La décision du président américain Donald Trump d’imposer des restrictions de visa à six nouveaux pays pourrait perturber les flux d’immigration vers le Canada, si l’histoire se répète, car les ressortissants touchés pourraient y voir de nouvelles raisons de venir au Canada.
Dans le passé, la politique en matière d’immigration des États-Unis concernant Haïti et l’Iran a fait bondir les demandes d’asile et les demandes de visa étudiant pour le Canada. Cette fois, le président Trump cible le Nigeria, le Soudan et l’Érythrée, déjà parmi les plus grandes sources de demandes d’asile déposées par des personnes traversant irrégulièrement le Canada en provenance des États-Unis.
Plus tard ce mois-ci, les citoyens de ces pays et de trois autres pays seront largement exclus de la résidence permanente aux États-Unis, bien que certains puissent toujours se qualifier pour les visas de tourisme et d’affaires.
Une analyse antérieure interne du gouvernement sur les postes frontaliers a révélé que beaucoup de gens à la frontière détiennent des visas américains, les obtenant parfois expressément pour se rendre au Canada pour demander le statut de réfugié.
Maintenant, alors que la porte claque sur la résidence permanente aux États-Unis, plus de gens pourraient se tourner vers le Canada, a dit croire Robert Falconer, chercheur en immigration à l’école de politique de l’Université de Calgary.
« L’un des impacts potentiellement négatifs est que je pense que nous assisterons à un renversement du déclin des demandes (de réfugiés), en particulier du Nigeria », a-t-il soutenu.
« On pourrait voir des gens qui pensaient pouvoir obtenir une carte verte aux États-Unis déplacer leurs perspectives au Canada. »
Il ne s’agit pas seulement de demandeurs d’asile.
En 2017, M. Trump a fortement restreint l’immigration en provenance de plusieurs pays, dont l’Iran. L’année précédente, 2437 Iraniens ont présenté une demande de permis d’études au Canada. Au cours des 11 premiers mois de 2019, 13 277 personnes ont posé leur candidature.
Avec la classe moyenne en plein essor du Nigeria, il pourrait y avoir un impact positif du même ordre, a déclaré M. Falconer.
« Nous verrons probablement une augmentation du nombre de personnes hautement qualifiées déplacer leurs perspectives au Canada », a-t-il souligné.
Tout de même, le Nigeria est actuellement le premier pays en importance pour les gens se présentant à la frontière, représentant 14 621 des 50 635 demandes déposées de février 2017 à septembre 2019, les données les plus récentes disponibles.
Ceux qui traversent à l’écart des postes frontaliers officiels le font généralement en raison de l’accord sur les tiers pays sûrs, qui interdit aux gens de demander l’asile aux bureaux frontaliers terrestres.
Le gouvernement libéral a déclaré à maintes reprises que la modernisation de l’accord était une priorité, mais les notes d’information à l’intention du ministre fédéral de l’Immigration ont laissé entendre que peu de travail réel était en train d’être fait.
Cela n’est pas surprenant, selon Sharry Aiken, experte en droit de l’immigration et des réfugiés à l’Université Queen’s, en Ontario.
« Au cours d’une année électorale, Donald Trump accepterait-il que l’Accord sur les tiers pays sûrs soit modernisé afin que plus de réfugiés restent aux États-Unis, à un moment où il s’efforce de maintenir davantage de réfugiés hors des États-Unis ? », a suggéré Mme Aiken.
« C’est difficile à imaginer. »
Lorsqu’on lui a demandé quels impacts, le cas échéant, les nouvelles restrictions imposées par le président Trump pourraient avoir sur le Canada, une porte-parole du ministre de la Sécurité publique, Bill Blair, n’a pas répondu directement à la question.
« Bien qu’il y ait des flux et des reflux dans le nombre d’arrivées mensuelles de migrants en situation irrégulière, nous restons préparés à ces fluctuations », a déclaré Mary-Liz Power dans un courriel.