Le week-end prochain, le Parti libéral du Québec se choisira un nouveau chef. Entre Pierre Moreau, Raymond Bachand et Philippe Couillard, les militants libéraux semblent vouloir privilégier ce dernier. Est-ce vraiment le meilleur choix pour le parti et pour le Québec?
Cette course au leadership aura été tout sauf emballante. Elle n’a soulevé que peu d’enthousiasme auprès des Québécois, et guère plus chez les militants. Les débats entre candidats se sont déroulés devant des salles rarement combles. Quant aux assemblées pour le choix des délégués, il n’y avait pas foule non plus. Certaines associations de comté n’ont pu pourvoir les 24 postes auxquels elles avaient droit.
Ce désintérêt tient à plusieurs facteurs. L’actualité très riche sur d’autres fronts a déplacé les regards. Mais les vraies raisons se trouvent ailleurs, notamment dans le parti lui-même, qui est ressorti sclérosé des quatorze années où Jean Charest en fut le chef.
Durant les années Charest, le Parti libéral est devenu avant tout une machine et une caisse électorale. Sur le plan intellectuel, ce fut le désert. Il a perdu l’habitude de débattre et de réfléchir, comme l’illustre douloureusement l’image de ce militant qui n’avait pu obtenir un droit de parole en conseil général, en 2010, pour demander une enquête sur la corruption dans la construction. Ce parti a aussi perdu sa capacité d’attirer. Alors qu’un congrès au leadership est l’occasion idéale pour recruter de nouveaux membres, il compte à peine 50 000 membres, ce qui est loin des 100 000 membres d’une autre époque.
Le premier défi du prochain chef sera de redonner vie au Parti libéral. Les deux candidats qui peuvent le mieux le faire sont Philippe Couillard et Raymond Bachand, qui, contrairement à Pierre Moreau, ont pour eux de ne pas être de purs produits de l’ère Charest. Ils ont bien sûr été membres de son gouvernement, mais ils ont davantage la capacité de se distancier du passé récent de leur formation que leur collègue.
Durant cette campagne, les candidats Couillard et Bachand ont manifesté par ailleurs davantage de profondeur que Pierre Moreau quant aux orientations à donner au Parti libéral. On peut croire que l’un et l’autre comprennent qu’il faut aller au-delà des changements de surface pour reconquérir les électeurs québécois. L’enjeu pour les militants qui participeront au congrès de la fin de semaine sera de choisir celui qui peut le mieux définir les orientations futures du parti, et à travers elles, une vision de l’avenir de la société québécoise, bien avant la recette qui permettra de regagner le pouvoir.
Les débats tenus entre candidats dans cette course n’ont pas été aussi éclairants qu’on l’aurait souhaité. On a mis l’accent sur les décisions à prendre (abolir les cégeps, permettre l’exploitation du pétrole) plutôt que sur les politiques à mettre en oeuvre. Néanmoins, Philippe Couillard et Raymond Bachand ont su présenter des visions qui manifestent de réelles qualités de leadership. Si l’on ajoute à cela la dimension de leur expérience personnelle, ils sont sans nul doute tous deux capables de diriger un gouvernement.
Philippe Couillard retient l’attention par ses qualités de communicateur. Notre connaissance du personnage politique est toutefois limitée, restreinte au domaine de la santé. Son instinct lui a fait choisir de se définir comme un homme du centre. Il invite le parti à retrouver les valeurs du libéralisme, fondement du Parti libéral. En sous-entendu, il rejette le néolibéralisme qui a marqué certaines politiques du gouvernement Charest. Cette vision est rassurante, mais lorsqu’il aborde les questions concrètes, on le trouve plus incertain. C’est le cas lorsqu’il aborde l’avenir de la nation québécoise. Bien sûr, il est fédéraliste. À la manière de Jean Charest ou de Robert Bourassa ? On ne le sait pas encore.
Sur ce plan, les positions de Raymond Bachand sont plus affirmées. Il a fait le choix de militer dans un parti fédéraliste. Ses adversaires lui ont reproché son passé souverainiste, mais il est essentiellement un produit de la Révolution tranquille, porteur des valeurs du Parti libéral de Jean Lesage se consacrant à l’avancement de la société québécoise. Il voit son parti redevenir la coalition qu’il avait été avant que l’aile nationaliste ne le quitte, ce qui est un passage obligé pour retrouver le pouvoir.
Raymond Bachand n’a pas le charisme de Philippe Couillard, mais cette qualité n’est pas essentielle, dirait un Stephen Harper. Son expérience de ministre et de gestionnaire dans le privé saura compenser. Pour un parti qui a toujours fait du développement économique son mantra, il représente un atout. Les militants libéraux ne devraient pas craindre de lui faire confiance.
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