AVERTISSEMENT:
Ce billet peut contribuer au syndrome de stress du contribuable québécois… Un syndrome de plus en plus répandu.
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Je reviendrai plus tard sur le dernier épisode en date de l’«affaire» Bolduc : la possible poursuite en diffamation du député péquiste Jean-François Lisée contre la ministre libérale Christine St-Pierre, en cas de non rétractation de sa part en regard de ses allégations sur des dépenses personnelles qu’elle dit avoir été non assumées par M. Lisée du temps où il était ministre.
Pour le moment, j’attirerai votre attention sur un article paru dans le quotidien Le Devoir (1) à l’effet que:
«La rémunération moyenne brute des médecins de famille a atteint 264 673 $, contre plus de 384 129 $ pour leurs confrères spécialistes, selon les plus récentes données disponibles. Aucun domaine de la médecine ne se trouve plus sous la barre des 200 000 $ par an.»
Les données citées par la journaliste sont tirées de l’étude toute récente des crédits du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).
Elle nous y apprend plein d’éléments des plus pertinents en cette ère d’austérité annoncée… Citons-en quelques uns:
«Les sommes versées aux médecins ont dépassé les prévisions de Québec. Il en a coûté 28,2 millions de plus que prévu pour les omnipraticiens, et 99,7 millions de plus pour les spécialistes en 2013-2014.»
«Entre 2008-2009 et 2012-2013, la rémunération moyenne brute des omnipraticiens a crû de 28 %, contre 22 % pour les spécialistes.»
«Comme il y a aussi eu croissance du nombre de médecins, l’enveloppe budgétaire totale consacrée à leur rémunération a crû davantage, soit de 52 % entre 2008-2009 et 2013-2014. Elle atteint 6,2 milliards.»
Et maintenant, pour le chiffre du jour, peut-être même de l’année :
«Par rapport à l’année 2006-2007, l’enveloppe consacrée aux médecins aura crû de 91 % en 9 ans, au 31 mars 2015. L’objectif était, entre autres, de combler l’écart qui existait entre les médecins du Québec et du reste du Canada.»
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Sans nier l’importance évidente des professions médicales et de santé dans toute société, une question, parmi bien d’autres, se pose.
Lorsqu’il a «comblé» cet écart, le gouvernement Charest a-t-il pris en compte un coût de la vie moins élevé au Québec que dans les provinces dites «riches»? A-t-il pris en compte, par exemple, l’existence des congés parentaux, de garderies à 5, puis 7 $ par jour, l’assurance-médicaments. etc.?
Bref, a-t-il pris en compte l’existence de programmes sociaux auxquels les médecins ont eux aussi, bien entendu, accès? Des programmes sociaux dont la plupart n’ont pas leur équivalent dans les provinces dites «riches».
A-t-il aussi pris en compte les droits de scolarité nettement inférieurs au Québec, incluant pour la formation, coûteuse, des médecins? Une excellente chose, soit dit en passant.
L’article du Devoir rappelle également que cette hausse vertigineuse de l’enveloppe consacrée à la rémunération des médecins est «le fruit des dernières négociations conclues en 2007 par Gaétan Barrette, alors président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), qui avait comme homologue Philippe Couillard comme ministre de la Santé.»
Comme le monde est petit.
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Culture médicale ou entrepreneuriale?
Si le gouvernement actuel propose d’«étaler» les dernières tranches impressionnantes de ces augmentations dites de «rattrapage», il reste qu’on parle ici d’étalement. Point. Ce qui est négocié le restera. Du moins, pour les médecins.
Partout ailleurs, par contre, ou presque, on s’attend à voir le couperet tomber lourdement sur les dépenses de l’État d’ici le budget de 2015. Ce qui, c’est incontournable, affectera la rémunération à terme de certaines catégories d’employés de l’État. Et surtout, les services directs à la population.
C’est à se demander ce qu’en pense la vaste majorité des Québécois, lesquels travaillent, payent leurs impôts et leurs taxes, mais dont le salaire médian tourne autour des 42 000 $ par année avant impôts. Et dont le revenu disponible stagne en fait depuis longtemps.
Qu’en pense la vaste majorité des Québécois à l’aube de la énième ère d’austérité qui, de toute évidence, sera encore et toujours à géométrie variable?
Qu’en pensent-ils à la lumière des études (2) qui s’accumulent à l’effet qu’ils n’en ont pas pour leur argent face à des médecins qui, ici, sur le plan global et non individualisé, sont moins productifs et moins accessibles que dans les provinces voisines?
Et ce, encore une fois, sans nier leur importance évidente et leur apport essentiel dans toute société. Sans nier, non plus, qu’il existe aussi plein de médecins dont la préoccupation première n’est pas de fracasser de nouveaux records de revenus.
Cela dit, on ne peut nier, non plus, qu’avec le temps, les puissantes fédérations dont le rôle est de «représenter» les médecins ont peu à peu troqué la culture médicale pour une culture, disons, nettement plus entrepreneuriale.
Un glissement avec lequel plusieurs médecins sont en désaccord eux-mêmes… J’en connais moi-même et je ne suis sûrement pas la seule dans ce cas.
Le problème est que cet esprit d’entreprise, lequel est en partie le produit du statut de «travailleur autonome» des médecins, est nourri à même les fonds publics. Pis encore, il ne livre pas la «marchandise» pour laquelle il est nourri.
Soit dit, encore une fois, dans une perspective globale, voire devenue systémique au Québec.
Qu’en pensez-vous ?
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(1) Vous trouverez également dans cet article, le détail des rémunérations moyennes par spécialités médicales: http://www.ledevoir.com/societe/sante/413464/revenu-des-medecins-aucun-domaine-medical-sous-la-barre-des-200-000
(2) http://www.cdhowe.org/pdf/Commentaire_410.pdf
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