Quand la crise est au PLQ

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Les signes de division se multiplient au PLQ





Les péquistes étaient incrédules, à la fin de la semaine dernière. Alors qu’un énième psychodrame entourant la direction du parti se joue, comment les libéraux ont-ils trouvé le tour de remettre le projecteur sur leurs propres problèmes?


Ce n’est pas banal, ce qui s’est passé. Après un conseil général pénible, une grenade, amusement baptisée «Poëti papers» par un collègue éloquent, a explosé dans le campement du gouvernement. Même si Le Devoir rapporte que c’est moins par volontarisme que devant l’insistance du journaliste Louis Lacroix que Robert Poëti s’est confié, demeure que le PLQ contrôle habituellement son caucus de manière beaucoup plus serrée.


L’ex-ministre des Transports ne s’est pas limité à répondre à quelques questions. Il s’est offert une tournée médiatique où il semblait s’exprimer très librement, après avoir raconté une conversation privée entre le premier ministre et lui, celle où il a appris qu’il perdait son ministère.


Bris de confiance


C’est tout un bris de confiance. Poëti a beau ne pas être en guerre ouverte avec son chef, demeure que c’est cette partie du récit qui crée le doute sur les raisons de sa rétrogradation. Si l’on voulait faire de la place à des femmes, des jeunes et des gens des régions, pourquoi l’avoir remplacé par le député de Verdun, Jacques Daoust, 68 ans?


Philippe Couillard est coincé. Il ne peut punir Robert Poëti, au risque d’en faire un martyr. Ceci étant, les collègues ont dû prendre bonne note : on peut rapporter une conversation confidentielle avec le premier ministre sans en subir de conséquences.


À l’exécutif, on risque de réagir en restreignant davantage, si cela est encore possible, l’accès au premier ministre. Ce serait une erreur, mais, autrement, comment éviter que sa réaction à cette sortie soit interprétée comme un bar ouvert?


Députés mécontents


La semaine dernière, le parlementaire Guy Ouellet, un autre ex-policier mécontent d’être sur les banquettes arrière, affichait une parole libérée. En commission parlementaire devant la sous-ministre des Transports, André Drolet et le récemment dégommé Jean-Denis Girard ressemblaient davantage à des membres de l’opposition qu’à des députés ministériels.


On supputait que l’accession au conseil des ministres de quelques anciens caquistes au détriment de libéraux de vieille souche viendrait à causer des problèmes. La frustration est désormais évidente.


Philippe Couillard adopterait désormais une attitude plus chaleureuse à l’endroit de ses députés. À la demande des députés, des rencontres sont désormais tenues pour faire de la prospective et discuter de la situation politique en prenant un plan plus large. L’entourage du chef, notamment parce qu’il est occupé à gérer le chaos quotidien du Conseil exécutif, se fait parfois moins présent lors de ses rencontres.


Ça peut aider à délier certaines langues. C’est toujours malaisant, demander au chef de virer son directeur de cabinet quand celui-ci est là pour prendre des notes...


Chef isolé


Peu apprécié des députés, le directeur de cabinet Jean-Louis Dufresne est un ami de longue date de Philippe Couillard. Avec le Dr. Juan Roberto Iglesias, secrétaire-général du gouvernement décrit comme un technocrate froid et peu versé dans la politique, ils isolent le premier ministre. Ils croyaient lui rendre service en ne l’informant pas de la lettre de Robert Poëti à son successeur Jacques Daoust. Ils l’ont plutôt fait mal paraître.


Quelles que soient les circonstances ou les motivations ayant mené à garder Philippe Couillard dans l’ignorance, il n’est jamais normal que les actions d’un conseiller politique occupent la moitié d’une période de questions. On s’attend à ce que le PM agisse pour mettre fin à cette distraction, mais comment se départir d’un ami?


Les observateurs font les gorges chaudes devant les malheurs de l’ancien ministre de la Santé ayant voulu devenir businessman auprès d’Arthur Porter. Après avoir échoué à un test de leadership lors de la démission de Sam Hamad, un autre proche, on commence à avoir le sentiment d’être gouverné par un homme qui gère encore plus mal ses amitiés que Jean Charest.


Sortir de la crise


Vraiment, il n’est pas commun de voir le PLQ se mettre lui-même dans le pétrin ainsi. Au micro de Denis Gravel, récemment, j’expliquais qu’au Parti Québécois, se trouver en période de crise n’était même plus une situation si inconfortable que ça. Qu’avec le temps, on y avait développé une forme de résilience pour les traverser et la maturité de se rabibocher une fois les troubles passés.


Le Parti libéral de Philippe Couillard n’a pas cette singulière expertise. À preuve, l’enthousiasme avec lequel on s’est empressé de payer un prix politique pas tout à fait justifié pour la vente de RONA; la manière dont on s’est créé des soucis après l’arrestation de Nathalie Normandeau en se distanciant de Jean Charest pour ensuite s’en rapprocher; l’obstination avec laquelle on a laissé durer l’affaire Hamad; après le manque de réactivité des derniers jours, d’autres mauvaises nouvelles seraient à venir.


Bref, le PLQ est en crise et personne autour de Philippe Couillard ne semble trop savoir comment l’en sortir.


Il reste trois semaines à la session parlementaire et l’opposition sourit. On aura suffisamment de matériel pour faire souffrir le gouvernement sans avoir à fouiller beaucoup, puisqu’il le fournit lui-même.


Le Parti Québécois n’en revient pas encore de cette amusante inversion des rôles.



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Claude Villeneuve137 articles

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L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des discours de la première ministre Pauline Marois de 2008 à 2014.





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