Rue Mordecai Richler ? Tant qu’à y être, pourquoi pas rue Donald Gordon, qui en 1962 a dit qu’il ne pouvait trouver de Canadiens français assez compétents pour être vice président du Canadien national ? Pourquoi pas une rue Jan Wong, qui a lié la tuerie du Collège Dawson au mouvement indépendantiste québécois ? Après tout, ce sont deux autres Montréalais qui ont mérité une notoriété dans leur sphère d’activité respective, le premier en affaires, le second comme grand reporter, notamment en Chine.
Impensable, bien sûr. Mais pourquoi alors même songer à donner à une rue de Montréal le nom d’un autre dénigreur du Québec et du peuple québécois — peut-être même le pire de tous ?
« Il faut toujours compter sur la saloperie des gens », écrivait Lise Bissonnette dans un éditorial intitulé « Comme à Salisbury, » peu après que Richler a déclaré sur les ondes de la CBC que Le Devoir des années trente « était interchangeable avec Der Stürmer,» ce terrible torchon nazi voué à l’extermination des Juifs.
De saloperies, Mordecai Richler en a proférées plus d’une sans jamais s’excuser même si on lui prouvait que c’était archi faux : la chanson thème de la victoire du Parti Québécois Demain nous appartient de Stéphane Venne aurait été inspirée des Jeunesses hitlériennes ou [les Patriotes sous la direction de Louis-Joseph Papineau voulaient exterminer tous les Juifs et leur confisquer leurs biens.->32594] Sans parler du fait qu’il a comparé les femmes québécoises à des truies.
Que Mordecai Richler pense et dise ces choses au sujet du Québec était son droit le plus strict. Son problème, toutefois, c’était qu’il ne pouvait pas les lancer sur la place publique au Québec et ensuite les débattre librement pour la simple raison que, malgré toutes ses années passées au Québec, il ne parlait pas le français ! Il fallait donc qu’il les profère dans des contrées lointaines, profitant ainsi d’une crédulité provenant de l’ignorance. A beau mentir qui vient de loin, dit le proverbe. Il a ainsi sévi tantôt dans The Atlantic, tantôt dans The New Yorker tantôt dans The Wall Street Journal, où le droit de réplique est plutôt théorique
L’incapacité de Richler de parler français n’est pas une banalité. Elle dit beaucoup sur sa compréhension, ou incompréhension, du Québec. Rappelons que Richler a grandi à Montréal dans les années 1930 et 1940, s’exilant en Angleterre en 1952 où il est resté jusqu’en 1972. À son retour, le Québec avait changé ! Les « Canadiens français » de sa jeunesse, qu’il méprisait selon ses propres écrits, n’acceptaient plus d’être un peuple de concierges et de serveuses invisibles. Mais lui n’a jamais accepté ce changement.
De toutes les accusations, celle de l’antisémitisme du Québec fait sans doute le plus mal. Mais là, c’est le deux poids deux mesures de Richler qui saute aux yeux. Alors que les clubs exclusifs anglais de Montréal et de Toronto excluaient nommément les Juifs et que McGill fermait ses portes aux Juifs, qui, pour faire des études supérieures, devait s’inscrire aux universités de langue française ou s’exiler aux États-Unis, Richler ne voyait que les déclarations d’un Lionel Groulx à qui il attribue la paternité du mouvement indépendantiste.
On semble vouloir concéder à Mordecai Richler le titre de « grand écrivain. » Écrivain drôle, satirique, oui, grand écrivain, peut-être pas. Je suis de l’avis que sa notoriété, surtout au Canada, il la doit principalement à ses attaques contre le Québec et que le jury n’a pas encore rendu sa décision sur la grandeur de son œuvre.
Voici donc une proposition de rechange. Si on veut honorer un écrivain de langue anglaise, donnons à une rue de Montréal le nom de Hugh Maclennan, auteur notamment de Deux solitudes et de Le matin d’une longue nuit.
Rue Mordecai Richler ? Non merci !
Mais pourquoi alors même songer à donner à une rue de Montréal le nom d’un autre dénigreur du Québec et du peuple québécois — peut-être même le pire de tous ?
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4 commentaires
Jacques Bergeron Répondre
22 novembre 2010Merci beaucoup, M. Philpot, d'avoir écrit ce billet. Votre propos démontre que l'histoire a encore ses droits dans la société québécoise. Qu'il fait bon de se la faire rappeler comme vous l'avez si bien fait dans ce commentaire sur Mordecai Rhichler, cet ennemi du Québec, pays de langue française,nom que d'autres ennemis,surtout des fédéralistes, voudraient voir afficher sur le nom d'une rue de Montréal.Et si le maire de Côte-Saint-Luc décidait avec son conseil de faire sienne cette idée, ce dont je l'encourage au plus haut point, en donnant le nom de cet écrivain à une de ses rues. Là on pourrait associer le nom de Richler à ceux et celles qui ont voté à 100% contre l'émancipation politique du Québec lors du référendum de 1995, sans oublier celui de 1980.Les bien-pensant-e-s et les intellos du Plateau ,sans oublier celles et ceux de Québec, dont fait partie Mme David de «Q Solidaire», vont certainement accuser l'auteur de ces remerciements de «raciste», mot qui ne prend plus avec lui depuis longtemps.
Laurent Desbois Répondre
19 novembre 2010«The Street», texte de Mordecai Richler
Et on voudrait nommer une rue pour ce raciste????
http://www.youtube.com/watch?v=2i0JJnHy8XI&feature=youtu.be
Jean-François-le-Québécois Répondre
18 novembre 2010Mordechai Richler, si je me fie à ce que j'ai lu de son oeuvre, n'avait rien d'un écrivain de génie! S'il n'avait pas autant déblatéré sur notre compte, il aurait été simplement un écrivain parmi beaucoup d'autres, aux yeux du Canada anglais. Mais une fois bien connu au Rest of Canada, on lui a fait pas mal de publicité... pas nécessairement justifiée!
Sauf que quand tu t'appelles Mordechai Richler, tu bénéficies, d'emblée, de quelque chose dont ne bénéficie pas Jan Wong, par exemple (pour ne nommer que cette écrivassière-là)... C'est l'action, sans doute, d'un puissant lobby juif canadien-anglais, en sa faveur.
Je ne vois pas vraiment qui d'autre tiendrait mordicus à l'existence d'une rue Mordechai Richler, à Montréal. D'autant plus que l'individu en question, est un illustre inconnu, pour la jeune génération francophone d'aujourd'hui, qui ignore quel genre de grossièretés cet écrivain névrosé et mal engueulé, se permettait à l'égard de la nation québécoise.
Et concernant l'antisémitisme, Albert Einstein lui-même a déjà dit que parfois, le dit phénomène n'était qu'une réaction au comportement d'une certaine communauté juive trop sectaire. Si Richler vivait, je crois que nous pourrions lui dire de mettre ça dans sa pipe!
Archives de Vigile Répondre
18 novembre 2010N'étant pas Montréalaise, je n'ai jamais vu que de très loin les antagonismes interculturels ni trop compris sur quoi ils pouvaient s'articuler.
Dans ma Côte-Nord d'origine, le racisme que j'ai pu observer provenait du milieu anglophone, en l'occurrence des patrons d'entreprises qui se comportaient comme des blancs-colonisateurs en Afrique.
Exemple: dans les années '50, les portes de l'Hôtel Tadoussac étaient fermées aux «natives». Comprendre les Québécois!