Jean Charest a réalisé hier le remaniement ministériel attendu. Un ministre sur deux obtient de nouvelles responsabilités, quoiqu'aucune nouvelle figure ne fasse son entrée au cabinet. L'exercice aura servi à consolider, plutôt qu'à renouveler. Bref, le changement sans changement.
Dans ce remaniement, les promotions sont ainsi allées aux hommes et aux femmes à la valeur éprouvée, ceux qui sont les plus susceptibles de sortir le gouvernement des ornières où il s'est enlisé. Ressortent notamment les nominations faites à la tête des quatre ministères qui, ces 12 derniers mois, ont constitué l'oeil de la tempête sur l'intégrité: Transports, Sécurité publique, Famille et Justice.
Aux Transports, Sam Hamad aura certainement davantage d'assurance que Julie Boulet n'en a jamais eue. Il a dirigé deux ministères d'importance depuis 2003, Ressources naturelles et Emploi et Sécurité sociale. Son expérience comme gestionnaire d'une grande firme d'ingénieurs, si elle peut en faire sourciller quelques-uns, devrait lui servir à affronter un milieu où les requins sont nombreux. Ce ministère a été montré du doigt par le Vérificateur général, et les attentes à son endroit seront élevées comme responsable de l'octroi de contrats plusieurs fois milliardaires pour les infrastructures routières.
À la Sécurité publique, le ministère de la police, Robert Dutil n'a certes pas la connaissance du milieu policier qu'avait Jacques Dupuis comme ancien procureur de la Couronne. Mais l'homme est posé et sûr de lui. Ces derniers mois, il a su par des réponses claires limiter les dommages causés par le ministre Tomassi sur la question du financement des partis politiques. Il lui reviendra de faire aboutir l'opération Marteau de l'escouade spéciale chargée d'enquêter sur l'industrie de la construction. L'incapacité de celle-ci d'atteindre de vrais résultats rend de plus en plus inepte le refus du gouvernement de déclencher une vaste enquête publique.
À la Justice, Jean-Marc Fournier, doté d'un bon sens politique, correspond mieux à la fonction que Kathleen Weil, qui sera plus à l'aise à l'Immigration. Le nouveau ministre, qui est un proche du premier ministre, devra toutefois garder ses distances. L'indépendance du ministre de la Justice, principe qui est au coeur de la réflexion que doit mener la commission Bastarache sur le processus de nomination des juges, ne doit pouvoir être mise en doute. Quant au ministère de la Famille, la jeune Yolande James ne pourra que faire cent fois mieux que Tony Tomassi, chassé du cabinet il y a trois mois pour absence totale de sens éthique.
Par ailleurs, le premier ministre a évité de toucher à son équipe économique dirigée par le ministre des Finances, Raymond Bachand. C'est ce qu'il fallait. Comme gardienne du trésor provincial, Michelle Courchesne aura pour mission de diriger les programmes de compressions de dépenses, un rôle nouveau qu'elle ne manquera pas d'aborder avec l'énergie qu'on lui connaît et qui aurait été mieux mise à profit à la Santé, si M. Charest avait eu la capacité de muter Yves Bolduc, le maillon faible du gouvernement.
Consolider veut dire continuer dans la même voie. Rien n'indique dans ce remaniement une quelconque volonté de changer de discours ou de corriger le cap. Le renouveau qu'attendent les Québécois de la part de Jean Charest ne se trouve pas dans ce jeu de chaises musicales. L'entrée de quelques-uns des jeunes loups qui patientent sur les banquettes arrière de l'Assemblée nationale aurait pu constituer un premier signal. Il y a là une erreur dont on prendra mieux la mesure à la veille des prochaines élections, lorsque plusieurs ministres partiront. La relève ne sera pas prête. Comprenons que, pour le premier ministre, il y avait plus urgent.
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