Le paradoxe linguistique

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L'effondrement national du Québec à la vue de tous

Le fameux « Bonjour-Hi! » n’est qu’un symptôme parmi tant d’autres d’une réalité navrante. Véritable cœur de l’identité québécoise, le français recule à chaque recensement. Or, au-delà des manchettes passagères, qui s’en émeut vraiment ?


Malgré l’inaction crasse de nos gouvernements depuis vingt ans, quelques individus ont néanmoins tenté de sonner l’alerte. Dès 1995-1996, je l’ai fait moi-même en codirigeant le premier bilan détaillé de l’état du français au Québec depuis l’adoption de la loi 101 en 1977.


Silence radio


Tous les reculs que l’on constate aujourd’hui y étaient déjà annoncés, mais le nouveau premier ministre, Lucien Bouchard, n’en avait cure. Depuis, à de rares exceptions près, c’est silence radio.


Parmi ceux qui ont longuement documenté la situation du français avec rigueur et courage, on trouve aussi le mathématicien Charles Castonguay. Un esprit scientifique brillant.


Lors de son passage en politique, l’ex-député péquiste Pierre Curzi a également beaucoup donné. Sa droiture intellectuelle sur un sujet aussi complexe commande le respect. Puis vint Éric Bouchard, un jeune chercheur aguerri et minutieux.


Qui le fera ?


Aux côtés de Pierre Curzi, M. Bouchard a produit de précieuses études détaillées sur l’état inquiétant du français au Québec. Il vient d’ailleurs tout juste de quitter la direction du Mouvement Québec français. Un grand merci lui est dû pour son travail acharné. Idem pour Mario Beaulieu du Bloc québécois.


Dans le seul État francophone d’Amérique, le paradoxe désespérant est le suivant : jamais la fragilité du français n’aura été aussi bien documentée sur le plan scientifique, mais jamais l’indifférence politique et citoyenne face à ce même recul n’aura été aussi grande.


Éric Bouchard a raison. C’est d’une fondation bien nantie pour la défense du français dont nous aurions urgemment besoin. Question de continuer à documenter la réalité dans l’espoir qu’un jour, un gouvernement allume enfin avant qu’il ne soit trop tard. Mais qui le fera ?