DE RETOUR AU BLOC QUÉBÉCOIS

Duceppe appelle à l’unité

Au moins quatre anciens bloquistes songent à se présenter aux élections

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C’est en plein vol que l’albatros déploie sa puissance

C’est pour donner un « nouveau souffle » au Bloc québécois que Mario Beaulieu a cédé sa place à Gilles Duceppe pour qu’il reprenne les commandes du parti qu’il avait quitté après la défaite acerbe de 2011. Et à peine quelques heures après que ce pacte politique a été officialisé, déjà d’anciens bloquistes lorgnaient un retour au bercail. Quatre songent à se porter candidats, tandis que tous les autres consultés par Le Devoir mercredi prévoient de prêter main-forte. Une centaine de jeunes indépendantistes ont en outre salué ce changement de garde.

L’ex-leader parlementaire du Bloc Pierre Paquette ne s’est pas fait prier. Dès que Gilles Duceppe lui a annoncé son retour au Bloc québécois, la fin de semaine dernière, il lui a indiqué qu’il voulait lui aussi retrouver la formation souverainiste pour l’aider. M. Paquette « ne ferme pas la porte » à se porter candidat. Sinon, M. Paquette est prêt à endosser tout autre rôle que lui proposerait son ancien patron. « S’il a besoin de moi pour le contenu, pour l’organisation, que sais-je, je suis disponible », a-t-il dit au Devoir mardi.

Idem pour l’ex-élu Claude Bachand, qui n’était pas tenté par un nouveau mandat. Mais ce retour change la donne. Il veut d’abord parler à M. Duceppe, voir comment le leader voir les choses et s’il le voit, lui, dans son plan. « C’est sûr que ça me tente un peu », a-t-il confié.

La tentation semble être la même chez Jean-François Fortin, qui avait claqué la porte du Bloc après l’élection de Mario Beaulieu pour former son propre parti Forces et Démocratie. Saluant le retour de Gilles Duceppe — qu’il admire et qui l’a inspiré à se lancer en politique en 2011—, M. Fortin n’a rien exclu. « Il y aurait un contresens à fermer toute porte », a-t-il dit, car sa formation prône une collaboration avec tout autre parti qui souhaite défendre les régions, sans ligne de parti. M. Fortin a refusé de détailler davantage ses intentions, puisqu’il n’y a pas eu de main de tendue.

André Bellavance, qui était parti en même temps que M. Fortin, a pour sa part maintenu sa décision de ne pas briguer de nouveau mandat.

Mais l’ancien député Guy André avoue lui aussi lorgner une candidature. « Je ne suis pas catégorique. […] C’est sûr que quand je vois Gilles, ça me chicote un peu », a-t-il dit au Devoir.

Cet attrait de Gilles Duceppe, les bloquistes espèrent qu’il en séduira plusieurs, militants comme électeurs.

« Des bloquistes non pratiquants, il y en a beaucoup », a noté Marc Lemay. Avec M. Duceppe de nouveau en selle, ces derniers n’hésiteront plus à renouveler leur carte de membre ou à se porter candidat, espère-t-il.

Pascal-Pierre Paillé a renoncé à la politique active, mais le retour de M. Duceppe « c’est sûr que ça me donne le goût de revenir », dit-il. Pareil pour Jean Dorion et Nicole Demers, qui prévoient de redoubler d’efforts pour prêter main-forte.

« C’est sûr qu’avec Mario Beaulieu, on sentait qu’on avait un petit vent dans la face. Pis là, avec la venue de M. Duceppe, on a le vent dans le dos », a imagé Robert Bouchard.

Le retour au bercail de Gilles Duceppe a aussi été souligné par les jeunes bloquistes. Dans une lettre ouverte publiée en soirée mercredi, 101 jeunes indépendantistes dont le président du Forum Jeunesse du Bloc québécois, Louis-Philippe Sauvé, et le président du Comité national des jeunes du Parti québécois, Léo Bureau-Blouin, saluent en outre la décision de Mario Beaulieu, « un geste admirable pour la cause d’un peuple ».

Le changement de garde au Bloc s’est voulu en douceur, mercredi. « Ce n’est pas Duceppe à la place de Beaulieu. C’est Duceppe qui rejoint Beaulieu », a déclaré le nouveau chef aux côtés de celui qui lui a offert sa place près d’un an jour pour jour après avoir été élu à la tête du parti.

« Après un an d’efforts, malgré le travail acharné et le dévouement d’une petite équipe dynamique et créative, j’en suis arrivé à la conclusion que j’allais manquer de temps d’ici les élections », a expliqué M. Beaulieu. Il a appelé son successeur en renfort, car il se dit « convaincu qu’avec Gilles Duceppe comme chef, nous allons vers une nouvelle victoire du Bloc qui est cruciale pour tous les indépendantistes ».

Le bureau national a donné le feu vert à ce partenariat politique mardi soir. M. Beaulieu demeurera président. La décision sera entérinée en conseil général le 1er juillet. Une telle procédure n’est pas sans précédent : c’est le conseil général qui avait élu Michel Gauthier chef, après le départ de Lucien Bouchard pour Québec en 1996.

MM. Beaulieu et Duceppe ont en outre appelé tous les souverainistes, y compris les militants d’Option nationale et de Québec solidaire, à se rallier au Bloc en vue des élections d’octobre prochain.

Sur les réseaux sociaux, certains militants du Bloc ou d’ON ont critiqué la venue de M. Duceppe sans vote des membres. M. Beaulieu était réputé comme étant plus près d’ON. Pierre Paquette ne s’inquiète pas de cette réaction, estimant que ce sera « une minorité ».

Le chef d’ON a salué le courage de M. Beaulieu et accueilli l’appel au ralliement de M. Duceppe. « Les idées de M. Beaulieu sont celles qui nous ont fait appuyer le Bloc québécois depuis un an, nous sommes rassurés de voir que le changement de chef ne remettra pas en question l’orientation pour laquelle les membres du Bloc avaient voté il y a un an », a indiqué Sol Zanetti.

Le fédéral n’a pas peur

M. Duceppe a par ailleurs lancé sa première salve de critiques préélectorales. Le NPD de Thomas Mulcair, « c’est le Canada d’abord et le Canada tout le temps. […] On a essayé avec les libéraux de [Pierre Elliott] Trudeau, avec les conservateurs de Stephen Harper […]. À chaque fois on est déçus. Les intérêts du Québec ont pris le bord. Il est grand temps que le Québec retrouve une voix forte, et cette voix, c’est celle du Bloc québécois », a-t-il scandé.

Ses rivaux fédéraux ont tour à tour répliqué que, eux, offriraient une place au gouvernement aux Québécois. « Le Bloc québécois, ce n’est pas une question de chef de parti, c’est une question de pertinence d’être ici à Ottawa », a lancé le ministre conservateur des Affaires intergouvernementales, Denis Lebel.

Thomas Mulcair a argué que le NPD « veut ouvrir toutes grandes les portes ici à la Chambre des communes pour que le Québec rentre en force ». Une promesse reprise du côté libéral, Justin Trudeau notant que le Bloc est « une option que les Québécois ont mise de côté à la dernière élection ».


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