Moratoire sur l'uranium : l'arrêt de mort de Strateco ?

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Une industrie qui n'a pas sa place au Québec

«C'est l'arrêt de mort de la compagnie !» Le président et chef de la direction de Ressources Strateco, qui développe le projet d'uranium le plus avancé au Québec, encaisse durement la décision du gouvernement Marois de lancer une étude environnementale sur l'uranium, et de ne pas accorder de certificat d'autorisation à quelque projet que ce soit durant cette période.
«C'est une journée noire pour les mines, une journée noire pour le Québec», a déclaré le PDG de Strateco, Guy Hébert, dans un entretien téléphonique. «Tout le monde se couche devant les activistes», a-t-il aussi dénoncé.
Strateco a obtenu toutes les autorisations nécessaires pour la phase d'exploration souterraine de son projet Matoush (au nord de Chibougamau), sauf une: celle du ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP). Exaspérée par les délais de 18 mois, Strateco a lancé des procédures judiciaires pour forcer le gouvernement Marois à rendre une décision sur la suite du projet Matoush, auquel s'opposent farouchement les Cris.
Au moment d'annoncer le lancement de l'étude environnementale et le moratoire sur les nouveaux permis, le ministre Blanchet n'a pas voulu commenter la procédure qui est devant les tribunaux. «Ce sera aux gens de Strateco de répondre à cette question», a-t-il dit.
«On est conscient, bien sûr, que ça impose une contrainte [pour Strateco), a ajouté le ministre. Maintenant, notre responsabilité est pour l'ensemble de la société québécoise qui, de façon claire et consensuelle, demandait des consultations environnementales. D'aller de l'avant sans répondre à cette attente de l'ensemble de la population aurait été irresponsable.»
Des recours judiciaires
Selon les explications de Guy Hébert, Québec n'a pas formellement dit non au projet Matoush, jeudi. Mais il est clair à ses yeux que Québec ne donnera pas son accord avant la fin du processus du BAPE.
«C'est un moratoire, sans utiliser le mot, affirme M. Hébert. Tu parles de deux ou trois ans, minimum. Pour nous, on a obtenu un non et on va agir en conséquence.»
Strateco a investi 120 millions depuis 2006 dans le projet Matoush. La société envisage des recours pour que les actionnaires soient compensés. «Nos actionnaires, c'est pas vrai qu'ils vont se faire charrier de même. Y a des lois au Canada pour protéger les actionnaires contre les actions gouvernementales.»
À vendre ?
Strateco estime ne pas avoir les reins assez solides pour survivre le temps que le BAPE exécute ses travaux - le gouvernement anticipe des délais d'un an, Strateco s'attend à deux ou trois ans «minimum». «Mes liquidités s'épuisent à un rythme de 300 000 $ par mois», soutient Guy Hébert. Il a déjà mis à pied 12 employés et il en reste 26.
«On a contacté les compagnies qui sont intéressées à nous acheter, dit M. Hébert. On a eu une offre conditionnelle de 220 millions en janvier 2011. On considère que ça vaut 300 millions.»
Aujourd'hui, la capitalisation boursière de Strateco est sous les 20 millions. Une société aux bases financières plus solides aurait les moyens d'acheter le projet et d'attendre la fin des études environnementales, d'après M. Hébert.
«Je trouve ça plate, nous avons mis beaucoup d'efforts. Je suis surtout déçu d'être Québécois. [Avec ce genre de décision], ça ne te tente plus de travailler ici. Il n'y a plus de règles qui tiennent au Québec.»
Le projet Matoush a été autorisé par le gouvernement fédéral et la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Le MDDEFP a déjà délivré 22 certificats d'autorisation divers depuis le début du projet, souligne Guy Hébert.
Les Cris, qui s'opposent à l'exploration et l'exploitation d'uranium sur leur territoire, ont salué la décision de Québec de ne pas autoriser le projet Matoush, mais ont dénoncé le choix de procéder par le BAPE pour l'examen de la filière, un processus qui irait, selon eux, à l'encontre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.


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