Le public de la Manchester Art Gallery ne peut plus voir la toile Hylas et les nymphes. La direction du musée s'est livrée à une expérience de censure, avec comme concept de faire réagir les visiteurs sur la représentation de la femme dans l'art.
Peut-on juger l'art des siècles passés, selon une grille de lecture féministe de 2018 ? C'est le débat qu'a lancé le musée de Manchester le 26 janvier dernier en décrochant la toile Hylas et les nymphes, œuvre du peintre britannique John William Waterhouse exécutée en 1896 sous le règne de la reine Victoria.
«Ce musée représente le corps de la femme soit comme une forme décorative passive, soit comme une "femme fatale" [en français dans le texte]», déclare l'équipe de la Manchester Art Gallery pour expliquer sa démarche sur une feuille de papier posée en lieu et place du tableau, apparemment jugé porteur de préjugés sexistes.
«Questionnons les fantasmes [masculins] de l'ère victorienne !», proclame encore la Manchester Art Galery sur son site, invitant le public à réagir dans un dispositif présenté comme une performance participative. Le décrochage a par ailleurs été filmé dans le cadre de la-dite performance par l'artiste Sonia Boyce, présentée par le centre national d'art contemporain de Nice, la Villa Arson, comme «une femme/féministe artiste noire en Grande-Bretagne, [adoptant] une pratique postmoderne interrogeant les traits de la "blackness" à l’aune d’un transnationalisme artistique.»