Les échos qui me parviennent du congrès de Québec solidaire me rassurent sur mon orientation politique. En fait, on me dit de droite, mais je préfère me définir comme conservatrice, petit « c ». Rien à voir avec le Parti conservateur.
Il importe de faire la différence.
Le conservatisme, écrit le philosophe conservateur Sir Roger Scruton, mon maître à penser, ne peut être réduit à un parti politique ou à une idéologie. C’est une attitude.
En plein règne de Margaret Thatcher, dont il admirait le courage et la lucidité, Scruton exhortait néanmoins le gouvernement à se préoccuper davantage de questions morales et culturelles, pas seulement d’économie.
Ainsi, quand je défends l’aide de l’État à la culture, je ne suis pas devenue socialiste. Je pratique ce qu’il appelle la « philosophie de l’attachement ».
Erreur américaine
Le conservatisme a été déformé par la droite américaine antigouvernement, proéconomie de marché, obsédée par les droits individuels, mais contre l’avortement. Cherchez l’erreur.
Les républicains ne sont pas des conservateurs, ce sont des opportunistes qui vont même jusqu’à utiliser Dieu pour défendre la candidature d’un allégué pédophile au Sénat.
Mais qu’est donc ce conservatisme mal compris au Québec ?
Dans conservatisme, il y a le mot conserver. Au premier chef, conserver les institutions. Scruton donne l’exemple de la liberté d’expression qui n’existe pas dans un vacuum, mais parce que des institutions fortes l’encouragent et la protègent de la tyrannie. Défendre la liberté d’expression sans défendre les institutions qui parfois la limitent, pour le bien commun, est un non-sens.
De plus, les institutions protègent la famille, pilier de l’humanité, d’un progressisme débridé. Du moins en théorie. Chose certaine, le conservatisme se méfie des réformes à tout vent : mieux vaut y penser à deux fois avant de jeter par-dessus bord ce qui fonctionne. Comme la nature.
Ce qui explique que les conservateurs traditionnels sont aussi des environnementalistes convaincus.
Non à la révolution
Est-ce réactionnaire de privilégier le changement dans la continuité ? De croire que la nature humaine existe ? De penser que l’homme préfère appartenir à un ordre social, à une nation ? Scruton écrit : « Le désir de vivre et le désir de voir la nation vivre forment un tout. »
Le conservatisme se méfie du multiculturalisme et des droits inventés, comme le port du niqab, qui ne bénéficient pas à l’ensemble de la société. La lutte au racisme, oui.
Le conservatisme se fait le champion de l’appartenance alors que le néolibéralisme défend l’individualisme.
Les conservateurs ne sont pas constamment à la recherche de « projets de société », la société étant leur projet.
Les utopistes rejettent l’ordre établi, mais sans jamais définir clairement leurs objectifs. Au fond, ils savent que les chimères de l’égalité absolue et de l’éradication de toute forme de pauvreté ne pourraient se réaliser que par un État autoritaire. Alors, ils se taisent.
Contrairement aux croisés de la gauche, les conservateurs affichent un sain scepticisme.
Toujours Scruton : « La continuité est une démarche sélective : il faut regarder derrière et devant avec autant de méfiance. »
Maintenant, vous savez de quel bois je me chauffe.