Sortir le Québec du pétrole – Un choix rationnel

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Il faut choisir la vision futuriste de l’économie





Certains prétendent que s’opposer à l’exploitation et au transport du pétrole sur le territoire québécois relève d’une vision passéiste de l’économie. C’est en réalité pourtant l’inverse : le pétrole est la base énergétique des économies du 19e et du 20e siècle. Il est temps d’entrer dans le 21e siècle.


Pourquoi présenter les opposants à l’exploitation du pétrole – et particulièrement à ses formes «sales» – comme des rêveurs? Outre le fait que cela soit profondément insultant et bloque toute discussion publique, cette vision des choses est parfaitement irrationnelle et se base sur nombre de perceptions erronées de la réalité.


Il y a d’abord le déni des impacts écologiques. La consommation de combustibles fossiles comme le pétrole produit des gaz à effets de serre qui menacent les écosystèmes. Inutile de répliquer aux climato-sceptiques qui sont les premiers de ces irrationnels, en ce qu’ils s’opposent à un consensus scientifique. Ces dérèglements climatiques produisent déjà des catastrophes naturelles qui sont rigoureusement documentées.


Un autre argument mis de l’avant en faveur de l’exploitation d’un hypothétique pétrole québécois est que même si nous désirerions nous défaire de notre dépendance au pétrole il vaudrait mieux, entre temps, exploiter un pétrole «local» plutôt que l’importer. Or, même si le sous-sol québécois contenait du pétrole, il serait très couteux à extraire et extrêmement polluant – à l’instar de celui des sables bitumineux de l’Alberta. L’argument est fallacieux au possible. Puisqu’il est évident que la transition à une économie sans pétrole devra se faire graduellement et que d’ici là nous continuerons à en consommer, pourquoi ne pas continuer à importer un pétrole moins polluant – celui de l’Algérie, notamment, qui est notre principal fournisseur – pour le temps où il en reste.


Car voilà un autre argument rationnel: quoi qu’on en dise, le pétrole étant une ressource non renouvelable, ses réserves s’épuiseront tôt au tard. La date précise est sujette à débat entre scientifiques, mais elle adviendra vraisemblablement assez tôt pour que la plupart d’entre nous en soyons témoins. Il ne s’agit donc pas là d’une vision politique ni idéologique, mais de faits rigoureusement documentés. Nous n’avons d’autre choix que de nous préparer à un monde sans pétrole.


D’autre part, notre consommation présente de pétrole génère non seulement des risques environnementaux importants, mais aussi des risques économiques. Depuis quelques années, la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et le Forum de Davos – trois institutions qui défendent les intérêts économiques établis – ont toutes identifié les changements climatiques induits par la consommation de combustibles fossiles comme l’un des plus grands risques économiques de la planète. Pas écologique: économique. Pas pour rien. Les compagnies d’assurance et de réassurance payent déjà la note des catastrophes écologiques causées par ces dérèglements.


Mais il y a aussi un versant positif à tout cela. Sortir de notre dépendance au pétrole est un impératif mais constitue aussi un ensemble d’opportunités économiques formidables. Imaginez: le Québec est devenu un chef de file mondial de l’exploitation de l’hydroélectricité. La nationalisation réalisée par Lévesque n’est qu’un élément fondateur. L’important est que nous avons collectivement fondé des centaines d’entreprises technologiques spécialisées en technologies électriques. Nous avons, de plus, développé des générations de spécialistes en génie et en technologies parmi les plus en demande dans le monde.


Pourquoi ne pas reprendre ce flambeau? Actuellement, ce sont les économies dites émergentes (qui en fait ne le sont plus), comme la Chine ou l’Inde qui investissent davantage dans les industries des énergies renouvelables et se désengagent du pétrole. La très puissante banque HSBC, à la suite de la Deutsch Bank, a soutenu la semaine dernière que les investisseurs institutionnels devaient arrêter de placer leurs fonds dans l’industrie pétrolière.


Quand la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International, le Forum de Davos et les grandes banque privées en appellent à nous sevrer de notre dépendance du pétrole que choisissons-nous? Ce sont là des invitations à des décisions rationnelles. Les gouvernements Harper et Couillard et la Fédération des Chambres de Commerce du Québec vivent dans une époque révolue. Ils s’opposent, au fond, au véritable développement économique, scientifique, technique et social du Québec. On accuse les promoteurs de la sortie du Québec du pétrole de vouloir revenir à une époque lointaine alors qu’ils n’ont même pas la vision de pays aussi diversifiés que la Chine, l’Allemagne ou le Danemark qui, eux, cherchent à assurer la prospérité et la vitalité économique de leurs nations.


 


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J’en profite pour vous inviter à lire un ouvrage collectif que j’ai eu l’honneur de diriger sur la question aux éditions Somme toute: «Sortir le Québec du pétrole», avec la collaboration de Dominic Champagne, Pierre-Étienne Lessard et Sylvie Van Brabant.


J'ai aussi parlé de ces questions et de ce livre à l'émission «RDI-Économie» vendredi dernier. On peut visionner cette entrevue ici.




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