La chef péquiste Pauline Marois s'est dite choquée d'apprendre que le rapport jetterait un blâme sur la majorité francophone. (La Presse Canadienne)
Samuel Auger - Les premières réactions au contenu possible du rapport de la Commission sur les accommodements raisonnables ont volé la vedette, lundi, aux patriotes dont c’était la fête annuelle. La chef péquiste Pauline Marois s’est dite choquée et très inquiète des fuites parues dans les journaux, alors qu’un chercheur en philosophie ayant pris connaissance du document conteste ces interprétations et lance un appel au calme.
Le quotidien montréalais The Gazette a révélé samedi les premiers extraits d’une version préliminaire du constat des commissaires Gérard Bouchard et Charles Taylor. Selon l’interprétation du journal anglophone, le rapport jetterait un blâme sur la majorité francophone, qui devrait mieux maîtriser l’anglais et connaître davantage la culture et la religion des immigrants.
Tout en souhaitant ne pas réagir à un rapport qu’elle n’a pas lu, la chef du Parti québécois Pauline Marois a laissé transparaître une vive inquiétude. «Ça me choque. Si le rapport va dans le sens de ce qu’on connaît, il mériterait d’être fortement critiqué.» La chef du deuxième groupe d’opposition craint que le résultat fasse chou blanc. «Nous avons mis combien d’effort et d’énergie à cette commission. Si c’est malheureusement tout ce qu’elle donne, c’est inquiétant.»
Le dévoilement du fruit de cette commission hautement médiatisée devait avoir lieu vendredi, mais sera devancé de 24 heures, selon La Presse Canadienne. «Ça devient un peu ridicule. Il faut demander à ce qu’il soit déposé immédiatement», avait insisté plus tôt en journée Pauline Marois, en marge d’une cérémonie visant à célébrer les patriotes de l’année. Elle s’interroge d’ailleurs sur les raisons de cette fuite. «Peut-être quelqu’un a-t-il voulu dévaluer le rapport avant qu’il ne soit publié?»
Sa requête de dépôt hâtif a obtenu l’appui de son collègue du Bloc québécois, Gilles Duceppe. «Il vaudrait peut-être mieux avancer la publication afin d’éviter les interprétations», a-t-il dit de manière prudente.
Les interprétations erronées ont déjà cours et le débat est en train de s’enliser dangereusement, souligne par ailleurs Daniel Weinstock, chercheur en philosophie politique à l’Université de Montréal et membre du comité consultatif de la commission. «À lire The Gazette, c’est comme si on blâmait les francophones dans leur ensemble. Je ne vois pas comment ils arrivent à cela, c’est beaucoup plus nuancé et pas du tout moralisateur, a dit au Soleil celui qui a consulté une version presque finale de la brique.
Tous les travaux de la Commission pourraient bien perdre de leur pertinence si les Québécois ont l’impression qu’ils se font montrer du doigt, estime ce chercheur qui refuse toutefois d’aborder le contenu même du rapport. «Le plus grand danger, c‘est que des positions se forment d’ici vendredi. Les gens ne se donneront pas le mal de le lire. Si on laisse traîner les choses, le débat va s’enliser. Il faut court-circuiter ce processus polarisant et envenimé. On est partis sur une voie très, très dommageable», prévient ce spécialiste des questions de diversité culturelle.
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