NUMÉRIQUE

La Bell fibre du mépris

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Une bonne raison de boycotter cette compagnie canadian

Si 280 000 résidences au Québec n’ont pas encore accès à internet haute vitesse en 2021, ce n’est que parce que ça ne serait pas lucratif de l’apporter jusque dans leur masure isolée. 


Ça paraît évident au point d’être l’explication commune à ce problème vécu non seulement par de nombreux citoyens des régions éloignées, mais également par des résidents de villages situés à moins d’une heure de Montréal ou de Québec. On ne peut certainement pas écarter cette hypothèse de la rentabilité lorsqu’on essaie de comprendre pourquoi tant de gens seraient encore maintenus en plein XXe siècle numérique, au beau milieu d’une pandémie.


Au nez des résidents


Si c’était bien cette raison qui expliquait la fracture numérique, comment expliquer alors que le chalet de Mirko Bibic, PDG de Bell, soit branché à internet par le service Fibe, tout comme les chalets de quelques dizaines de voisins fortunés, alors qu’ils se trouvent autour d’un plan d’eau isolé ? Comment expliquer que pour rejoindre les luxueuses résidences secondaires du lac Peminchangan, on ait passé la fibre optique de bord en bord du village de Lac-Sainte-Marie, au nez de ses 1000 résidents, sans même en profiter pour connecter leur maison ou même leur hôtel de ville ? 


Précisons par ailleurs que l’installation a été subventionnée aux deux tiers par Ottawa et par Québec, sans toutefois que ça soit conditionnel à ce que l’on connecte les 600 foyers de Lac-Sainte-Marie. Les programmes gouvernementaux, s’ils sont efficaces, ne semblent pas très exigeants, c’est le moins qu’on puisse dire. 


Rendu là, à moins de conclure que Bell n’aime pas faire de l’argent, on devra donc chercher ailleurs que dans l’absence de rentabilité sa motivation à ne pas brancher des citoyens qui habitent à côté de ses lignes de fibre optique.


Peut-être que son nullissime service à la clientèle – réputé comme l’un des pires au Canada – n’est pas en mesure de couvrir, en plus de ce qu’il ne sait déjà pas gérer, quelques milliers de clients supplémentaires sur un territoire dispersé ?


La volonté de faire


Il ne faut pas attribuer à la malveillance ce que l’incompétence suffit généralement à expliquer, dit-on. Dans le cas de Bell, c’est tentant de croire que c’est un mélange des deux. 


On vit dans un système capitaliste. Si Bell n’est pas intéressée à desservir les Québécois des régions, ceux que son PDG voit du haut de son auto quand il s’en va à son chalet, c’est son droit. Ce sera toutefois la moindre des choses qu’elle permette à Vidéotron, Cogeco et aux OBNL qui ne méprisent pas le monde de le faire elles-mêmes.


En 1962, on a nationalisé l’électricité pour finir d’électrifier les campagnes, ce que Québec solidaire propose aujourd’hui de faire avec la fibre optique. On devra peut-être en venir là, mais avant d’y arriver, peut-on au moins laisser travailler ceux qui ont déjà une volonté de faire ?


À la fin, si Bell avait fait partie de la solution pour finir de brancher le Québec, ça se serait su. Dans l’immédiat, c’est une condition vitale à notre bien-être collectif qu’elle s’enlève du chemin et qu’elle cesse de freiner notre développement.


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Claude Villeneuve137 articles

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L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des discours de la première ministre Pauline Marois de 2008 à 2014.





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