Israël bombarde le Liban, le Hezbollah tire des missiles en direction d'Israël, que fait le G8? Le service minimum. L'ONU? Elle confirme son impuissance. Et ce, au moment où tous les ingrédients d'une guerre régionale sont réunis.
Dans la déclaration signée par les chefs d'État du G8, on prie, on n'exige pas, on prie donc les parties concernées pour qu'elles oeuvrent au «retour des soldats israéliens sains et saufs de Gaza et du Liban, [à] l'arrêt des bombardements du territoire israélien, [à] l'arrêt des opérations militaires israéliennes» au Liban et à Gaza. Aucune mesure propre à imposer un cessez-le-feu n'a été arrêtée. En fait, on a pris soin d'occulter l'implication réelle, même si indirecte, de Damas et Téhéran. Pire, alors que, d'un côté comme de l'autre, on emprunte la voie d'un sanglant engrenage, les membres du G8 n'ont rien trouvé de mieux que d'évoquer la création d'une... énième mission de l'ONU dans les environs.
Pour quoi faire ? Voir, entre autres choses, à ce qu'un texte «onusien», adopté il y a des mois de cela, soit -- enfin ! -- appliqué. Il s'agit de la résolution 1559 composée après l'assassinat il y a plus d'an de Rafic Hariri, ex-premier ministre du Liban et bête noire des Syriens. La 1559 stipule que l'autorité du gouvernement libanais élu démocratiquement passe notamment, voire surtout, par le désarmement de la milice du Hezbollah, qui s'avère un État dans l'État, une armée dans l'armée. Rien n'ayant été fait à cet égard, le gouvernement syrien a eu tout le loisir de prendre sa revanche, par Hezbollah interposé, avec l'aide plus que tacite des nouveaux maîtres iraniens.
Au vu de ce qui se passe depuis quelques jours, c'est à se demander si l'analyse faite par le roi Abdallah de Jordanie il y a un an n'est pas la plus juste. Que disait-il ? On assiste à l'émergence d'un croissant chiite allant de Téhéran au bord de la Méditerranée. En tout cas, les faits récents semblent lui donner raison. Comme chacun sait, Téhéran prend un soin particulier à renforcer l'emprise des chiites sur Irak.
Dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, une augmentation notable de rencontres au sommet, d'accords signés entre Syriens et Iraniens, a été observée depuis le début de l'année. Ainsi, en juin dernier, les ministres de la Défense des deux pays paraphaient un accord de sécurité commune prévoyant une coopération militaire. Il faisait suite à l'annonce suivant laquelle les mois qui viennent constitueraient la saison des prisonniers palestiniens détenus en Israël.
Dans un premier temps, la direction du Hamas à Damas a organisé l'enlèvement d'un caporal israélien. Puis ce fut le kidnapping de deux soldats israéliens par le Hezbollah. Dans un cas comme dans l'autre, la riposte israélienne fut aussi immédiate que disproportionnée. En Israël, certains observateurs sont allés jusqu'à expliquer la démesure de la réaction par le manque d'expérience militaire du premier ministre Éhoud Olmert et de son ministre de la Défense Amir Peretz. Peut-être qu'il y a du vrai dans cette analyse. Mais il est plus que probable que le premier ministre Olmert ait décidé d'en finir avec le Hezbollah comme avec le Hamas davantage que de rapatrier les prisonniers.
Il est plausible, pour ne pas dire certain, que la manière forte choisie par le premier ministre Olmert pour mener l'opération en cours va cimenter l'unité des Libanais pour le plus grand bénéfice des intégristes du Hezbollah et, derrière eux, de la Syrie et de l'Iran. Il est tout aussi plausible que l'offensive à Gaza va profiter à la faction la plus jusqu'au-boutiste du Hamas basée, on le rappelle, à Damas. Et ce, aux dépens du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui venait juste d'obtenir une concession non négligeable de la part de la direction du Hamas à Gaza, soit la reconnaissance implicite de l'État d'Israël.
La dégradation aussi rapide que brutale des relations entre les acteurs du Proche-Orient est peut-être bien la mise en relief, entre autres, de l'indifférence ou de la lassitude des gouvernements occidentaux à l'endroit de cette région. La «feuille de route» du quartette (Union européenne, Russie, ONU et États-Unis) est un échec qu'on ne veut toujours pas admettre, alors que la résolution 1559 concernant le Liban demeure à l'état de voeu pieux. À l'image d'une figure chère aux experts en géopolitique, le Proche-Orient est un mille-feuilles qui est en train d'imploser. Et ce, parce qu'il déborde de religiosité fanatique.
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