Madame Sondos Lamrhari,
Je ne vous connais pas. Mais j’apprends dans le Journal ce matin que vous rêvez de devenir policière (c’est formidable) tout en étant voilée (c’est confrontant).
Comme policière, votre devoir est de faire respecter la loi. Comment pourrez-vous me convaincre que la loi commune est plus importante pour vous que la loi de votre Dieu ?
Le parti au pouvoir veut nous faire croire que l’opposition veut vous empêcher de réaliser votre rêve. Moi je pense qu’il n’y a qu’une personne qui peut vous empêcher de réaliser votre rêve : c’est vous.
Si vous tenez plus à votre voile qu’à votre uniforme de policière, c’est vous qui vous excluez d’office de ce métier.
Qu’est-ce qui vous empêche de porter votre voile dans votre vie personnelle et de le ranger pendant votre vie professionnelle, comme le font tous les autres policiers avec leurs convictions privées ?
Vos futurs collègues ne se promènent pas avec un macaron à l’effigie du PQ, de la CAQ, de QS ou du PLQ. Ils ne portent pas de t-shirt avec le visage de Che Guevara ou de Donald Trump... ou de Mickey Mouse. Ils respectent le concept d’un uniforme neutre. Bon, ils aiment bien porter des pantalons de clown mais justement, ça nous choque, parce qu’on considère qu’ils ne respectent pas l’uniforme !
Dans le Journal de ce matin, vous faites une affirmation qui m’a fait sursauter : « Il y en a qui sont peut-être forcés de porter le voile, mais il y a aussi des jeunes qui sont forcés d’aller étudier en sciences de la nature par leurs parents. »
Avec tout le respect que je vous dois, cette comparaison est extrêmement boiteuse.
Une croyance religieuse n’a rien à voir avec une préférence d’orientation de carrière. Un parent qui force sa fille à porter un vêtement symbolique d’une idéologie ne commet pas le même geste qu’un parent qui dicte un choix de carrière à sa progéniture.
Dans aucun pays au monde les jeunes qui refusent d’aller en sciences de la nature ne sont envoyés en prison ou battus... alors que dans plusieurs coins du globe des femmes sont ostracisées si elles ne respectent pas la « modestie » du voile.
En terminant, savez-vous qu’en Algérie, pays dont la religion d’état est l’islam, les policières ne portent pas le voile. Et ici, au Québec, un état laïc, une policière porterait un signe religieux ostentatoire ?
Il y a sûrement là matière à réflexion, non ?
Je vous souhaite de réussir brillamment dans votre carrière et d'être une inspiration et un modèle pour d'autres. J'ai le plus grand respect pour la profession de policier, il n'y a rien de plus noble que de vouloir servir la société.
Mais si vous étiez également un modèle de respect des valeurs laïques du Québec et du consensus social sur les figures en position d'autorité, je vous en serais encore plus reconnaissante.
Respectueusement,
Sophie Durocher