La voie de la raison

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La voix de la raison, c'est celle de l'Australie : « Si nos valeurs et notre manière de vivre ne vous plaisent pas, la porte est grande ouverte, vous pouvez partir. »

Jacques Parizeau et Lucien Bouchard misent sur l'apaisement. Ils proposent un compromis qui permettrait au gouvernement de se montrer digne dans l'adversité en abandonnant les éléments les plus controversés de sa charte des valeurs.
Pauline Marois empruntera-t-elle la voie de la raison tracée par ses prédécesseurs, ou confirmera-t-elle plutôt l'opportunisme électoral d'une crise qu'elle semble avoir fabriquée de toute pièce sur le dos de la métropole?
On voudrait bien croire aux convictions laïques d'un gouvernement qui agit pour le bien commun, mais les indices d'une stratégie visant à faire le plein de votes en dehors de Montréal sont trop nombreux pour être ignorés.
Le débat, d'abord, ne s'est pas imposé, il a été imposé par le PQ à la veille de probables élections. N'eut été ce ballon d'essai lancé en août dernier, l'économie vacillante de la province serait probablement l'enjeu de l'heure. «Pourquoi aujourd'hui?», demandait d'ailleurs jeudi Jacques Parizeau.
Le gouvernement rétorque qu'il faut agir car il y a péril au «vivre ensemble», mais l'absence d'une «menace» claire prouve le contraire: un jour on évoque l'égalité homme-femme, le lendemain la laïcité et le surlendemain, les accommodements.
On se retrouve ainsi avec une charte qui vise l'interdiction du voile, mais tire dans toutes les directions pour afficher un semblant d'équité. Une interdiction, par ailleurs, dont l'utilité n'a pas été démontrée: la femme qui porte le voile par choix l'enlèvera peut-être, mais celle qui le porte par obligation, que l'on prétend vouloir sauver de l'asservissement, sera probablement obligée de quitter son emploi. Pourquoi cibler les musulmanes, demandait aussi M. Parizeau?
Le gouvernement Marois, enfin, s'entête à imposer à Montréal une charte dont Montréal ne veut pas. Il ignore les critiques des élus et des institutions, allant jusqu'à menacer d'éliminer le seul élément de la Charte qui atténue les craintes, la clause de retrait. On attise ainsi la colère à Montréal... et contre Montréal, qui est montrée du doigt dans le reste du Québec. «Est-ce qu'on peut se calmer?», demandait avec raison M. Parizeau.
Malheureusement, tout cela pue la stratégie électorale. Une stratégie souvent utilisée contre l'île de Montréal, cadenassée politiquement depuis plus de 25 ans. Le PQ, qui a pourtant montré une certaine sensibilité pour la métropole, choisit par pur opportunisme d'accentuer le clivage entre ville et régions.
Tout cela est une mauvaise interprétation des faits? Soit. Que le gouvernement profite de la proposition de M. Parizeau pour le prouver. Rien de plus simple que de s'en tenir à une charte qui réaffirme la laïcité de l'État, balise les accommodements et encadre le port de signes religieux en les interdisant uniquement à ceux qui exercent un pouvoir coercitif au nom de l'État.
Comme dit Lucien Bouchard, «une rare fenêtre politique s'ouvre». Si l'objectif est véritablement de rassembler, le gouvernement n'a d'autres choix que d'en profiter.


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