Les appuis au Parti québécois piquant du nez, la question est sur toutes les lèvres. Son ex-chef Pierre Karl Péladeau serait-il tenté par un retour en politique ? Sur les médias sociaux, ses sorties contre le gouvernement Couillard alimentent les rumeurs.
Cette semaine, mon collègue chroniqueur à La Presse, Yves Boisvert, s’inquiétait de la situation et affirmait ceci : « de nos jours, les cas de propriétaires de médias nationaux qui interviennent dans le débat politique [...] sont assez rares en Amérique du Nord. »
Allons-y donc pour quelques faits qui, sans parler « de nos jours », sont néanmoins de mémoire récente. Pour ou contre ses opinions, PKP fonctionne à visière levée. À l’opposé, feu Paul Desmarais père – fédéraliste irréductible et patron de l’empire Power Corp. incluant La Presse –, était peu visible. Pour tirer les ficelles des chefs politiques au Québec, au Canada et même en Europe, il préférait les coulisses feutrées du pouvoir.
Rouge ou bleu
Un exemple parmi d’autres : son amitié influente avec Nicolas Sarkozy. Une fois président de la France, il troqua la politique de non-ingérence et de non-indifférence envers le mouvement souverainiste pour un parti-pris ouvert pour le Canada. Cela s’appelle faire de la politique. Sarkozy s’est même empressé de décorer son ami de la Légion d’honneur en lui disant : « Si je suis aujourd’hui président, c’est grâce en partie aux conseils, à l’amitié et à la fidélité de Paul Desmarais. »
Pour M. Desmarais et sa famille, en matière de question nationale les éditoriaux de leurs journaux ont été et demeurent des outils de combat politique. C’est leur droit le plus strict, mais le fait est indéniable.
En 2008, dans une rare entrevue accordée par Desmarais père, le magazine français Le Point le présentait d’ailleurs en ces termes : « Desmarais n’est pas seulement un magnat des affaires. Il a la haute main sur la presse de la Belle Province. Et tous les premiers ministres du Québec (et du Canada) sont ses amis. Desmarais, homme d’influence... »
« Ce sera sa fin »
Parlant de la ligne éditoriale de La Presse, le patriarche Desmarais en disait aussi ceci : « Notre position est connue : nous sommes fédéralistes. [...] Si le Québec se sépare, ce sera sa fin ». Sa « fin » ? Comme déclaration politique, c’est clair.
Et que dire de cette menace, elle aussi très politique, qu’il susurre en 1988 à Jacques Parizeau, alors chef du PQ ? Dans un échange confirmé par les deux hommes en entrevue pour la biographie de M. Parizeau signée par Pierre Duchesne, Desmarais père dit ceci à M. Parizeau : « En tout cas, si tu te présentes aux prochaines élections, on va te battre mon cher ! » Et qui était ce « on » ?
La morale de cette histoire : si PKP était fédéraliste au lieu d’être souverainiste, qu’il avait levé le poing pour l’unifolié, dirigé le PLQ et qu’il s’exprimait maintenant contre le PQ et pour l’unité canadienne, les critiques contre ses interventions seraient possiblement plus nuancées.