Quelque chose semble avoir échappé à la nouvelle présidente de la CAQ, Maud Cohen, qui a annoncé samedi que le prochain congrès du parti, qui se tiendra dans les premiers mois de 2014, se penchera sur la charte de la laïcité.
Depuis des semaines, François Legault répète qu’il a hâte d’en finir avec un débat qui le marginalise et dans lequel il est venu près de s’empêtrer, lui aussi, quand la question du tchador est venue sur le tapis. Si l’économie doit être l’enjeu central de la prochaine campagne, pourquoi diable reparler de la charte au congrès, qui risque justement de coïncider avec le déclenchement des élections ?
Jamais les militants caquistes n’ont eu l’occasion de discuter de laïcité dans l’une ou l’autre instance du parti. S’il y a un problème avec la position actuelle, et de nombreux délégués au conseil général semblaient partager l’avis de Jean Allaire à ce sujet, ne serait-il pas mieux de le régler dès maintenant ?
Même en d’autres circonstances, la CAQ aurait déjà beaucoup mal à convaincre la population du sérieux de sa promesse de diminuer le fardeau fiscal des familles de 1000 $ en cinq ans par l’abolition de la taxe santé et de la taxe scolaire. Ni les libéraux en 2003 ni le PQ l’an dernier n’ont tenu celles qu’ils avaient faites dans l’opposition. Pourquoi en irait-il autrement avec la CAQ ?
Cette fois-ci, elle ne sera pas en mesure de refaire le coup de l’été 2012, quand la soudaine apparition de Jacques Duchesneau, au moment où la lutte contre la corruption était devenue une véritable obsession nationale, lui avait donné un élan inespéré. M. Duchesneau ne sera plus là et les candidats vedettes ne se bousculeront pas pour défendre les couleurs caquistes.
D’ici aux élections, on va tout faire pour mettre en valeur le député de Lévis, Christian Dubé, sur qui reposera largement la crédibilité des propositions financières de la CAQ. Certes, M. Dubé est un homme de qualité, mais il reconnaît lui-même être « plate des fois » et il n’a pas le potentiel médiatique de M. Duchesneau. La CAQ est cependant à la croisée des chemins et son existence même pourrait dépendre d’une opération qui ressemble fort à une mission impossible.
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Entre la défunte ADQ et la CAQ, « la fusion des coeurs et des esprits n’a pas été faite » , constatait Jean Allaire dans une récente entrevue à La Presse. Le conseil général en a été une belle illustration. Si les anciens adéquistes en mènent large au sein de l’aile parlementaire, l’esprit de l’ADQ semblait remarquablement absent chez les délégués.
Une des propositions phares de l’ADQ avait été l’introduction de « bons de garde », que les parents pourraient utiliser à leur guise, que ce soit pour confier leur enfant à une garderie non subventionnée ou encore le garder à la maison. En fin de semaine, on a plutôt résolu de permettre aux garderies non subventionnées de rejoindre le réseau à 7 $.
Dans les cinq propositions concernant la santé, le mot « privé » n’apparaissait nulle part et il n’a pas été prononcé une seule fois lors des discussions. Dans le panel, la députée de Groulx, Hélène Daneault, elle-même médecin, a plutôt insisté sur la nécessité d’une réorganisation des soins à l’intérieur du système public, précisément afin d’éviter une « médecine à deux vitesses ».
Lors des négociations qui ont mené à la fusion entre la CAQ et l’ADQ, on avait convenu de la mise sur pied d’un projet-pilote de médecine mixte, mais on n’en a plus jamais entendu parler depuis. Cela pourrait cependant changer. Les anciens adéquistes ont insisté pour que le député de La Peltrie, Éric Caire, grand partisan du privé, se joigne à Mme Daneault pour élaborer la plate-forme caquiste en matière de santé.
À l’ADQ, peu importe le sujet discuté, il se trouvait invariablement quelqu’un pour s’en prendre aux syndicats ou dénoncer l’interventionnisme de l’État. On n’a rien entendu de tel en fin de semaine dernière. Personne ne voulait abolir la formule Rand ou privatiser Hydro-Québec. Par moment, on se serait presque cru à une réunion de Québec solidaire.
François Legault ne propose peut-être plus d’augmenter les impôts pour financer les soins de santé, mais il n’est pas devenu un homme de droite pour autant. La dimension idéologique du PQ déplaisait à ce pragmatique et il ne voulait pas plus du credo de l’ADQ. La dégringolade de la CAQ dans les sondages risque toutefois de renforcer les anciens adéquistes dans la conviction qu’elle fait fausse route. Comme si l’ADQ n’avait pas amplement démontré ses limites.
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