Toronto Star - À la fin de sa carrière comme premier ministre, en 1993, Brian Mulroney nourrissait de sérieux doutes que le Canada puisse encore être sauvé. Presque deux décennies plus tard, il ne pardonne pas la «trahison» de Lucien Bouchard, qu'il accuse d'avoir comploté avec Jacques Parizeau. Et il estime que Pierre Elliott Trudeau a été étonnamment complaisant avec les nazis.
C'est ce qu'on apprend dans son autobiographie dont le Toronto Star a obtenu un exemplaire. Les quelque 1100 pages de l'ouvrage, qui sera officiellement lancé lundi, décrivent la montée du p'tit gars de Baie-Comeau, ses débuts comme avocat et homme d'affaires jusqu'à sa fin de carrière abrupte, le 25 juin 1993. Il s'attarde essentiellement à ses deux mandats comme premier ministre.
Ce livre, de toute évidence, vise à redorer le blason d'un politicien qui a quitté la vie publique dans la tourmente, après une récession, un accord de libre-échange controversé et l'introduction d'une taxe impopulaire sur les produits et services.
Mais c'est surtout la trahison de son ami Lucien Bouchard qui, presque deux décennies plus tard, continue clairement de tourmenter l'ex-premier ministre. Dans son autobiographie, Mulroney affirme avoir demandé la démission de Bouchard, alors ministre de l'Environnement, dès qu'il a appris que ce dernier avait envoyé un télégramme amical au chef du Parti québécois, Jacques Parizeau.
Selon Mulroney, son cher ami Bouchard avait conspiré pendant des semaines «pour me trahir, pendant qu'il prétendait être mon ami et mon loyal ministre».
«Avec le recul, je comprends clairement pour la première fois combien j'ai été idiot de placer ma loyauté, mon amitié et ma confiance dans un homme incapable de redonner ces mêmes sentiments.»
Mulroney l'admet candidement, il aurait voulu être plus apprécié comme premier ministre. Il estime cependant que ses deux gestes les plus impopulaires, l'accord de libre-échange et l'introduction de la TPS, «ont permis aux gouvernements suivants de mettre de l'ordre dans les finances de l'État».
Mais il se montre moins confiant quant au jugement que porteront les historiens sur son oeuvre dans le dernier chapitre de son autobiographie, intitulé Démission. «Est-ce que j'ai pris les bonnes décisions dans les dossiers les plus importants? Personne ne peut en être certain, écrit Mulroney. Je n'ai pas pris mes décisions pour avoir les meilleures manchettes dans 10 jours mais pour un meilleur Canada dans 10 ans.»
«J'en ai payé le prix par l'hostilité des médias et la désapprobation du public.»
Mulroney s'en prend durement à Pierre Elliott Trudeau, qu'il accuse d'avoir sapé ses efforts de réconciliation nationale. Il critique notamment la décision de Trudeau de ne pas s'être enrôlé lors de la Deuxième Guerre mondiale, alors qu'il était «bien éduqué, bien informé et en parfaite santé».
«Même si la majeure partie du monde libre, incluant le Canada, reconnaissait la nature destructrice et criminelle de la machine de guerre nazi, Trudeau ne l'a pas fait.»
Plus loin, Mulroney accuse Trudeau de n'avoir rien fait pour expulser les criminels de guerre nazis vivant au Canada, une inaction «qui devrait figurer parmi les plus grands péchés par omission de notre pays . Pendant toutes ces années, des criminels de la pire espèce ont trouvé asile ici».
À ceux qui ont accusé Brian Mulroney d'être trop proche des États-Unis à l'époque, il rétorque que l'attitude antiaméricaine des libéraux qui lui ont succédé a été bien plus nuisible. Les remarques comme celle d'une porte-parole de Jean Chrétien qui avait qualifié les Américains de «morons», entraînant l'annulation d'un voyage officiel à Ottawa, peuvent être qualifiées de «plus grande débâcle du genre de l'histoire», estime l'ancien premier ministre.
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