Les libéraux n’ont rien compris

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Le cynisme démocratique nourri par le PLQ

Le chef intérimaire libéral Pierre Arcand a commis une erreur de fait commode dans son premier discours officiel.


La récente élection, a-t-il affirmé, a enregistré «son plus faible taux de participation depuis 1927». Cela l’a amené à conclure sur un ton grave à un problème très vaste : «Il y a, semble-t-il, un fossé entre les politiciens et la population [...] un cynisme envers la classe politique.»


L’ennui est que la prémisse est fausse ! En 2018, le taux de participation a été de 66,45 %. Près de 10 % de plus que celui de 2008, qui fut de 57,43 %.


2008


Il y a longtemps qu’on est cynique au Québec. Entre autres à cause du Parti libéral.


L’élection de 2008 justement, c’était celle des «deux mains sur le volant» de Jean Charest, des cachotteries libérales sur les pertes de la Caisse de dépôt, du «tablettage» du rapport Bouchard-Taylor. L’apogée aussi du PLQ, «machine à ramasser de l’argent»... et son retour arrogant au statut de majoritaire après le traumatisme de 2007.


En soutenant que le problème des libéraux de 2018 est au fond celui de la classe politique en général, M. Arcand fait dans le déni.


Les braises de l’inquiétude


Il a certes osé ceci : «Les Québécois ont boudé notre formation politique. Il va falloir [nous] questionner, identifier les causes ayant mené à ce résultat.»


Mais le reste du discours de M. Arcand et la conférence de presse qui a suivi contredisaient précisément cette volonté de comprendre.


D’abord, il a repris la vieille rengaine couillardienne – épouvantail de substitution en l’absence de celui de la souveraineté – selon laquelle la majorité québécoise s’apprêterait à maltraiter ses minorités anglophones et allophones.


Et à ce moment, M. Arcand l’a fait en anglais ! «Pour ceux qui sont inquiets des résultats de cette élection, ayez l’assurance que nous serons là pour veiller à ce que le gouvernement respecte vos droits. Le Québec doit rester une société libre et ouverte.» (Notre traduction)


Sérieusement, y a-t-il vraiment des signes que le Québec s’apprêterait à devenir une société fermée et intolérante?


Le chef du PLQ préfère souffler cyniquement sur les braises des inquiétudes des minorités afin de s’assurer de leur soutien. C’est le vieux truc : comme lorsque Carlos Leitao s’est fait prendre à dire que le nationalisme de la CAQ était «ethnique» ; comme lorsque Mohammed Barhone, candidat libéral dans Taillon, a affirmé que la CAQ préparait un «nettoyage de l’immigration»! Diviser ainsi la population n’a rien de bien glorieux.


Autre rengaine que M. Arcand a reprise : les libéraux auraient sauvé le Québec de la dèche. Avant 2014, l’économie allait mal. Le Québec était endetté, faisait des déficits. Depuis Couillard et Leitao, tout va bien! «Et merci à Carlos!»


Noircir excessivement le passé, taire les nombreux effets de la décennie Charest (2003 à 2012 !) sur les finances publiques, mépriser les inquiétudes de la majorité francophone : voilà qui explique en grande partie la défaite historique du PLQ et pourquoi il s’est mué en The Liberal Party of Montreal. Les libéraux n’ont pas l’air de s’en rendre compte.