Des funérailles nationales?

Corruption libérale - le PLQ en perte de légitimité - cynisme politique croissant



Des journalistes ont émis le souhait que la mort de Monsieur Béchard fasse réfléchir ceux qui alimentent le cynisme ambiant. Mais pourquoi la population est-elle cynique? Dans la vie politique de Claude Béchard, il y a des chapitres qui éclairent sur le sujet.
D'abord, je doute fort qu'il incarnait un vent de fraîcheur en politique. Certes, il était jeune, batailleur et je l'ai trouvé courageux de se présenter au Conseil de la fédération cet été, mais il faut remettre les pendules à l'heure dans ce concert d'éloges.
En 2006, la STM s'apprête à publier un appel d'offres pour le remplacement des wagons du métro de Montréal. Le ministre Béchard souhaite ardemment que l'assemblage se fasse dans son comté à l'usine Bombardier de La Pocatière. Il se dit prêt à contourner les règles des lois du commerce international. Malgré les mises en garde, il annonce que le gouvernement fera affaire directement avec Bombardier. Au diable la concurrence! Un air connu des libéraux...
La compagnie Alstom conteste aussitôt cette décision. La cour lui donne raison. Bombardier et Alstom s'unissent alors pour former un consortium et décrochent le contrat. En janvier 2010, le gouvernement modifie le contrat en haussant sa commande à 786 wagons. L'arrivée d'un nouveau joueur espagnol, CAF, dont la proposition est jugée sérieuse, nécessite la publication d'un nouvel appel d'offres. 18 millions de dollars ont été dépensés uniquement dans la paperasse et le jeu politique.
Ce coup de poker électoraliste, qui visait la réélection de Béchard en 2007, aura retardé de plusieurs années la construction des wagons.
Le Parti québécois avait qualifié de «grossière incompétence» et de «fiasco aux conséquences graves» la gestion de ce dossier. Le ministre Béchard disait qu'il «acceptait avec plaisir» ces reproches. C'est ça le cynisme... Cette indifférence des politiciens face à leurs erreurs. On comprend pourquoi «le grand bâtisseur» Charest aimait tant Claude Béchard. Il incarnait le Parti libéral. Il en portait la marque.
On pourrait parler de certains dossiers controversés pilotés par M. Béchard : la privatisation du mont Orford, le port méthanier Rabaska. En tant que membre du cabinet, il était au fait de l'inquiétante filière du gaz de schiste. Une telle carrière ne méritait pas de funérailles nationales. Un tel honneur pour Maurice Richard, Camille Laurin, Gaston Miron, je peux comprendre, mais pour Claude Béchard?
Bref, on peut pleurer le père de famille, l'homme qui s'est tenu debout durant la maladie, le fougueux parlementaire, mais le bilan du député de Kamouraska-Témiscouata laisse songeur.
Pendant ce temps, les Montréalais attendent toujours leurs nouveaux wagons. Ils sont prévus pour 2013, à moins que...
Jacques Côté, écrivain


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