrangère qui doit si prestement être changée ? Je vous l’explique en trois mots .
Lorsque du balcon de l’Hôtel de Ville de Montréal, en 1967 De Gaulle se prononce pour l’indépendance du Québec, cela jette un froid au Canada . On le comprend . Dans les années qui suivent, sans pour autant renier la parole du Général De Gaulle, en même temps que se tissent des liens étroits entre les Assemblées Nationales de Québec et de Paris, l’Etat français cherche le moyen de temporiser les choses auprès d’autorités canadiennes irritées . En 1977, malgré la tiédeur du Canada, le Ministre Peyrefitte propose une formule : la France convenant de ne plus s’ingérer dans les affaires Canada-Québec, le Canada tolère que la France puisse ne pas s’indifférer du sort et des choix démocratiques du Québec . L’entente bi-latérale prend donc la forme de "ni-ingérence, ni-indifférence" .
Trente années de paix diplomatique s’installent et à cette suite, se développe une réciprocité fraternelle solide et continue entre Français et Québécois . Peut-être d’ailleurs avez-vous eu l’occasion de goûter à l’accueil que font ces derniers à leurs cousins d’outre-atlantique (bien que je crois avoir compris qu’un certain refroidissement se soit déjà manifesté cet été en raison des événements et déclarations en question ici ...) ? Donc, sans que le Canada ne s’en enthousiasme jamais, bien au contraire, des initiatives internationales du Québec s’en suivirent en direction de la francophonie et surtout, de la France, donnant comme jamais auparavant un ancrage nouveau et exceptionnel en Amérique du Nord aux entreprises françaises .
Mais voilà qu’au résultat du référendum de 1995 sur l’indépendance du Québec, en tout, le Canada décide de revenir à des politiques régressives visant à subordonner entièrement le Québec à son autorité ... Ce à quoi la reculade française pourtant très prévisible d’octobre prochain accordera un crédit supplémentaire pour finir de dominer les indociles et incorrigibles Québécois .
Sauf que, de ce changement en politique internationale, quelques données semblent échapper à plusieurs . Notamment aux membres de l’opposition parlementaire qui semblent être à des lieux de distance de la chose, exception faite sans doute de Madame Royal . Par exemple, première notion, la nouvelle politique de la France sera engagée non seulement à l’endroit d’un gouvernement québécois minoritaire mais aussi, avec un gouvernement canadien qui a déclenché des élections pour le 14 octobre pour essayer de se sortir de son égale position de minoritaire . Ensuite, second élément, malgré l’entêtement des élites canadiennes à convaincre de l’enterrement définitif du projet de l’indépendance du Québec, la réalité se montre tout autre . Et finalement, dernier facteur, en dépit d’une absence de deux siècles de la France, alors même que ses propres élites ont cent fois proclamé l’agonie du petit peuple du Québec, celles et ceux qui le composent en sont néanmoins restés aussi enracinés à leur langue, à leur culture et à leur histoire que le chiendent s’accroche à son sol .
Ce qui fit déclarer à un certain général français, lors de sa première allocution radiophonique après son appel du 18 juin aux Français, soit le premier août, un mois et demi après son installation à Londres en 1940, que la résistance opiniâtre des Canadiens français était un exemple pour la France" ...
Certains jugeront que je manque sans doute de modestie à le souligner, ou que je fais preuve d’un chauvinisme coupable, mais vous pouvez me croire, je n’invente pas la chose exprès aujourd’hui pour déplaire à Monsieur Sarkozy ni à quiconque de ses amis .
Voyez-vous, à l’exemple de Gambetta, nous somme nombreux à croire que l’avenir n’est interdit à personne . Pas plus aux Québécois qu’à personne d’autres .
Vive la République, et merci de m’avoir lu .
Yves Côté,
Boulogne-Sur-Gesse
France .
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
1 octobre 2008Vous citez de Gaulle. Soit. Mais faites l'effort de vous renseigner sur le personnage (c'est à dire au delà du seul voyage de 67 au Québec et de quelques autres évènements comme l'appel du 18 juin) afin de mieux comprendre quelques ressorts idéologiques et géopolitiques de la France.
En septembre de cette même année 67, de Gaulle s'est rendu en Pologne. Voir vidéo sur http://www.ina.fr/archivespourtous/index.php?vue=notice&from=fulltext&full=cracovie&num_notice=7&total_notices=9
On connaît l'opinion de de Gaulle sur l'Urss (la Russie boira le communisme comme le buvard l'encre) et durant ce voyage, il dit à son homologue polonais que la division de l'Allemagne est anormale, que la frontière Oder-Niesse sera garantie par les pays européens. L'avenir lui donnera raison sur ces points.
Devant le parlement polonais, il déclare :
"La sécurité véritable de chaque Etat de notre continent ne saurait évidemment résulter de l'affrontement de deux blocs, dressant l'un en face de l'autre des forces en garde et des pactes opposés.
Au contraire, que vienne à s'établir, pour tous, de l'Atlantique à l'Oural, une politique et une pratique délibérées de détente, d'entente et de coopération, il y aurait alors toute chance, pour que dans les conditions et l'atmosphère nouvelle ainsi créées, les peuples européens puissent aborder en commun et régler eux-mêmes, les questions qui sont de leur ressort, et dont la principale est le destin du peuple allemand."
Le dessein politique de de Gaulle est là : une Europe allant de l'Atlantique à l'Oural, indépendante (c'est à dire débarrassée de la tutelle américaine) et contrôlant l'Allemagne (on l'oublie mais à l'origine c'est la raison principale de la construction européenne).
Pour de Gaulle (et bien d'autres), avec la rivalité France-Allemagne, le continent européen s'est suicidé, effondré, a subi un déclassement historique sans précédent... et laisser la porte grande ouverte à la domination américaine et anglo-saxonne en Europe et dans le monde.
C'est le dessein de de Gaulle... c'est aussi la direction que la France tout à la fois suit et encourage en Europe. Sarkozy ou pas Sarkozy.
C'est même le premier dessein de de Gaulle et il est incontournable.
Plus crûment, ce dessein gaullien et français (c'est à dire partagé par une majorité de Français), c'est de la mettre dans le c... des Américains (plus largement du monde anglo-saxon) et bien profond. Quand bien même les Français (comme d'autres dans le monde) apprécient ce qui est produit de l'autre côté de l'Atlantique.
Plus il apparaît que l'Europe peut prendre sa revanche sur l'Histoire, dominer géopolitiquement les Etats-Unis, plus les Français sont pro-européens (Europe politique forte, défense européenne autonome, etc.).
Si vous ne comprenez pas cette violence et qu'en France tout commence par la géopolitique et l'idéologie, vous ne pouvez pas comprendre la France.
J'en reviens au Québec.
Pour la France, le Québec et les relations franco-québécoises c'est soit tout, soit secondaire (c'est à dire des broutilles, de pas vraiment grand chose à quasiment rien à l'échelle de la géopolitique française qui se joue d'abord et principalement en Europe).
Ce "tout" c'est la mettre bien profond aux Anglo-Saxons. Soit le Québec comprend ça, l'accepte et suit cette voie, soit il n'y aura que le "secondaire" s'agissant des relations franco-québécoises.
Et ce "secondaire" n'est pas de nature à intéresser la France (exécutif, peuple, ...), l'avenir géopolitique de la France ne pouvant pas se bâtir sur ce "secondaire" et s'en satisfaire.
La France ne rêve pas de calme, d'isolement, d'indépendance à la Suisse. C'est tout le contraire, elle rêve de peser géopolitiquement et idéologiquement sur son environnement européen et le monde.
La France est un Etat idéologique et pour reprendre la formule de de Gaulle "la France fut faite à coups d'épée".
L'idéologie et la géopolitique sont les deux bases inséparables de la France, d'aujourd'hui comme d'hier. Ne pas le comprendre c'est se fourvoyer sur ce que fait ou ne fait pas, veut ou ne veut pas la France.
J'ai rappelé un voyage de de Gaulle, celui en Pologne. De Gaulle en a fait des dizaines d'autres entre son retour au pouvoir et son retrait, sans parler de ses écrits et autres discours, avec pour nombre d'entre eux son lot de déclarations stupéfiantes que l'on doit connaître pour cerner ce que l'homme qui connaissait le mieux la France (sous ces différents aspects, y compris les plus médiocres et sombres) voulait et considérer comme réalisable pour son pays.
Archives de Vigile Répondre
29 septembre 2008La politique de la France à l'égard du Québec.
La politique du « ni-ni » fera-t-elle place à celle du déni ?
Lettre au citoyen Sarkozy
Québec 2008 04 24
Cher premier citoyen de France,
Vous admettiez récemment au cours d'une émission-bilan télévisée portant sur votre première année de mandat présidentiel, avoir sans doute « fait des erreurs ». Votre intention annoncée de revoir la politique de la France à l'égard du Québec, est-elle l'une de ces erreurs ?
En ce moment, et contrairement à la France cependant, beaucoup de choses s’écrivent dans les médias sérieux du Québec concernant votre désir annoncé de revoir la politique de la France à l’égard du Québec, dans le contexte du contentieux Canada-Québec, tel cet excellent texte publié dans la page Idée du journal Le Devoir du 2008 04 04, et qui en traite sous le titre « Sarkozy abandonnera-t-il le Québec ? » (1) . Vous auriez l’intention de :
Le contentieux Canada-Québec n’oppose pas seulement les fédéralistes aux souverainistes. Il oppose l’État du Canada à l’État du Québec, souverainistes, fédéralistes et autonomistes confondus. Mais peut-être que votre ami Desmarais, ne vous l’a-t-il pas présenté comme ça... Il faut dire que s’il possède de nombreux actifs, dont La Presse, le plus grand quotidien français d’Amérique éminemment partisan du Canada quel qu'il soit pourvu qu'il soit de droite et fût-il unilatéral et centralisateur. Une Presse propagandiste qui ne se prive pas d’y installer des éditorialistes partisan pour influencer ses lecteurs et leur dire quoi penser, même dans leur traitement biaisé de la nouvelle et de ses pages Opinions, s’il est un homme d’affaires émérite, il n’est pour autant pas un politique... mais ne se prive pas d'en faire de manière occulte via « ses » médias.
Ainsi, selon vos aspirations et probablement celles de vos amis québécois, aurait vécu la politique du « ni-ni » « lancée par le ministre gaulliste Alain Peyrefitte » en 1977 pour réchauffer la relation canado-française passablement refroidie depuis le fameux cri du général de Gaulle lancé dix ans plus tôt sur le balcon de l’Hôtel de Ville de Montréal. Vous voudriez trouver semble-t-il une manière de rompre définitivement avec le tonitruant « Vive le Québec libre » qui a galvanisé les forces souverainistes du Québec de l’époque. La formule de la « Non-ingérence et non-indifférence » (2), qui tentait, sans renier le Général, de réchauffer le froid Canada, ne serait même plus de mise à l’heure où le triumvirat conservateur que vous formez avec les premiers ministres du Canada et du Québec, Charest/Art-Peur/Sarkozy, tente de resserrer leurs liens sur la scène internationale, Afghanistan compris.
En 1977, dix ans après le cri du général, le PQ ( Parti québécois ) souverainiste de René Lévesque vient tout juste d’accéder à la tête de l’État du Québec et s’apprête à soumettre son projet de « souveraineté-association » aux voix du peuple démocratique et souverain du Québec, par voie de référendum (3) . En 2008, le PQ après deux référendums perdus ( 1980, 1995 ), ne voit pas comment relancer son projet, cependant que les conservateurs à Ottawa lancent un ballon d’essai en vue des prochaines élections et tentent de damer le pion au Bloc québécois souverainiste dont la députation du Québec est majoritaire au parlement du Canada à Ottawa, visant à séduire les nationalistes québécois toujours intéressés à ce que la Constitution du Canada reconnaisse enfin l’existence du peuple du Québec et ses revendications historiques.
J’espère contribuer à votre réflexion en vous transmettant la citoyenne mienne... avant que vous décidiez d’annoncer la « normalisation » de vos relations avec l’État du Canada, permettez-moi de situer le débat à ce niveau citoyen-là...
L’État du peuple souverain
L’État que vous dirigez et à la tête duquel vous avez été démocratiquement élu, est l’État du peuple de France. Un État démocratique qui est fondé par et sur le peuple démocratique et souverain de France, ce qui distingue cet État-là de l’État du Canada. En effet, ce Canada de vos amis québécois, les très fédéralistes Paul Desmarais senior et junior, n’a jamais soumis à l’approbation du peuple souverain du Canada, ( pas plus qu’à celui du Québec d’ailleurs ), l’Acte qui le fonde, le constitue et le gouverne, contrairement à cette Ve République (4) de France que vous présidez et qui a pour légitimité, le fait d’avoir été soumise directement et nommément à l’approbation démocratique et référendaire du peuple souverain de France.
La légitimité de l’État du Canada ne repose que sur le fait d'être l'avatar d'un Empire monarchique de droit divin, sur les États qui se sont succédés depuis la Conquête et sur le seul bon vouloir des juges de la Cour Suprême de la Souveraine du Royaume-Uni. Jamais dans cette triste Histoire, l’Empire britannique qui a pris possession du Québec par les armes et par la Conquête de la Nouvelle- France s’achevant par la signature par votre « prédécesseur » Louis XV du Traité de Paris en 1763, n'a nommément soumis son ordre étatique à l'approbation du peuple souverain. Jamais le peuple démocratique et souverain du Québec n’a consenti à tel état des choses, à tel État du Canada. Pire, unanimement, les député(e)s du peuple souverain du Québec réunis dans l’Assemblée nationale, qu’ils et qu’elles soient fédéralistes, souverainistes, ou autonomiste, ont voté une motion s’y opposant et ne reconnaissant pas la validité de telle Constitution de l’État du Canada tel qu’il se trouve à se fonder sur la seule prérogative royale de la Majesté la Reine d’Angleterre Élisabeth II qui a approuvé en 1982, le rapatriement de la Constitution du Canada, jusqu’alors partie de l’Empire britannique.
Cet indigne. illégitime et unilatéral rapatriement sans l’aval du Québec, sans l'aval de l’État du Québec, sans l'approbation du peuple du Québec, à lui seul, mérite que la France, soit du côté du Québec, du peuple du Québec, de l’État du Québec, et non de celui de l’État du Canada. Mérite que la France, que le peuple de France, que la présidence française, n’abandonne pas une deuxième fois le Québec en 2008, l’année du 400e anniversaire de fondation de la Ville de Québec, à l’instar de Louis XV en 1763 qui aurait fait Acte de cession. Comme si un peuple pouvait être objet de cession ! ?
Dans cet hiver de neige 2007-2008, battant des records anciens qui montrent à quel point nos climats sont paradoxalement déréglés par le réchauffement climatique, un éventuel réchauffement intempestif de l’État du peuple souverain de France avec l’État de la Souveraine du Canada Élisabeth II, vous ferait être l’émule de Voltaire pour qui le peuple de Nouvelle-France n’était irrémédiablement perdu dans « que quelques arpents de neige » (5), et vous ferait être digne successeur du Roi de France Louis XV, qui, cédant ses territoires par sa seule signature à l’Angleterre, pensait céder le peuple qui l’habitait. Un Souverain n’incarne que la souveraineté du peuple et il ne le peut que dans la mesure où il assure sa protection contre l'envahisseur. Le Souverain de France Louis XV en se soustrayant à son devoir premier qui consiste à protéger son peuple, pire, en cédant ses territoires conquis, n’a fait qu’abdiquer son rôle de souverain du peuple de Nouvelle-France. Dès lors sans Souverain, ce peuple de Nouvelle-France s’est en quelque sorte de facto constitué en peuple distinct de celui de France, en peuple souverain du Québec. Depuis, jamais le peuple souverain du Québec n’a été démocratiquement et nommément consulté pour qu’il reconnaisse dans le Souverain de l’Empire britannique, le fait qu’il soit l'incarnation personnelle de sa souveraine existence de peuple distinct de tout autre. Jamais les États qui se sont succédés depuis n’ont soumis nommément à l’approbation démocratique du peuple souverain du Québec, l’Acte qui les fonde, les constitue et les gouverne, à la différence de la République française qui émane du peuple démoratique et souverain de France qui lui, a été appelé à approuvé par référendum l’Acte qui fonde et constitue la Ve République dont vous êtes le premier citoyen.
L’asymétrie constitutionnelle Canada-France-Québec
Cependant ce défaut évident de légitimité, l’État du Canada, se mêle d’exiger en toute asymétrie, par sa honteuse « loi sur la clarté », que les souverainistes fassent approuver nommément l’Acte qui fonderait, constituerait et gouvernerait l’État souverain du Québec selon telle ou telle règle à sa convenance. Deux poids, deux mesures. C’est ce qu’a compris de Gaulle, c’est ce que comprenaient les tenants de la non-ingérence qui vous ont précédé et ce que comprennent celles et ceux que vos visées inquiètent.
La France, la Révolution française, la Ve République française, ont été, sont, seront une source d’inspiration partout dans le monde, et plus particulièrement au Québec, à cause de sa devise et des valeurs qu’elle incarne, entre autres celles de votre devise d’État, « Liberté, égalité, fraternité ». Ici, la liberté est bafouée, à coup de chantages économiques, politiques, culturels et émotifs, de trafics référendaires et commanditaires, de menaces de représailles. Aucune manipulation n’est écartée pour contrer le destin d’un peuple colonisé qui peine à trouver le moyen de vivre dans la dignité de l'État. L’égalité est bafouée, parce qu’elle est asymétrique, parce que l’État du Canada exige ce à quoi il estime légitime de se soustraire lui-même, à savoir, soumettre nommément aux voix du peuple souverain, sa Constitution.
Quant à la fraternité, dans le blocage politique dans lequel le Québec s’empêtre depuis plus de 30 ans, elle doit pouvoir malgré tout, je vous l’accorde, se vivre entre les peuples souverains et se manifester dans la non-indifférence. Je conçois bien que la France, puisse avoir des relations économiques, financières, politiques, voire guerrières, avec les entreprises, les armées, voire le gouvernement du Canada. Mais cela, sans pour autant renoncer à la logique des États qui impose que l’État du peuple de France ne normalise pas sans réserves ses relations avec un État du Canada tant qu’il ne sera que l’avatar d’un Empire. Tant qu’il n’aura pas nommément et démocratiquement soumis à l’approbation du peuple souverain du Québec, une Constitution qui soit conforme à ses aspirations, à ses droits, à sa simple dignité de peuple, existant, démocratique et partant, souverain. Cela, et réciproquement, comme il sied que la France ne s’engage pas plus avant dans l’appui technique, moral ou autres à la cause de la souveraineté de l’État du Québec, tant que le peuple souverain et démocratique du Québec ne se sera pas prononcé nommément et démocratiquement sur les sujets concernés par son destin politique.
Nous sommes un peuple. Nous sommes le peuple souverain du Québec
Je veux bien croire que le pragmatisme impose ses lois et milite en faveur de l’actualisation de la politique du « ni-ni », mais faudra-t-il que cela s'impose dans le déni. Déni de ce que la France, de ce que le peuple de France a de plus cher, à savoir la légitimité démocratique de la Ve République et la stabilité qu’elle a permis d’installer en France. L’instabilité politique du Québec ne pourra être contrée autrement, dans un sens ou dans l’autre. En attendant, dans le vide constitutionnel qui est notre lot, il ne faudrait pas que le néant s’impose par un éventuel double abandon du peuple de France dont vous êtes le premier citoyen.
Nous sommes un peuple. Nous le sommes dans l’être en espérant sortir du néant... de l'État qui nous gouverne. Nous sommes le peuple démocratique, donc souverain du Québec, orphelin. Aucun État n’a soumis à notre approbation l’Acte qui le fonde, le constitue et le gouverne. Si la France, et par vous, le peuple de France devait s’abstenir d’en tenir compte, vous aurez agi tel Louis XV qui le 10 février 1763 a signé le Traité de Paris et cédé ses territoires de Nouvelle-France à l’Angleterre pour récupérer les Antilles et ses coudées franches en Europe. Vous cèderiez cette fois à l’État du Canada dont Élisabeth II est toujours souveraine... pour vous faciliter la vie... Vous feriez encore du peuple souverain du Québec un objet de cession à la prétendue incarnation de la souveraineté du peuple du Québec... la Reine Élisabeth II. Cession, concession, à une réal-politique dans le reniement, le déni, l’abandon du peuple souverain du Québec. Est-ce là le désir du peuple souverain de France que vous présidez ?
Luc Archambault, citoyen du Québec
Forum Luc A. - Écrits de l'artiste - Politique - Lettre au citoyen Sarkozy
Note de fin de document ici-bas
- 1 Le Devoir, 2008 04 04 –Idées p. 9 « Sarkozy abandonnera-t-il le Québec ? » par : Jean-Marie Girier, Titulaire d'un DEA en sciences humaines de l'École normale supérieure de Lyon, l'Institut d'études politiques de Lyon et l'Université Lumière Lyon 2 - Marc-André Gosselin, Candidat à la maîtrise en science politique à l'université McGill - Christian Bordeleau, Candidat à la maîtrise en science politique à l'Université de Montréal et directeur des analyses en communication politique chez Intangible Communication
- 2 « 4 septembre 1977 : Alain Peyrefitte est reçu à Québec. Il est le premier ministre français à parler de non-ingérence mais de non-indifférence de la part de son pays » – Wikipédia
- 3 Référendum de 1980 – Wikipédia
- 4 Ve République « Ayant été nommé Président du Conseil le 1er juin 1958, le Général de Gaulle chargea une équipe conduite par Michel Debré (futur premier ministre) de préparer un projet de constitution, approuvé massivement par référendum (environ 80% de oui) le 28 septembre 1958, qui est devenu la Constitution du 4 octobre 1958 souvent appelée Constitution de la Cinquième République. » – Wikipédia
- 5 Voltaire «« Quelques arpents de neige » est l'une des citations de Voltaire par lesquelles celui-ci exprimait son évaluation dépréciative de la valeur économique du Canada et, par extension, de la Nouvelle-France, en tant que colonie au XVIIIe siècle. Parce qu'elle exprime de façon concise une vision caricaturale qui avait cours en certains milieux de la France métropolitaine de l'époque, cette expression s'est intégrée à la culture populaire canadienne et elle est régulièrement citée par les Canadiens. » – Wikipédia