Le plus fascinant, dans le nouveau sursaut d'instabilité financière qui ébranle la planète, c'est la bêtise humaine, le spectacle désolant de spécialistes, d'analystes, de financiers grassement rémunérés, de politiciens qui se comportent comme de parfaits imbéciles.
Ce qui est étonnant, c'est l'étonnement des marchés, qui s'est transformé en panique, devant une séquence d'événements largement prévisibles. Et ce qui est terrifiant, c'est que cette panique puisse mener les acteurs financiers à faire des gestes irrationnels qui pourraient transformer une situation difficile en véritable crise.
En 2009, quand les économies industrialisées ont réussi à maîtriser les pires manifestations de la crise financière et à sortir de la récession, nous nous demandions tous si l'on retiendrait les leçons de cette crise et si l'on prendrait les moyens pour qu'une pareille chose ne se reproduise plus. On a maintenant la réponse. C'est non.
Il était très clair que la crise financière et la récession avaient des causes profondes auxquelles il fallait s'attaquer: la situation budgétaire fragile de plusieurs gouvernements, le fait que certains secteurs du monde financier échappaient à tout contrôle, les effets multiplicateurs de la mondialisation, les ravages du crédit et des bulles, la culture de fuite en avant des marchés, un manque inquiétant de dynamisme de la principale économie, l'américaine.
On savait tout ça. Plusieurs gouvernements, dont celui du Canada, ont retenu la leçon et fait preuve de rigueur. Les entreprises ont nettoyé leur bilan. Bien des consommateurs ont découvert la prudence. Il y a eu des efforts, trop timides, pour encadrer le système financier mondial. Mais il reste énormément à faire.
L'économie américaine a beaucoup plus de mal que l'on croyait à retrouver son rythme. Certains pays, et surtout la Grèce, sont dans une impasse financière. Les États-Unis sont paralysés par une crise politico-idéologique qui rend plus difficile leur redressement budgétaire. Tout cela saute aux yeux depuis un bon bout de temps. Et les marchés le découvrent, soudainement, avec stupeur.
Cela met en relief le fait que le monde financier, malade avant la crise dont il était largement responsable, est encore tout aussi malade. Les marchés, après le choc de la crise, ont fait comme si rien ne s'était passé, comme si c'était «business as usual». Assez pour que les indices boursiers reprennent tout le terrain perdu depuis l'automne fatidique de 2008, même si dans la vraie vie, les choses n'étaient pas revenues à la normale.
Ajoutons à cela le fait que le monde financier ne s'est pas débarrassé de ses moutons noirs, que la spéculation, notamment sur les économies aux finances fragiles, a fait des ravages, que les agences de crédit, après leur complaisance coupable, se comportent maintenant comme des justiciers du Far West.
On ne doit pas minimiser les difficultés que traverse l'économie mondiale. Mais on doit aussi noter que l'économie américaine se sort, quoique lentement, de son marasme, qu'il n'y a aucune espèce de risque que le gouvernement américain soit incapable de payer sa dette, que les pays en crise financière vont s'en sortir si on ne leur met pas les bâtons dans les roues, que des composantes majeures de l'économie mondiale se portent bien.
La principale menace qui pèse sur l'économie mondiale à l'heure actuelle, ce n'est pas la crise budgétaire grecque, ni les difficultés de croissance de la zone euro, ni la paralysie budgétaire à Washington, ce sont plutôt les dérapages du monde financier, la chute irrationnelle des cours boursiers qui compromet la croissance d'entreprises en bonne santé et qui mine la confiance des citoyens, l'instabilité du cours des devises et des denrées, les attaques spéculatives qui compromettent les efforts de redressement des pays endettés.
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