La République islamique d'Iran accueille pour deux jours une conférence qui vise à "déterminer la vérité" sur l'Holocauste des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale. Alors que Téhéran rejette les accusations d'antisémitisme, la presse internationale ne sait pas s'il faut prendre le négationnisme iranien au sérieux.
"Nous ne nions ni ne reconnaissons l'Holocauste", titre le quotidien iranien Aftab-e Yazd, en référence aux propos du ministre des Affaires étrangères Manoucher Mottaki, qui a inauguré la conférence de deux jours intitulée Visions globales sur l'Holocauste, lundi 11 décembre. "Si l'Holocauste est remis en question officiellement, alors l'existence du régime sioniste sera aussi remise en question", a ajouté le ministre des Affaires étrangères iranien.
"C'est pour cela que les propos de Mahmoud Ahmadinejad ont provoqué de si vives réactions à travers le monde et c'est pour cela que la question qu'il a soulevée a été largement ignorée", a ajouté Mottaki, connu pour son manque de diplomatie. Soixante-sept invités, des "chercheurs" venus de trente pays assistent à cette conférence, dont plusieurs rabbins fondamentalistes opposés à Israël, rapporte le journal iranien. Le quotidien réformateur s'inquiète néanmoins des réactions hostiles du monde à l'égard de cette conférence. Aftab-e Yazd rappelle que, l'année dernière, la tenue d'une autre conférence, intitulée Le Monde sans le sionisme, avait déjà déclenché une polémique mondiale.
"Quelle forme prendra le souvenir de l'Holocauste une fois qu'il n'y aura plus de survivants ?" s'interroge The Jerusalem Post. "Cette semaine, grâce au président iranien, nous avons une idée de ce que l'avenir nous réserve : des conférences quasi académiques organisées par des dirigeants politiques rêvant de génocide, et où des pseudo-érudits débattent de sujets comme 'Holocauste et carnage des Palestiniens', 'Les chambres à gaz, mythe ou réalité'. Mahmoud Ahmadinejad a sans doute la conviction que les Etats-Unis n'attaqueront pas l'Iran si Téhéran peut riposter en attaquant Israël. Tout comme beaucoup d'antisémites peuvent aujourd'hui s'en sortir en disant qu'ils sont antisionistes, la conférence de Téhéran met en évidence la possibilité que le négationnisme de l'Holocauste devienne une pensée académique, certes controversée, mais en tout cas acceptée." Le ministre des Affaires étrangères iranien a ainsi affirmé que "l'antisémitisme n'existe qu'en Occident et aucunement dans le monde musulman où les Juifs atteignent des postes haut placés".
"Le génocide des Juifs pendant la dictature nazie est et restera un crime singulier, incomparable, et que l'on ne peut pas relativiser", écrit le quotidien allemand Die Welt. "L'Holocauste est un fait historique, qui a, aujourd'hui encore, des effets traumatisants – et pas seulement pour les Juifs. Le nier en utilisant le prétexte de la liberté de la recherche constitue une insulte vis-à-vis de millions de victimes et de leurs descendants. Mais pour le président iranien et la clique qui est au pouvoir à Téhéran, l'enjeu n'est ni la recherche ni la connaissance, mais uniquement de provoquer une nouvelle fois la communauté internationale et Israël en particulier", affirme le journal de Berlin.
"Depuis que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a qualifié l'Holocauste de 'mythe', l'Iran s'est attiré les foudres de la communauté internationale", note le site de la BBC en persan. "Le président Ahmadinejad veut présenter la République islamique sous un jour plus menaçant qu'elle ne l'est. Le négationnisme de Ahmadinejad lui permet à la fois de se présenter comme le leader de la défense de la cause des Palestiniens face à Israël et de faire pression sur la communauté internationale dans des dossiers comme le nucléaire iranien."
The Washington Post estime pourtant que la menace iranienne est réelle. "Malheureusement, la République islamique d'Iran est sérieuse, ou du moins le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, est terriblement sérieux : le négationnisme est sa passion personnelle, pas seulement une façon de provoquer Israël, et cela est basé sur son interprétation personnelle de l'Histoire."
"Le négationnisme est depuis longtemps un moyen de remettre en cause la légitimité d'Israël, qui a été créé en réponse à l'Holocauste. Si les Iraniens chiites se cherchent des amis, particulièrement chez les Arabes sunnites, nier l'Holocauste n'est pas une mauvaise façon d'en trouver", explique le quotidien américain. "Ce type particulier de révisionnisme n'est pas une blague, et il ne doit pas être traité comme tel. Il semble que la quasi-annihilation des Juifs d'Europe, dans un temps très court, par une nation européenne développée utilisant la meilleure technologie possible, demande une réexplication constante. C'est pour cela que les archives, les photographies et les récits seront toujours utiles, bien longtemps après que soit décédé le dernier survivant."
Hamdam Mostafavi
Conférence sur l'Holocauste
Le négationnisme iranien, une provocation ou une menace ?
Par Hamdam Mostafavi
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