Le dépôt du projet de loi sur la cybercriminalité a soulevé une tempête sur la Toile et nombre de journaux ont critiqué la portée excessive du projet et les dangers qu'il pose pour la vie privée des internautes. L'indignation était d'autant plus vive que le ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, a lancé le débat en disant que, dans ce dossier, on n'avait qu'un choix, être avec le gouvernement ou avec les adeptes de pornographie juvénile.
Margaret Wente a fait écho à plusieurs en répondant au ministre qu'«en matière de vie privée sur Internet, je suis du côté des amateurs de pornographie juvénile». Comme elle le dit, elle n'est pas la première à relever le fait que «le gouvernement Harper aime diaboliser ses adversaires ou qu'il a un penchant autoritaire». «Mais dans ce cas, prévient-elle, la dissidence est très répandue. Parmi ceux qui expriment des doutes, on compte l'opposition, les défenseurs des libertés civiles, les commissaires à la vie privée et les experts d'Internet, en plus de gens de tendance conservatrice qui se demandent pourquoi le gouvernement insiste pour créer sans raison une panique morale.» Le vrai titre du projet de loi devrait être, dit-elle, «le permis d'espionner» tant sont étendus les pouvoirs accordés aux policiers pour obtenir sans mandat de l'information sur l'identité des internautes. Et dire, note-t-elle, qu'il s'agit du même gouvernement qui a tenté d'effrayer les gens avec les supposées intrusions du registre des armes d'épaule et du recensement. Elle dit voir dans le projet de loi un reflet du penchant autoritaire du gouvernement, le même qui l'a amené à multiplier les sentences minimales. À la lumière des dernières opérations réussies contre des cyberpédophiles, elle estime que la police n'a pas besoin de ces pouvoirs. Par conséquent, entre les deux camps offerts par le ministre, elle choisit celui des adeptes de pornographie juvénile. Il faut des mécanismes civils de surveillance. «Ce n'est pas libéral, selon moi. Seulement prudent», conclut-elle.
Les commentateurs réputés pour leurs sympathies conservatrices, comme Lorne Gunter du National Post et Brian Lilley de SunMedia, ont dénoncé la possibilité qu'on puisse obtenir sans mandat les données personnelles des internautes. À l'opposé du spectre, le très libéral Toronto Star exige qu'un mandat soit nécessaire pour obtenir l'information personnelle des internautes. En fait, le tollé était général et les critiques, acerbes.
Selon Stephen Hume, du Vancouver Sun, «les conservateurs utilisent une rhétorique digne d'un État policier pour attaquer ceux qui s'opposent aux intrusions dans la vie privée». Il trouve tout aussi offensante la campagne sur la Toile qui étale les détails de la vie privée de Vic Toews. Mais voilà, «quand vous commencez à rogner la protection de la vie privée, c'est le genre de choses odieuses que vous provoquez, les affaires privées devenant publiques. Et quiconque pense que les autorités ne sont pas capables de laisser couler ce qu'elles trouvent vit sur une autre planète.»
Et ça continuait sur le même ton dans les pages des autres quotidiens. Une vraie tempête qui, ajoutée à toutes les autres voix qui se sont élevées, explique sûrement en partie l'ouverture inhabituelle du premier ministre à des amendements. À suivre.
Trudeau taillé en pièces
L'autre grosse controverse de la semaine a été celle déclenchée par les propos tenus par Justin Trudeau sur les ondes de Radio-Canada dimanche dernier. Il a dit qu'il pourrait envisager que le Québec devienne un pays s'il en venait à ne plus reconnaître le Canada dans le pays que construit Stephen Harper. Il s'est aussitôt attiré les foudres de la presse anglophone, à quelques exceptions près. Chantal Hébert, dans le Toronto Star, et Michael Den Tandt, de Postmedia News, ont été parmi les rares à rappeler à leurs lecteurs que Trudeau reflétait l'inquiétude de bien des Québécois à l'égard du gouvernement Harper et de l'impact potentiel de ses politiques.
Ne digérant visiblement pas qu'on tente de faire porter aux conservateurs les risques d'une montée du sentiment souverainiste, la presse conservatrice s'est montrée particulièrement sévère contre les «sympathies séparatistes» du jeune Trudeau. Pour le National Post, le député de Papineau-Saint-Michel a ainsi confirmé qu'il n'avait pas ce qu'il faut pour être un jour chef de son parti. Plus dur et cinglant, SunMedia titrait ainsi son éditorial: «PET Lite is a dim bulb». En bon québécois, on dirait: «La version allégée de Pierre Elliott Trudeau n'est pas une 100 watts». Licia Corbella, de Postmedia News, estime qu'avec ses propos Trudeau porte ombrage à l'héritage de son père et «menace le Canada», rien de moins. Selon elle, ce «poids léger» doit sortir de l'arène politique.
Davantage au fait de la situation québécoise, Tasha Kheiriddin, du National Post, invite Trudeau à réfléchir au fait qu'un Québec indépendant n'aurait pas les moyens de lui offrir les politiques et programmes auxquels il semble tenir. Elle n'a pas été particulièrement surprise des propos du député parce que, dit-elle, il a tendance à dire des bêtises et qu'elle a entendu le même genre de choses de la part d'autres Québécois.
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Affrontement et incompréhension
Trudeau taillé en pièces
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