Dans un article de Réseau international diffusé le 29 avril 2016, on parle de la mère (d’un jeune voyou) harcelée par des jeunes cons, on dit : … il n’y a rien de plus ignoble que de participer au lynchage d’une personne innocente…
Or, au Québec il y a eu lynchage d’une victime innocente dans ce qu’on appelle L’Affaire Michaud. Cette histoire montre jusqu’à quel point les parlementaires peuvent déraper. Voici de quoi il s’agit.
La victime
La victime, Yves Michaud, est une personnalité politique, ancien député et journaliste, ancien délégué général du Québec à Paris. Il est connu pour son érudition, sa capacité d’analyse, la qualité supérieure de ses interventions publiques et son franc parler.
Faisant la guerre aux banquiers et milliardaires, pour la défense des petits actionnaires, il s’est mérité le surnom de « Robin des Banques ».
Défendant avec ardeur la langue française et l’émancipation de son peuple il s’est fait de nombreux ennemis. C‘était l’homme à abattre.
Les lyncheurs
Il ne s’agissait pas d’une bande de voyous ou d’ignorants. Les lyncheurs étaient des gens instruits de bonne réputation, ils étaient députés de l’Assemblée nationale du Québec.
Est-ce moins ignoble lorsque ce sont des députés qui font un lynchage ? Que pensez-vous du fait que ces députés ont fait leur lynchage collectivement et à l’unanimité devant les caméras ?
Cela les députés de l’Assemblée nationale du Québec l’ont fait… sur un ouï-dire sans la moindre vérification des faits réels. Les députés ont eu ce comportement ignoble le 14 décembre 2000.
L’accusation des lyncheurs
Et pour abattre la victime on s’est attaqué à sa dignité, sa réputation, son honneur. Pour cela il a fallu mentir.
L’acte d’accusation :
Dans une motion adoptée sans préavis, l’Assemblée nationale a dénoncé « sans nuance, de façon claire et unanime, les propos inacceptables à l’égard des communautés ethniques et, en particulier, à l’égard de la communauté juive, tenus par Yves Michaud à l’occasion des audiences des états généraux sur la langue française à Montréal le 13 décembre 2000. »
La motion a été adoptée à l’unanimité par les 109 députés présents.
L’effet médiatique :
Les débats à l’Assemblée nationale sont enregistrés en audio-vidéo pour diffusion au besoin par les chaînes télé et radio. Avec des chaînes de télévision continue, les images des députés exerçant leur droit de vote a été vue à répétition pendant plusieurs jours, de sorte que l’ensemble de la population du Québec a prix connaissance du jugement unanime de l’Assemblée nationale contre le citoyen Yves Michaud. Cela sans que les citoyens aient reçu quelqu’autre information que les cogitations du moment des commentateurs radio, télé et médias écrits.
L’Assemblée nationale est largement considérée comme la plus haute institution représentative des citoyens du Québec. Que les députés divergent d’opinions c’est normal. Mais qu’ils soient unanimes à s’attaquer à un citoyen… Vraiment il devait avoir fait quelque chose de grave. Du moins ce fut l’opinion généralisée dans les masses.
Dans les lignes ouvertes à la radio, des animateurs et des milliers de personnes se sont mises à traiter Michaud de raciste et d’anti-sémite.
Une calomnie vicieuse :
L’accusation était mensongère la preuve a été faite en Cour. L’accusation mensongère a été portée sciemment par ceux qui l’ont élaborée. Les députés présents ont voté les yeux fermés, les oreilles bouchées et le cerveau en transe, sans savoir de quoi il s’agissait, en suivant la ligne de parti.
Ce qu’avait dit Michaud :
C’est sur invitation du gouvernement que Yves Michaud présentait un mémoire à une commission d’enquête gouvernementale.
Voici ce qu’il a dit : « Mes propres concitoyens devraient suivre l’exemple de ce que le chanoine Groulx disait à propos du peuple juif. Le chanoine Groulx disait et nous invitait, et je le cite, « à posséder, comme les juifs, leur âpre volonté de survivance, leur invincible esprit de solidarité, leur impérissable armature morale« . Et l’historien [ Groulx ] donnait alors l’exemple du peuple juif comme modèle à suivre pour que les Québécois affirment leur propre identité nationale et assument, et assument pleinement, l’héritage de leur histoire, ajoutant que l’anti-sémitisme était « une attitude anti-chrétienne et que les Chrétiens sont, en un sens spirituellement des Sémites ». ».
Y avait-il dans de telles paroles quoi que ce soit qui soit anti-sémite ou raciste ? Michaud faisait donc l’éloge du peuple juif pour le présenter en exemple à suivre.
Poursuites en Cour
La victime, Yves Michaud, a fait diverses tentatives juridiques pour obtenir réparation du dommage à sa réputation, pour obtenir de l’Assemblée nationale un acte qui constitue une réparation publique à sa réputation et son honneur.
Il importe peu, ici, d’énumérer la nature et la description de chaque tentative et les argumentaires juridiques. Ce qui importe est que le jugement de la Cour d’Appel dit, essentiellement, que le privilège parlementaire permet à l’Assemblée nationale de mener ses débats comme elle l’entend.
Dans la décision de la Cour d’Appel, le juge Baudoin se rallie au juge Dutil qui a rédigé le jugement mais il ajoute : le droit crée « un étrange paradoxe » (art. 64) et conclut par ce lumineux paragraphe (art.65) :
« Pour préserver la démocratie parlementaire, et donc la libre circulation des idées, le Droit à l’époque des Chartes et de la prédominance des droits individuels permet qu’un individu soit condamné pour ses idées (bonnes ou mauvaises, politiquement correctes ou non, la chose importe peu), et ce, sans appel et qu’il soit ensuite exécuté sur la place publique sans, d’une part, avoir eu la chance de se défendre et, d’autre part, sans même que les raisons de sa condamnation aient préalablement été clairement exposées devant ses juges, les parlementaires. Summum jus summa injuria auraient dit les juristes romains ! »
Tout en reconnaissant le droit de l’Assemblée nationale d’agir comme elle l’a fait, le juge Baudoin reconnaît donc que Yves Michaud a subi l’injure suprême (summa injuria).
Dernières tentatives de réparation
Dans toute cette affaire, même si la blessure morale et psychique subie par Yves Michaud est irréparable, la tache à la réputation de l’Assemblée nationale est flagrante et ne s’effacera pas facilement. Cette tache flagrante contribue au mépris que ressent la population sur le travail des députés. L’affaire Michaud n’est pas moins ignoble parce que les années passent.
Il ne reste que la pression de l’opinion publique pour obliger l’Assemblée nationale à faire réparation. Une pétition sera mise en ligne incessamment sur le site de l’Assemblée nationale afin que les citoyens expriment leur volonté que réparation soit faite.
Les députés y siégeant maintenant accéderont-ils à la volonté des pétitionnaires ? Ils peuvent très bien continuer à faire sourde oreille, même si la plupart de ceux-ci ne sont pas responsables de la bavure ignoble qui a eu lieu le 14 décembre 2000. Les députés actuels nettoieront-ils la tache grotesque à la réputation de l’Assemblée nationale ?
François Gauthier, président de Solidarité Yves Michaud