L’incertitude régnait lundi en Espagne sur la tenue le lendemain d’une session parlementaire pour investir à la présidence de la Catalogne l’indépendantiste Carles Puigdemont, retranché en Belgique, après un arrêt interdisant une investiture à distance.
« Toutes les hypothèses sont ouvertes », indiquait-on de source parlementaire lundi, deux jours après la décision de la Cour constitutionnelle.
« Nous n’avons pas encore décidé pleinement ce que nous allons faire » déclarait pour sa part à la radio Jaume Alonso-Cuevillas, l’avocat en Espagne de M. Puigdemont, sans écarter qu’il se présente devant le parlement sans prévenir, au risque d’être arrêté.
La Cour s’est prononcée trois mois après la mise sous tutelle de la Catalogne par Madrid, le 27 octobre, après le vote au parlement catalan d’une déclaration unilatérale d’indépendance.
Le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy avait alors dissous le parlement, destitué le gouvernement de Carles Puigdemont, chef de file séparatiste parti dans la foulée à Bruxelles et désormais visé en Espagne par un mandat d’arrêt pour « rébellion » et « sédition ».
M. Rajoy avait aussi convoqué de nouvelles élections et promis de renoncer à la suspension d’autonomie après la mise en place d’un nouveau gouvernement catalan.
Lors de ce scrutin du 21 décembre, les indépendantistes ont cependant conservé leur majorité absolue au parlement catalan, avec 70 députés sur 135, même si la Catalogne reste divisée à part presque égale sur l’indépendance.
Les indépendantistes entendent réinstaller au pouvoir leur « président », pour récupérer leur « dignité » piétinée selon eux par le pouvoir central.
Recours en justice
Mais le gouvernement conservateur a saisi la Cour constitutionnelle contre la résolution parlementaire convoquant le débat censé déboucher sur l’investiture de Puigdemont pour mardi à partir de 15 h (9 h à Montréal).
« Un homme en fuite, un homme qui a prétendu liquider de manière unilatérale la souveraineté et l’unité nationale ne peut être président de rien », a déclaré lundi Mariano Rajoy à la radio Cope.
La cour a pris des décisions en urgence permettant de bloquer cette procédure : elle a interdit une investiture à distance, et précisé que s’il souhaitait être investi, M. Puigdemont devrait se présenter devant le juge de la Cour suprême responsable de l’enquête le concernant et lui demander l’autorisation de comparaître devant le parlement catalan.
La Cour laisse enfin 10 jours aux parties pour présenter leurs arguments, y compris à M. Puigdemont et au parlement catalan, un délai qui pourrait entraîner un ajournement de la séance parlementaire d’investiture.
Si ses ordres ne sont pas respectés, les membres du bureau chargé de l’ordre du jour du parlement et son président Roger Torrent, un séparatiste, encourent des responsabilités pénales.
En théorie, la loi électorale prévoit que la séance d’investiture doit commencer au plus tard 10 jours ouvrables après l’ouverture de la législature, soit mercredi 31 janvier.
Mais le cas de figure posé par le conflit juridique autour de la candidature de Carles Puigdemont est inédit.
Le report de la séance « est l’une des choses qui doivent être étudiées », a déclaré à l’AFP une source parlementaire.
Puigdemont « sacrifié » ?
M. Puigdemont, seul candidat officiellement proposé à ce stade par les indépendantistes, a aussi laissé planer la possibilité d’un retour.
Certains séparatistes ont néanmoins envisagé de le « sacrifier » pour mettre fin au blocage et à la mise sous tutelle de la Catalogne.
« Il y a une cause supérieure [...], qu’il y ait un gouvernement », a déclaré au quotidien La Vanguardia l’élu indépendantiste Joan Tarda, de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), la deuxième formation indépendantiste au parlement, envisageant le « sacrifice » de Puigdemont.
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