Après les sables bitumineux...

Le gouvernement éthique de Jean Charest

Chronique de Louis Lapointe

À défaut de produire du pétrole propre, les sables bitumineux produisent du pétrole éthique. C’est du moins ce que suggère le nouveau ministre fédéral de l’environnement, Peter Kent.
Après une telle déclaration, il ne serait pas étonnant d’entendre le ministre québécois de l’Environnement, Pierre Arcand, déclarer à son tour que nos gaz de schiste ont les mêmes vertus éthiques que celles des sables bitumineux de l'Alberta.
On le voit bien, l’éthique ne résout pas les problèmes environnementaux, elle les justifie.
Voilà pourquoi les codes, comités et commissaires à l’éthique se multiplient à travers les organisations publiques et privées. Comme un épais et somptueux tapis, à défaut de faire disparaître les saletés et les imperfections du parquet, elle les masque.
C’est dans cette perspective qu’il faut voir la nomination du nouveau commissaire à l’éthique à Québec.
***
Comme le gouvernement libéral de Jean Charest devra montrer patte blanche au cours des deux prochaines années s’il souhaite être réélu, il lui faudra un bon chien de garde qui agira à titre de caution morale : un haut fonctionnaire au-dessus de tout soupçon et indépendant du fait que sa nomination a été unanimement approuvée par les députés de l’Assemblée nationale.
Certes, le commissaire à l’éthique policera les députés et les ministres, mais il ne pourra rien faire contre la culture dont il est issu. Il devra se cantonner dans son rôle sans sortir du cadre de la loi qu’il a pour mission de faire respecter.
Il devra fermer les yeux sur tout ce qui n’est pas de sa juridiction, ce qu’il sait ou ce qu’il a jadis appris dans le cadre de ses anciennes fonctions de haut fonctionnaire, comme l’ont fait avant lui le directeur général des élections et le commissaire au lobbyisme. Adopter un comportement éthique et professionnel comme on dit dans le jargon du métier. Un concept que connaissent bien les professionnels soumis à un code de déontologie.
Voilà pourquoi la nomination d’un commissaire à l’éthique n’empêchera pas l’octroi de douteux contrats par le gouvernement. Elle ne remédiera pas non plus au silence complice des sous-ministres qui relèvent du bureau du premier ministre à qui ils ont juré fidélité quoiqu’il advienne, comme on l'a vu lors de la commission Bastarache. Elle les justifiera.
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Si le pétrole sale des sables bitumineux est éthique, je ne vois pas pourquoi le gouvernement de Jean Charest ne pourrait pas devenir le gouvernement le plus éthique de l’histoire du Québec moderne.
Un exploit qui pourrait même lui valoir une reconnaissance internationale au même titre qu’il est devenu un chef de file en matière d’environnement.
Nous, Québécois, qui connaissons bien Jean Charest, savons qu'il est capable de tout... même briller parmi les meilleurs!
***
Billet précédent:
Les étudiants, les grands perdants ; les dirigeants, les grands gagnants !

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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    8 janvier 2011

    Lorsqu'une population entière depuis au moins 50 ans est privée de formation philosophique rigoureuse et de logique formelle, on lui passe n'importe qu'elle sapin exactement comme le ministre Kent l'a fait en faisant détourner de manière aussi insidieuse le débat sur les graves problèmes environnementaux que constitue l'exploitation des sables bitumineux de l'Alberta au profit d'une éthique illusoire qu'ils semblent offrir; tout comme d'ailleurs vous le soulignez avec justesse le gouvernement libéral de J.J. Charest s'emploie à le faire dans la majorité des dossiers qu'il gère depuis 2003, mais plus particulièrement dans la gestion de la crise de confiance à son égard, crise ayant conduit à la nomination d'un commissaire à l'éthique (certes louable au premier regard, mais là est l'entourloupette de ce gouvernement d'avoir mis en avant plan ce noble geste pour faire oublier la commission d'enquête nécessaire et impérative dans les circonstances que nous connaissons).
    Lorsqu'un système d'éducation prive la jeunesse d'une formation philosophique rigoureuse et de logique formelle (ce qui est le cas au Québec depuis l'abolition du cours classique), les politiciens ont ensuite le beau jeu de faire ce qu'ils veulent en balançant à la population les plus beaux, grands et insidieux sophismes, et ils s'en trouvera dans la population pour applaudir celles et ceux qui sous les apparence d'un doux agneau, agissent en renard avec les machinations et les ruses les plus perverses pour exploiter toujours et encore davantage les plus faibles.
    De Soulanges en ce 8 janvier 2011
    Normand Perry.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 janvier 2011


    Les sables bitumineux comme les gas de schiste comme le gouvernement de Jean Charest pourraient bien être qualifiés de "éthiques", ils ne m'en feront pas moins soulever le coeur. Dégoûtant!