Accueil mitigé pour Marois en Écosse

Le premier ministre écossais Alex Salmond ne veut pas compromettre ses relations avec le Canada

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Les Écossais n'ont jamais fait de cadeaux à personne

Édimbourg — Ce qui devait être le clou de la visite de Pauline Marois en Europe s’est soldé mardi par un accueil poli mais réservé en Écosse. Le premier ministre indépendantiste Alex Salmond, qui tiendra un référendum sur l’indépendance de l’Écosse à l’automne 2014, n’a pas souhaité s’afficher publiquement avec la première ministre québécoise. Alex Salmond, qui a pourtant déjà qualifié le Parti québécois de « parti frère », a refusé de s’adresser à la presse et maintenu l’attitude très discrète qu’il observe depuis qu’il est premier ministre à l’égard de régions sensibles comme la Catalogne espagnole, où se tiendra un référendum en 2014, et le Québec, où les indépendantistes ont perdu deux référendums.
Qualifiée de simple « rencontre de courtoisie » par le bureau d’Alex Salmond, la rencontre a tout de même duré 45 minutes. La première ministre, qui avait pris place dans les tribunes réservées aux visiteurs, a aussi été applaudie chaleureusement par le Parlement écossais réuni en session plénière. De son côté, Pauline Marois affirme que cette rencontre est « historique » puisque c’est la première entre premiers ministres de l’Écosse et du Québec. Ce premier contact permettra, dit-elle, d’« établir les bases d’une future entente avec l’Écosse et d’un partenariat qui sera durable ».
Pour l’instant, aucune entente de coopération n’a été signée, pas même un accord de principe, comme le ministre des Affaires intergouvernementales Alexandre Cloutier en avait laissé entrevoir la possibilité. Une simple déclaration commune affirme que l’Écosse et le Québec souhaitent explorer « différentes pistes de collaboration économique » et « encourager la multiplication des liens culturels ». Rien à voir avec les solides ententes de coopération que le Québec cultive depuis longtemps avec la Catalogne et la Bavière.
Lors de cette journée chargée, Pauline Marois a aussi rencontré la chef de l’opposition, la travailliste Johann Lamont, et la vice-présidente du Parlement, Elaine Smith. Toutes deux ont respecté la consigne du silence et affirmé qu’il s’agissait de simples « rencontres privées ». D’ailleurs, la venue de Pauline Marois à Édimbourg a été traitée sur un mode mineur dans la presse écossaise.

« La chose à faire »
Selon le politologue écossais Michael Keating, de l’Université d’Aberdeen, « Salmond a fait la chose à faire. Il ne veut surtout pas antagoniser les relations avec le gouvernement canadien ou se créer plus de problèmes » alors que les sondages situent le « oui » à 28 %, ou même à 23 %. Selon Keating, le premier ministre écossais est à la recherche d’une reconnaissance internationale qui pourra lui servir advenant la victoire du « oui » et que le Québec ne peut guère lui offrir. Actuellement, dit-il, les souverainistes écossais ont plus à perdre en s’associant au Québec que les souverainistes québécois en s’associant à l’Écosse. Alex Salmond a d’ailleurs adopté la même attitude à l’égard de la Catalogne.
La réserve d’Alex Salmond ne surprend pas non plus le sociologue David McCrone, de l’Université d’Édimbourg, qui a dîné lundi avec la première ministre québécoise. Selon lui, cette réserve affichée à l’extérieur manifeste « la crainte d’être impliqué dans les affaires intérieures d’un autre pays ». Il faudra « du temps pour savoir ce qui transpirera de ces rencontres », dit-il.
« Salmond a fait profil bas alors que ce n’est pas du tout son habitude », confirme la députée travailliste Patricia Ferguson, membre de l’opposition. « Peut-être ne veut-il pas être associé à un leader qui promeut le séparatisme comme lui, mais dont le projet n’est pas plus populaire que le sien dans les sondages. » Ferguson rappelle que des centaines de milliers d’Écossais ont de la famille au Canada et que le sort de ce pays leur tient donc à coeur.
Députée du Scottish National Party (SNP), le parti d’Alex Salmond, Linda Fabiani se félicite pourtant de la visite de Pauline Marois. La souveraineté est « évidemment […] un sujet d’intérêt [entre les deux premiers ministres], dit la représentante d’East Kilbride, mais ces choses concernent d’abord les gens de chaque pays. En ce qui me concerne, c’est aux Québécois de décider de leur futur et aux Écossais de décider du leur en Écosse ».
Des « dossiers » énigmatiques
En entrevue avec le quotidien de Glasgow The Herald, Pauline Marois a affirmé de manière énigmatique, et sans préciser de quoi il s’agissait exactement, qu’elle était disposée à transmettre à Alex Salmond « les dossiers du référendum de 1995 ». Plus tard, elle a précisé avoir dit que, « si jamais M. Salmond veut avoir les documents, ça me fera plaisir de les transmettre. […] Mais, il ne me les a pas demandés ». Selon son attachée de presse, la première ministre ne faisait allusion qu’à des informations publiques : sondages, documents officiels, études universitaires, etc.
Dans la matinée, Pauline Marois a aussi rencontré les responsables du Festival international d’Édimbourg, qui accueille depuis longtemps de nombreux artistes québécois, comme Robert Lepage.


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