Dans l’histoire du Venezuela et des pays d’Amérique du Sud, l’armée s’est parfois comportée en agent du changement lorsque les choses allaient mal et que les dirigeants n’étaient plus en mesure de servir leur peuple. Écrivain et journaliste La prochaine élection présidentielle, déplacée finalement au dimanche 20 mai 2018, devrait être une simple formalité pour Nicolás Maduro, après l’éviction de la MUD (Mesa de la Unidad Democrática) – la coalition de l’opposition, empêchée de se présenter. Et ce n’est pas la candidature, orchestrée par le clan Maduro, d’Henri Falcón, un ancien cháviste qui avait rejoint la MUD, qui va donner une légitimité à cette consultation… Une élection majeure transformée en plébiscite d’un président qui a mené ce pays, un des plus riches du continent, au chaos généralisé ! Dans ces conditions, de manière récurrente, la possibilité d’une intervention militaire sous l’égide américaine est régulièrement annoncée, à la moindre manœuvre militaire d’un des pays limitrophes du Venezuela, surtout si on y décèle des instructeurs américains… Ou à la suite de déclarations de certaines personnalités. Comme celles, par exemple, de Michael Richard Pompeo, le directeur de la CIA, lorsqu’il précisait, le 24 janvier 2018, à l’agence de presse de langue espagnole EFE, le rôle de la CIA au Venezuela : « La deuxième et la troisième batterie de sanctions venait de nos recommandations », en ajoutant que Donald Trump suivait attentivement ce dossier et qu’il voulait comprendre les liens qui existaient entre le gouvernement Maduro et les forces armées vénézuéliennes (FNAB). Des propos qui pourraient faire accroire à certains de l’ingérence de la CIA dans le désastre économique et social du Venezuela. Et d’évoquer la tentative de coup d’État contre Hugo Chávez en 2002, la reconnaissance quasi immédiate par les États-Unis du gouvernement de Pedro Carmona Estanga et l’implication des services secrets américains, sans preuve tangible pour autant, dans la préparation de ce putsch raté… Même s’il n’est pas question d’occulter le rôle joué par certaines agences américaines dans cette tentative. D’autant que Rex Tillerson, le secrétaire d’État américain, par ailleurs ancien président-directeur général d’Exxon Mobil (une importante société pétrolière et de gaz), se laissait à évoquer dans un discours, le 2 février dernier, une possible intervention de l’armée vénézuélienne afin d’évincer Maduro. Il ajoutait même que, dans l’histoire du Venezuela et des pays d’Amérique du Sud, l’armée s’est parfois comportée en agent du changement lorsque les choses allaient mal et que les dirigeants n’étaient plus en mesure de servir leur peuple. Des propos, certes, pour le moins étranges, voire inquiétants, mais dont l’objectif principal est d’accentuer la pression sur Caracas et sur les soutiens de Maduro, dont celui de l’armée. De là à déclencher une opération militaire, même sous l’égide d’alliés locaux ! Les conséquences géopolitiques pourraient être désastreuses, à même de provoquer une déflagration politique contagieuse, lorsqu’on sait que pas moins de cinq autres élections présidentielles (Brésil, Cuba, Colombie, Mexique et Paraguay) doivent se dérouler d’ici la fin de l’année dans cette région du monde.