Je me réjouis que la Cour d’appel ait trouvé, à une majorité de deux contre un, que le jugement de première instance refusant la suspension de la loi est conforme au droit. C’est un soulagement pour les partisans de la loi 21.
Je note que ce jugement confirme que ma plainte est fondée. La juge en chef Duval-Hesler devait donner une conférence cette semaine devant l’organisation de juristes Lord Reading qui s’est jointe à la contestation de la loi 21. Elle a rendu une décision dissidente qui aurait suspendu une partie de la loi, celle qui interdit les signes religieux pour les enseignants.
On remarquera que, lors de l’audience du 26 novembre, la juge Dominique Bélanger semblait pencher, par ses remarques, du côté d’une suspension de la loi. Elle a finalement tranché en faveur de son maintien. Je crois que ma plainte et le mouvement qu’elle a déclenché ont forcé la Cour d’appel à plus de rigueur dans la décision rendue. S’il n’y avait pas eu l’affaire Duval-Hesler, le résultat aurait sans doute été différent.
Il reste une inquiétude. Deux des juges, Bélanger et Duval-Hesler, trouvent que la loi 21 est discriminatoire, la preuve étant que l’Assemblée nationale a invoqué la clause dérogatoire lors de son adoption.
On doit s’élever en faux contre cet argument. Aucun droit n’est absolu. Ainsi on ne peut crier au feu dans un cinéma bondé quand il n’y a pas d’incendie et invoquer ensuite sa liberté d’expression pour se justifier. Il y a toujours une limite et la question est de savoir quelle est la limite et qui en décide, les juges ou les élus.
C’est ce qui arrive dans le cas de la loi 21. Les parlementaires, qui détiennent la légitimité démocratique, ont eux-mêmes tracé une limite à la liberté de religion et, avec la clause dérogatoire, ils entendent être ceux qui prennent cette décision, comme la constitution les y autorise. Il n’y a pas de discrimination ici. Les juges fédéraux pensent qu’ils sont les seuls à savoir quelle est la limite aux droits individuels. Ils se trompent.