La notoriété, croit-on, est devenue un critère incontournable pour accéder rapidement à la politique. Or, cette réalité n’est pas nouvelle.
Lorsqu’à la fin des années cinquante René Lévesque a décidé de quitter Point de mire, son émission culte à la télévision de Radio-Canada, il est entré en politique avec tous les honneurs dus à sa réputation. Lévesque possédait des qualités journalistiques exceptionnelles. Son influence sur les Québécois, qui buvaient ses paroles sensées, modérées et modernes, lui a permis de devenir une des figures emblématiques de la Révolution tranquille.
Son expérience comme grand repor-ter à dimension internationale et son allergie à la vision « nationaleuse », conservatrice et paroissiale, dirons--nous, de Maurice Duplessis et de son Union nationale ont justifié amplement qu’il se joigne au PLQ, dont le slogan était « Il faut que ça change » lors de la campagne de 1960, et « Maîtres chez nous » lors d’une seconde élection en 1962.
On connaît la suite. René Lévesque a fondé le Parti québécois en 1968. Le reste appartient à l’Histoire et personne ne peut nier que la longue agonie du PQ est le résultat du second échec référendaire de 1995.
Sauveur
Depuis, devenu un parti douloureux auquel s’accrochent de vieux militants blessés, mais courageux, et des plus jeunes refusant l’inéluctable, protégés par leur naïveté et leur besoin de rêver l’avenir, le PQ cherche un sauveur extérieur.
À notre époque où des humoristes et comédiens en Ukraine, en Italie, au Venezuela – et on a envie d’écrire au Canada également – sont attirés par l’avant-scène absolue qu’est le pouvoir politique au plus haut niveau, Guy Nantel a choisi sa voie naturelle.
Le sondage Léger paru hier dans Le Journal n’étonnera que ceux qui ne comprennent pas le découragement des militants péquistes, qui accordent un appui de 38 % à leur nouvel espoir Guy Nantel. Celui-ci écrase Sylvain Gaudreault (16 % d’appui), l’ancien ministre à l’expérience politique classique et rassurante.
Rupture
Les jeunes cherchent à rompre avec les anciens, un réflexe vieux comme le monde. Après René Lévesque, et en passant par Jacques Parizeau, Lucien Bouchard et tous les autres chefs, on en arrive à Guy Nantel, le comique grinçant, intelligent certes, mais arrogant. On changera peut-être de planète politique avec lui.
Guy Nantel et son entourage ont vite révélé leur modus operandi. Cinglants avec les médias, contrôlant les Facebook et autres projectiles technologiques, ils annoncent leur manière de faire de la politique. Le nouveau candidat assure qu’il ne pratique pas la langue de bois. On le croit volontiers, mais la langue dans le vinaigre dont il use sur scène n’est peut-être pas recommandée pour pratiquer l’empathie et l’humilité dans ses contacts avec les citoyens.
La politique lorsqu’elle est une farce se dénature. Contrairement à ce qu’affirme Guy Nantel, la politique et l’humour n’ont pas le même objectif. Est-ce pour faire rire qu’il prône l’ajout d’un symbole anglais au drapeau du Québec, une reconnaissance officielle de l’anglais comme langue minoritaire du Québec et un affichage multiculturel? M’est avis que plusieurs vont rire jaune.