(GRANBY) Selon le dictionnaire, des cachotteries sont des secrets de peu d'importance. Ou perçues comme telles. Mais qui un jour prennent de nouvelles dimensions. Pas grave, d'autant plus que personne ne le saura, croit-on naïvement...
C'est ce qui se produit présentement. À plusieurs niveaux, dans différents domaines. C'est partout pareil. Par exemple, dans l'Église : au Vatican, dans des diocèses; mais aussi dans les gouvernements, à Ottawa ou à Québec. Ça commence par des négations, puis des demi-vérités, suivies de prétextes, d'insinuations envers les uns et d'accusations envers d'autres. On est loin de la transparence qu'on croit nécessaire à la crédibilité des personnes, et des institutions, encore moins. Il y a un prix à payer.
Par qui commencer? Disons par la crise que traverse l'Église catholique ces temps-ci. Il y a un bon moment que des prêtres de certains diocèses étaient accusés de pédophilie. Leurs évêques avaient fermé pudiquement les yeux, avaient fait semblant de ne pas savoir pour éviter le scandale. Résultats : des centaines de millions de dollars de compensation aux victimes. Et des centaines de millions de catholiques déçus, blessés. Parce qu'ils apprennent une réalité décevante, d'une part; et qu'on leur a cachée, d'autre part.
Le pire, c'est que dans les cachotteries, il y a souvent une partie fausse et une partie vraie. Les proportions varient. Ce qui reste, finalement, c'est le sentiment d'avoir été dupé : le faux l'emporte sur le vrai.
Allons ailleurs. À Ottawa, le premier ministre entretient la cachotterie. La dernière concerne la ministre Helena Guergis : le chef du gouvernement lui retire son ministère et passe son dossier à la Gendarmerie royale. Plutôt exceptionnel comme procédure. Pour quelle raison? Vous ne le saurez pas, les enfants.
À cause de son mari aux activités louches? À cause de ses erreurs personnelles? Le silence de M. Harper, ses cachotteries, ne sert qu'à diminuer la réputation de deux personnes, de son gouvernement, de son intégrité personnelle. Quand il est évident que l'on veut cacher des choses, on soupçonne les pires. Le chef du gouvernement, autrefois apôtre de la transparence, ne se rend pas compte qu'il fait mal à l'institution gouvernementale, château fort de la démocratie.
Troisième lieu troublé par les cachotteries : le gouvernement du Québec. Là, la tendance populaire est de croire de plus en plus au mensonge.
Sondage Angus Reid- La Presse : " Quel est le plus crédible? Marc Bellemare? - 58 %; le gouvernement Charest? - 11 %." Ou encore : " Qui ferait le meilleur premier ministre du Québec? Jean Charest? - 15%; Pauline Marois - 25 %. " Alors que la chef péquiste n'a rien fait, depuis un long moment, pour gagner de nouveaux appuis. Son avance n'est pas liée à la performance de son action, mais plutôt à la désaffection du chef du gouvernement pris à partie par son ancien ministre de la Justice. Pourquoi?
Par des cachotteries, qui vont des manigances de la ministre de l'Éducation en faveur des écoles juives jusqu'au refus d'une enquête publique sur les relations du monde de la construction avec le gouvernement. Ce que l'on a cru, un moment, un problème montréalais est bientôt apparu comme une situation répandue partout au Québec; même que le milieu de la construction aurait un pouvoir sur le gouvernement; plus encore, qu'il pourrait influencer la nomination des juges...
Une enquête policière à Montréal n'a pas satisfait les observateurs plus aguerris; l'enquête publique sous la présidence d'un juge hors de tout soupçon de partialité ne satisfait pas encore; son mandat n'éclairera pas la situation ambiguë actuelle ou passée.
Résultat : le gouvernement perd sa crédibilité à 85 %. À cause de cachotteries qu'on a crues insignifiantes; qui ont grossi au point de miner la crédibilité des personnes. Donc de l'institution; donc de la démocratie elle-même.
Tout ce qu'on peut espérer, aujourd'hui, c'est le retour au respect de nos institutions et à ceux qui les dirigent.
L'auteur a été président-éditeur de La Voix de l'Est en 1988-89
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