L'affirmation du premier ministre François Legault selon laquelle le Québec risque de se transformer en Louisiane si la province ne contrôle pas davantage l'immigration traduit davantage un comportement préélectoral que la réalité, ont déclaré deux experts de l'histoire de la Louisiane que la situation du français au Québec ne peut pas vraiment être comparée à celle de la Louisiane, qui avait une base plus petite de locuteurs natifs et où le français était interdit comme langue d'enseignement.
Louis-Georges Harvey, professeur émérite d'histoire à l'Université Bishop's de Sherbrooke, au Québec, a déclaré qu'il était «très exagéré» de comparer une province où plus de 90 % des gens parlent français à un État où seulement 2 % l'utilisent. M.Harvey s’est dit conscient que le français perd du terrain à Montréal et il comprend le désir du gouvernement québécois de renégocier avec Ottawa pour sélectionner davantage d'immigrants. Mais invoquer la Louisiane est un gros raccourci, a-t-il dit, et plus un enjeu électoral qu'autre chose.
De son côté, Clint Bruce, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en études acadiennes et transnationales à l'Université Sainte-Anne, en Nouvelle-Écosse, estime qu'il n'y a rien de mal à ce que le Québec s'intéresse à ce qui s'est passé ailleurs, à condition que cela soit fait avec nuance et non en exploitant une sorte de peur populiste. Dans le cas de la Louisiane, il est clair, selon lui, que le nombre de personnes parlant français est en chute libre. De 500 000 à un million de francophones il y a 50 ans, ils sont aujourd'hui entre 100 000 et 200 000 tout en précisant que cela s'est produit après des années où le français a été supprimé et considéré comme une langue étrangère, soit le contraire de ce que fait le Québec.
En termes clairs, si François Legault voulait mettre l’accent sur l’urgence de mettre en place des mesures pour protéger le français en comparant la situation du Québec à celle de la Louisiane, il s’est carrément mis les pieds dans les plats. En bref, nonobstant l’importance du transfert par le gouvernement fédéral de pouvoirs supplémentaires en matière d'immigration, un refus de la part d’Ottawa ne menacerait en rien la «survie de la nation québécoise».
Henri Marineau, Quebec
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