Les accommodements raisonnables

Priorité et refus d’amalgame

Tribune libre - 2007

Il faut rappeler en réaction articulée à [cet article de Kamal El Batal->9402] que
la société québécoise minoritaire en Amérique du Nord ne peut que
manifester une sensibilité défensive envers toute situation qui
symboliquement ou réellement est susceptible de la menacer.
Les
accommodements selon certains faits référés depuis 11 mois ont su réactiver
ces réactions, mais en considérant toutefois la contribution précise de
certains médias et de M. Dumont dans cette affaire. Ce qui signifie donc : il
est exact que certains médias en ont profité pour exacerber le problème, je
pense ici à LCN-Québécor et au journaliste semi populiste Denis Lévesque
qui souvent, presque à chaque soir, a fait des accommodements une poudrière
opportune pour augmenter l’audience de la chaîne. Je pense aussi à Chorus
qui, comme toute radio commerciale (que ce soit à Montréal, Toronto ou New
York !), trouve ses profits qu’en mettant de l’huile sur le feu autour d’un
événement ou d’un phénomène.
Ce qui fait qu’un réseau radiophonique de ce type avide de scandales
préfabriqués cherchant toujours absolument la bête noire n’est certes
qu’une référence bien relative qui, malheureusement, n’en n’existe pas moins
mais sans représenter tout de même l’ensemble de l’opinion. Les Gilles
Proulx et Jacques Fabi qui sont parmi les voix les plus criardes ou
énervées de ces ondes malsaines ne seront jamais que des émetteurs
d’émotions primaires en quête de bouc émissaires. Cela est et sera toujours
minable. Monsieur El Batal, la femme stupide qui a insulté votre fils l’a
fait en tant que seule personne, et probablement que sa sottise est le
résultat de la sous-information à la Québécor ou encore de la non
information à la Chorus.
C’est pourquoi, Monsieur, il ne faut pas confondre en quelque sorte tout
le Québec avec des médias qui bien ou mal identifiés n’en valent peu ou pas
du tout la peine.
Ceci dit, il y a un malaise réel autour de la question du multiculturalisme
concernant l’avenir de la laïcité, le refus de voir surgir à Montréal des
milieux communautaires opaques, séparés entre les trois religions
monothéistes et de rester passif devant le retour de l’anglicisation de la
métropole québécoise. Je suis de ceux, par contre, qui, conscients de l’apport
positif francophone des haïtiens d’origine et des nouveaux arrivants
d’Afrique du Nord n’ont jamais été les premiers à monter sur les barricades au
sujet des accommodements raisonnables, et je sais que je ne suis pas le seul
à être surtout préoccupé par la question linguistique bien davantage que
par la question du port du voile chez les femmes de confession musulmane.
Québécois dits de "de souche" ou préférablement de culture franco-nord
américaine, nous savons en bonne partie qu’une population d’immigration n’est pas
à caractère unique. Dans le cas de l’Algérie, nous connaissons ici comme
ailleurs la tragédie qui a endeuillé toute cette nation et qui a forcé à
l’exil bon nombre d’individus fatigués de la guerre civile et de la tension
intégriste. Libanais, Algériens, Marocains et Tunisiens d’origine sont
incapables d’être fondamentalement, selon un folklorique amalgame,
terroristes ou intégristes. Qu’une minorité ou une proportion variable des
nouveaux arrivants en transition de québécisation soient fortement
pratiquants et que des arrangements doivent se négocier, c’est dans la
question, ce qui est en cause, tout en étant conscient que le plus important
du côté de l’immigration, qu’elle soit d’Afrique ou d’Europe, c’est de
s’assurer de son caractère francophone.
Pas par le ton mais par le fond de votre article, monsieur El Batal, je
suis d’accord avec vous pour considérer que la démographie est un problème
plus important que celui des accommodements, sans nier celui-ci.
Les Québécois ne sont pas des américains imprégnés d’impérialisme mais
nous ne sommes pas en général ni supérieurs ni inférieurs à la somme des
nations au sens large sur le plan éthique.
Ainsi, après l’ensemble de ce
que j’ai exprimé il ne faut pas oublier non plus que l’espèce humaine ici
au Québec, comme partout dans le monde, n’a jamais su trouver ce qu’on peut
appeler la paix dans le respect de la différence. Ce qui signifie que nous
somme tous NOUS HUMAINS plus ou moins intolérants, xénophobes, hostiles à
la différence d’autrui, conscients également pour certains d’entre nous que
les sociétés libérales (pas si démocratiques) sont surtout ouvertes pour le
marché mondial et très peu pour le raffermissement des liens sociaux
délabrés par un hyper individualisme qui aura engendré de lui-même un
multiculturalisme plutôt isolationniste.
Jean Pierre Bouchard
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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