Pendant que le sujet même de la montée du religieux dans le monde demeure inéxorablement ignoré par les gouvernements Harper et Charest, voici ce qui se passe en France:
«La mission parlementaire sur le voile intégral préconise son interdiction, par la loi, dans un premier temps dans les services publics, transports compris, dans un rapport adopté, mardi 26 janvier, dans une très grande tension, une majorité des membres présents exigeant une loi d'interdiction dans tout l'espace public, selon des participants.»
Extrait de :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/26/la-mission-sur-le-voile-integral-suggere-son-interdiction_1296766_3224.html#ens_id=1245449
Voir aussi: http://www.nytimes.com/2010/01/27/world/europe/27france.html?hp
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Comme quoi, le débat sur le port de la burqa par les femmes, même complexe et souvent émotif, peut se faire du moment où la volonté politique existe... Et ce même s'il divise autant la «gauche» qu'une partie de la «droite». De fait, en France, c'est un débat qui, sous diverses formes, dure depuis près de vingt ans.
Car débat démocratique il y a en France, et non consensus ou unanimité. Et législation, il y a eu dans le passé. Et nouveau geste, même partiel, il risque même d'y avoir..
Donc, interdiction recommandée de porter le voile intégral, ces cages en tissu pour femmes, dans les hôpitaux, les transports publics, les mairies, les écoles, les bureaux de poste, etc..
Loin du vide assourdissant que l'on entend ici chez nos gouvernants, voici ce que le président de l'Assemblée nationale en dit: «Ce voile intégral représente tout ce que la France rejette spontanément. C'est le symbole de l'asservissement des femmes et l'étendard de l'intégrisme extrémiste /sic/».
Ou, encore, ce que déclarait le président Sarkozy: «La laïcité n'est pas la négation ou le rejet du fait religieux. C'est la reconnaissance par l'État de l'égale dignité des religions dès lors qu'elles se conforment à nos lois.» Et le président de la République a beau s'être sauvé de ce débat aujourd'hui, ce qui a été dit a été dit. (Bref, si débat il y a, il serait imprudent aussi d'en ignorer les dessous politiques)
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De l'autre côté, il y a ceux et celles, incluant certaines féministes qui s'opposent à une telle interdiction, craignant qu'elle aurait pour effet d'«isoler» encore plus ces femmes et d'encourager la ghettoisation ou le «communautarisme» chez les musulmans, intégristes ou non (*).
Le problème avec cet argument étant que le voile intégral vise justement à isoler les femmes et à renforcer la ghettoïsation.
Sans compter qu'il est également un instrument de militance et de propagande politiques et religieuses véhiculant une idéologie qui s'inscrit contre l'Occident et ses principales valeurs.
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Des opposants à l'interdiction craignent aussi que cela soit perçu comme une attaque ou un stigmatisation de la religion musulmane.
Bien sûr, il est vrai que les groupes de droite et d'extrême droite «récupèrent» ce débat pour mieux afficher leurs propres préjugés. Mais cela est inévitable. C'est dans leur nature même.
Tout comme de tenter d'élargir la notion d'espace civique aux espaces de vie publique, comme les transports en commun, pourrait en effet envoyer un message de stigmatisation. Mais cela, ce sont les paramètres, la «mécanique». L'important est qu'il y ait débat et intention de légiférer éventuellement, mais avec sagesse.
Car le fait est que TOUT ne peut PAS être toléré au NOM de la religion, quel qu'elle soit. Et qu'elle soit intégriste ou non. Incluant ici la burqa - un outil évident d'intolérance, autant envers les femmes qu'envers le reste du monde dont ce voile intégral les isole.
C'est pourquoi, idéalement, tout débat portant sur le voile intégral devrait aussi s'inscrire à l'intérieur d'une démarche plus large, soit celle d'examiner les limites aux droits fondamentaux des hommes, femmes et enfants qu'imposent TOUS les intégrismes religieux.
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Quant à l'argument contre une interdiction, même partielle, voulant que «seulement» 2 000 femmes porteraient le voile intégral en France, il est proprement choquant.
Non seulement ce chiffre ne cesse de croître depuis quelques années - reflet de la montée de l'intégrisme religieux et de son pendant politique.
Serions-nous ainsi en train de dire que la lutte contre la répression, des femmes dans ce cas-ci, et contre la montée des intégrismes religieux - les deux étant de tous temps liés comme des siamois -, devrait alors se faire à la condition qu'elle touche, quoi, combien de personnes?
10 000? 20 000? 100 000? Pourquoi est-ce que 2 000 personnes ne mériteraient pas qu'un État dise haut et fort aux hommes et aux leaders qui enferment ces femmes dans des cages de tissu que cela est contraire aux valeurs de la société dont ils font eux-mêmes partie?
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Bref, comme je l'écrivais dans ma chronique du 13 mai dernier - «Au-delà du voile» -, la vraie question demeure:
«comment COMBATTRE ce phénomène de l'intrusion du religieux dans l'espace public et ses tentatives de limiter les droits sous prétexte de "croyances"? Comment combattre de manière démocratique ce qui est antidémocratique? Comment le faire sans nier la liberté de religion? (...) Comment prétendre combattre l'intégrisme à l'étranger sans le faire clairement en Occident? Comment protéger les filles et les femmes lorsque s'exerce sur elles le pouvoir d'une religion? Etc., etc., etc. Bien au-delà de la question du "voile", commençons par mieux diagnostiquer le problème. Et par le faire les yeux grand ouverts.»
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(*) Voir ceci: http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/26/le-communautarisme-assume-des-derouilleurs_1296831_3224.html#ens_id=1245449
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