Après la voie aérienne, la voie terrestre; après les bombardements, les tanks. L'ampleur prise ces jours-ci par l'offensive israélienne confirme, si besoin était, que l'objectif poursuivi n'est pas seulement de décimer la direction du Hamas, mais bien de le renverser. Purement et simplement. Singularité de cet énième épisode fait de bruit et de fureur? L'Égypte, la Jordanie et l'Arabie saoudite souhaitent la réussite de l'opération israélienne.
Dans le passé, lorsque le gouvernement israélien préparait une attaque, planifiait une riposte, il prévenait secrètement son homologue égyptien. Cette fois-ci, la rencontre entre le président égyptien, Hosni Moubarak, et la ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, s'est faite au grand jour, comme en témoignent les photos accompagnant les articles consacrés au sujet à la veille du premier vol des jets israéliens. Depuis lors, la rue arabe, comme on l'appelle, nous envoie l'écho suivant: Moubarak ayant approuvé la geste militaire conçue à Tel Aviv, il s'avère un complice.
Bon, Moubarak... Admettons un instant qu'il ait accordé sa caution, voire encouragé le feu des F16 israéliens. Admettons et... Quel est son espoir, son intérêt? Si Israël parvient à ses fins, l'ennemi d'hier mettra un terme à la présence de l'ennemi d'aujourd'hui: l'Iran. On s'explique. L'emprise que le Hamas détient sur Gaza agace au plus haut point Moubarak, voire l'inquiète, pour la bonne et plate raison que ce mouvement instrumentalisé par l'Iran évolue à sa guise dans le Sinaï. Et pour les autorités égyptiennes, le Sinaï c'est: pas touche.
Pour bien comprendre la position de Moubarak, il faut absolument souligner les mots que lui et le roi de Jordanie ont formulés lors d'un sommet des nations sunnites après la guerre au Liban de 2006. Au terme de cette rencontre, ces deux dirigeants avaient affirmé, martelé, que l'Iran avait pour ambition de construire «un croissant chiite allant de Téhéran au bord de la Méditerranée». Dans la foulée, Moubarak était allé jusqu'à instiller la haine du chiite, comme si cela était nécessaire, en jugeant que le «chiite réserve sa loyauté au royaume chiite, et jamais au pays qu'il habite».
Dans le passé, lorsque le gouvernement israélien poursuivait son attaque, le secrétaire de la Ligue arabe s'empressait de convoquer un sommet des pays membres. En règle générale, on assistait toujours à un échange de gros mots entre le Syrien Assad et le colonel Kadhafi d'un côté et les autres avant que tous signent un communiqué condamnant l'offensive israélienne. Cette fois-ci, il y a quelques jours à peine, on a observé que les ministres égyptien et saoudien (!) ont accusé le Hamas d'être responsable des bombardements ayant fait au moins 500 morts. C'est dire... c'est dire que l'unité de façade n'est plus de mise. C'est dire surtout que le millefeuille proche-oriental, pour reprendre le qualificatif cher à des géopoliticologues, est en train d'imploser.
Bon, Israël... Si l'on croit les informations qui nous parviennent, il n'est pas dans l'intention des autorités de réoccuper Gaza. Que veulent-elles? Renverser le Hamas, l'éradiquer parce que le premier ministre Ehoud Olmert et ses confrères ont la certitude que tant que le Hamas détiendra le pouvoir, des roquettes et des missiles seront envoyés sur le sol israélien. On souhaite le renverser et refiler Gaza, si l'on peut dire, à l'Autorité palestinienne et à son président, Mahmoud Abbas.
Le problème, c'est que la crédibilité de ce dernier a été entachée par l'offensive militaire que l'on sait. On ne soulignera jamais assez que, dans les heures suivant le début du conflit, des Palestiniens de Cisjordanie, là où se trouve Abbas et les responsables du Fatah, ont manifesté en réclamant le rapprochement immédiat avec le Hamas. Bref, ce dernier se trouve renforcé, y compris dans le territoire de son frère ennemi. À preuve, cette confidence d'un dirigeant du Fatah qui assure que, vu les circonstances, il n'est pas question d'étendre «notre autorité à Gaza derrière des tanks israéliens». Car si tel était le cas, «on passerait pour des collaborateurs». C'est à se demander si la première manche politique, on insiste, manche politique n'a pas été remportée par Téhéran.
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