Charest frustré par Ottawa et Sarkozy

Le président de la France ratera le point d'orgue du Sommet de la Francophonie à Québec

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XIIe Sommet de la Francophonie - Québec du 17 au 19 octobre 2008

Québec -- Ottawa s'apprête à reporter le bref Sommet Canada-Union européenne prévu pour le 17 octobre, au cours duquel les négociations sur le libre-échange entre les deux entités devraient être lancées, a appris Le Devoir. Ce sommet devait constituer le moment fort de l'automne européen de Jean Charest, qu'il évoque dans tous ses discours depuis un an. Autre accroc au scénario du premier ministre: Nicolas Sarkozy fera en partie faux-bond au premier ministre québécois, à l'occasion du Sommet de la Francophonie (17, 18, 19 octobre), a aussi appris Le Devoir. Le président français quittera en effet ses homologues avant la fin du Sommet, le samedi 18 octobre.
Le Sommet Canada-Union européenne devait se tenir le 17 octobre, jour d'arrivée de M. Sarkozy, lequel est aussi, jusqu'au 31 décembre, président de l'Union européenne. Mais en raison de la proximité des élections fédérales, qui se tiendront trois jours plus tôt, la tenue de ce sommet sera reportée à une date ultérieure, a confirmé hier au Devoir une source très au courant du dossier.
Puisque le gouvernement fédéral est en campagne électorale, il n'a tout simplement pas eu le temps de se préparer pour cette importante réunion, a-t-on expliqué. Par exemple, «le ministre qui porte le ballon à Ottawa», Michael Fortier, avait prévu au moins deux missions en Europe pour «préparer le terrain», mais elles ont été annulées en raison des élections. «On voit mal comment le gouvernement fédéral pourrait être prêt pour un tel sommet», a-t-on dit. Les élections ont lieu le 14 octobre. On ignore si, le lendemain, M. Harper et son ministre Fortier seront encore en poste. Dans «le meilleur scénario», ils le seront et pourraient «peut-être» se rendre à Paris avant le 31 décembre afin de discuter libre-échange Canada-UE avec M. Sarkozy.
De son côté, Jean Charest a fait du libre-échange Canada-Europe la pierre d'assise de son «nouvel espace économique» avec un projet d'entente France-Québec sur la reconnaissance mutuelle des acquis et des compétences. Il a effectué plusieurs missions en Europe afin de convaincre l'Union de s'engager dans une telle démarche, mais la Commission européenne a d'importantes réticences. Il a toujours dit compter sur la présidence européenne de Nicolas Sarkozy.
Hier, en marge de la réunion de son caucus à Victoriaville, M. Charest a martelé que le sommet du 17 octobre aurait lieu. Il a même soutenu, à propos du lancement des négociations entre l'UE et le Canada, que «le bébé se présente assez bien» tout en ajoutant «ce n'est pas encore fait». «Si on continue à persévérer jusqu'à la date de la rencontre, on a de très bonne chances de lancer les négociations qui seront globales», a-t-il dit. Quand Le Devoir a évoqué les rumeurs de report du Sommet auprès de son entourage, un de ses conseillers a répondu d'un ton sec «pour nous, le sommet a lieu», tout en ajoutant «bien sûr, ce n'est pas nous qui prenons la décision».
Au reste, à moins d'un mois de sa tenue, la confusion règne au sujet de cette rencontre. Où aurait-elle lieu? Montréal, Québec... Ottawa? Il fut impossible hier de le savoir. Plusieurs ont évoqué la métropole, alors que d'autres signalaient la complexité de véhiculer M. Sarkozy de l'aéroport au centre-ville, puis du centre-ville à l'aéroport, d'où il décollerait pour Québec, où il doit s'adresser à l'Assemblée nationale en après-midi avant d'assister, le soir, à l'ouverture du sommet francophone.
Il est par ailleurs toujours prévu que Nicolas Sarkozy et Jean Charest se rencontrent afin de signer une entente sur la mobilité de la main d'oeuvre entre le Québec et la France.
Les nombreuses critiques formulées à l'endroit du gouvernement Harper par Jean Charest et ses ministres ces derniers jours ont-ils miné l'appui que lui apportait jusque-là Ottawa? M. Charest refusait de le croire, hier: «Je m'attends qu'avec tout le travail qui a été fait, ce dossier-là avance. Je pense que les gens sont amplement capables de faire la part des choses», a-t-il répondu.
Francophonie
Par ailleurs, si l'agenda du président français n'est pas modifié prochainement, celui-ci doit quitter Québec le samedi 18 octobre et ratera donc une importante session du Sommet de la Francophonie. Le dimanche matin, les 55 chefs d'État et de gouvernements doivent examiner la place de la langue française dans le monde. Plusieurs rapports seront soumis afin d'évaluer la manière dont les pays membres assument leurs responsabilités à cet égard. Fait exceptionnel, le président sera aussi absent lors du rapport de synthèse qui rendra compte des travaux des chefs d'État. Il s'agit d'une première dans l'histoire des sommets puisque, traditionnellement, le président français est toujours présent avec les représentants du pays hôte lors de la conférence de presse finale.
L'Élysée a refusé de confirmer la nouvelle qui circule pourtant depuis déjà quelques semaines à Québec et à Paris dans les milieux concernés. Selon plusieurs sources, l'entourage de M. Sarkozy n'aurait guère laissé d'espoir que le président revienne sur sa décision. On invoque évidemment les «lourdes responsabilités» de ce dernier. La ministre des Relations internationales, Monique Gagnon-Tremblay, croisée hier à Victoriaville, au caucus des députés libéraux, a admis qu'il était «extrêmement difficile» de fixer un horaire pour ces trois journées puisque M. «Sarkozy est tellement pris». Celui-ci doit notamment participer à un sommet avec les pays asiatiques à Pékin, lequel ne commence toutefois que le 24 octobre.


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