Dans six jours, le 17 avril, cela fera exactement 35 ans qu’entrait en vigueur la nouvelle Constitution du Canada, imposée au Québec sans son consentement.
C’est parce que le Québec n’a jamais donné son accord qu’aucun gouvernement québécois, libéral ou péquiste, n’a mis sa signature au bas de la loi fondamentale du Canada.
Pourquoi reparler de ces «vieilles histoires»? demanderont les amnésiques et les ignorants.
Parce que cela reste d’une importance cruciale et parce que cela met en lumière la réalité politique du Canada actuel.
Arme
La Constitution du Canada est assortie d’une Charte des droits dont l’article 11 prévoit notamment le droit à un procès dans un délai raisonnable.
C’est le non-respect de ce droit qui fonde l’arrêt Jordan, lequel entraîne la libération de gens accusés de crimes gravissimes et la multiplication des requêtes pour arrêter les procédures en cours.
Mais cette même Charte contient aussi un article 33, qui prévoit qu’un gouvernement peut temporairement se soustraire à certains articles, dont le 11e.
Faut-il invoquer cette clause dérogatoire pour empêcher que ces accusés se retrouvent libres comme l’air?
Le PQ le réclame depuis la libération d’un homme accusé d’avoir égorgé sa femme. M. Couillard s’y refuse, y voyant une «arme nucléaire».
L’affaire est tout sauf simple: vous n’aimeriez pas voir le meurtrier de votre fils être libéré pour cause de délai déraisonnable, mais aimeriez-vous être emprisonné pendant cinq ans sans être jugé?
Au-delà du débat juridique, voyons plutôt les leçons politiques dont l’affaire est porteuse. J’en vois au moins quatre.
Aucun gouvernement du Québec n’a accepté cette nouvelle Constitution imposée de force par Trudeau père, que certains «célébreront» dans quelques jours, mais elle s’applique quand même.
Quand Philippe Couillard est devenu chef du PLQ, il avait fait de l’adhésion du Québec au pacte constitutionnel une question centrale, ce qui supposait de négocier les conditions de la réparation de l’affront de 1982.
L’avez-vous entendu récemment sur le sujet? Il a compris son influence sur le reste du Canada.
Mutation
Voir dans le recours à la clause dérogatoire une «arme nucléaire» illustre aussi la mutation proprement génétique subie par le PLQ depuis les années Bourassa.
En 1988, quand un arrêt de la Cour suprême décréta que le gouvernement du Québec ne pouvait interdire l’affichage commercial en anglais, Robert Bourassa invoqua la clause dérogatoire pour faire adopter la loi 178 et maintenir l’intégralité de la Charte de la langue française.
Les anglophones se fâchèrent, tirèrent sur la laisse du PLQ et l’éphémère parti Égalité vit le jour. Le PLQ retint la leçon.
Plutôt que de défendre une vision québécoise du Canada, le PLQ d’aujourd’hui a complètement intériorisé la vision canadienne du Québec.
Évidemment, ces affaires criminelles n’avorteraient pas pour cause de délais déraisonnables si Ottawa nommait des juges aux postes vacants, comme le Québec et les autres provinces le demandent avec insistance, ce qui illustre qui a le gros bout du bâton dans ce pays.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé